Une mar�e humaine a tangu� de joie hier � la rupture du je�ne du militant anticorruption Anna Hazare, consid�rant que sa victoire sur le pouvoir, qui a accept� de prendre en compte ses demandes, �tait celle de tout un peuple redevenu �fier� d'�tre indien. Des dizaines de milliers de personnes ont afflu�, � pied, � moto, en rickshaw ou en taxi vers une esplanade du centre de New Delhi, pour assister � un moment �historique�, sous le regard passif de forces de police d�bord�es. Sous une chaleur moite de fin de mousson, les partisans en sueur arboraient cr�nement des drapeaux indiens et s'�taient coiff�s d'une calotte blanche, la m�me que portait Gandhi et remise au go�t du jour par Anna Hazare, fervent admirateur du h�ros de l'ind�pendance. �C'est un jour historique pour le pays. Le gouvernement a compl�tement �chou�. Maintenant, il va devoir rendre des comptes au peuple�, assurait un militant de 36 ans qui n'a donn� que son pr�nom, Paresh. �Hazare repr�sente l'homme de la rue. Sa victoire est notre victoire�. Les partisans se targuaient aussi d'avoir fait plier l'Etat sans violence. �Nous ne sommes pas � Londres ! Ici, rien n'a �t� cass�. C'est une r�volution qui s'est d�roul�e pacifiquement �, soulignait Rahul Karan, un ing�nieur en informatique de 31 ans, faisant allusion aux r�centes �meutes dans la capitale britannique. Puis la voix d'Anna Hazare a retenti et la foule a retenu son souffle, avant de reprendre � l'unisson son slogan, comme un mantra religieux. �Je jure que je ne recevrai jamais de pots-de-vin !�, scandent les manifestants, levant les bras au-dessus de leur t�te dans un signe de renoncement total. �Tant de gens sont venus de tout le pays pour le soutenir, avec leur propre argent, alors que les partis politiques paient les foules pour s'assurer qu'il y aura du monde � leurs rassemblements�, ironisait R.S. Mangat, consultant technique dans l'industrie papeti�re. �Aujourd'hui, nous sommes fiers d'�tre indiens. On a r�ussi sans aucune violence. Vive notre m�re l'Inde�, s'enthousiasmait cet homme de 68 ans. Devant des dizaines de cam�ras de t�l�vision, Anna Hazare a interrompu son je�ne en buvant quelques gorg�es de lait de noix et de miel. �Nous avons montr� au monde comment mener une agitation pacifique. Le Parlement a d� s'incliner devant le pouvoir du peuple, mais notre lutte ne s'arr�te pas l�. Nous voulons changer le pays, mais dans le cadre de la Constitution�, a-t-il lanc�. La veille, le militant avait accept� de cesser sa gr�ve de la faim apr�s avoir arrach� des concessions aux parlementaires. Sa campagne contre la corruption, dont le foudroyant succ�s populaire a �branl� le gouvernement, s'�tait cristallis�e sur un projet de loi visant � cr�er un poste de m�diateur de la R�publique devant surveiller les hommes politiques et les bureaucrates. Anna Hazare exigeait le retrait du texte et l'adoption d'une version plus radicale. Il avait entam� pour cela une gr�ve de la faim le 16 ao�t. Samedi, le ministre des Finances, Pranab Mukherjee, a indiqu� que les parlementaires avaient accept� le principe des propositions d'Anna Hazare. Il s'agit de la cr�ation d'un m�diateur de la R�publique dans chacun des 29 Etats de l'Union indienne, de la r�daction d'une �charte du citoyen� expliquant les droits du peuple et de l'extension des pouvoirs du m�diateur � tous les fonctionnaires du gouvernement. Le ministre de la Justice Salman Khurshid a f�licit� dimanche Anna Hazare pour son action �r�ussie et pacifique�, ajoutant que �la soci�t� civile devrait jouer un r�le important dans le syst�me politique du pays�. �Ce mouvement a �t� exemplaire�, a-t-il conclu. La tactique du militant a toutefois �galement fait l'objet de virulentes critiques.�L'homme qui est devenu le h�ros de la classe moyenne indienne est sur le plan id�ologique, un quasi-marxiste dans sa haine des riches et un quasi-anarchiste dans son m�pris de la d�mocratie�, �crivait ainsi un �ditorialiste du quotidien Sunday Express.