Par Boubakeur Hamidechi [email protected] Avait-il besoin de tant de solennit� officielle et de gravit� de ton pour, finalement, n�annoncer que la date d�un scrutin interm�diaire ? Un chef de l�Etat qui avait d�cid� des ann�es auparavant de ne rendre publiques ses ordonnances qu�� travers des communiqu�s ne surprendil, par cette soudaine sollicitude � l��gard de l�opinion, lorsqu�il choisit une th�matique � l�int�r�t relatif pour s�astreindre � l�exercice oral ? C�est que sa plus r�cente prestation du m�me genre remonte � 300 jours (15 avril) et que depuis il n�a jamais estim� utile, voire n�cessaire de prendre langue avec le pays alors qu�il y avait mati�re � rompre le silence. En parfait d�calage avec sa strat�gie du silence, il se remet au-devant de la sc�ne juste pour plaider, avec des formules compass�es d�ailleurs, l�importance du renouvellement qualitatif d�un parlement. Dix minutes de pupitre lui auront suffi � �noncer la batterie de garanties contenues dans la loi tout en caressant une improbable fibre civique chez un �lectorat impr�visible avec lequel le r�gime, lui-m�me, n�a pas d�affinit�s �lectives. Comment, par cons�quent, comprendre l�op�ration de communication de jeudi soir si ce n�est qu�elle va au-del� de la campagne de mobilisation classique. Dans un pays secou� par les m�mes remous, que ceux de la r�gion, le pouvoir local n�a d�autres alternatives que celles des r�formes. Sauf que, pour contourner la difficult� de sa propre remise en question, il d�cide de transf�rer vers les institutions interm�diaires l�origine de la crise de l�Etat. Ce serait donc elles qui devraient faire l�objet du grand ravalement, innocentant, de facto, celle du sommet. C�est ainsi que le train des r�formes engag�es n�a mis en �quation que les lois organiques tout en s�interdisant d�ouvrir le moindre d�bat sur la loi fondamentale. L�intention tr�s claire du pr�sident de la R�publique de ne rien c�der imm�diatement sur le domaine r�serv� de la Constitution n�a-t-elle pas �t� affich�e dans ses engagements du 15 avril ? Oui aux r�formes, disait-il substantiellement, mais exclusivement sous la houlette du pouvoir. Globalement, sa strat�gie semble payante dix mois apr�s sa mise en route. Car rien de d�cisif qui l�aurait dissuad� ou du moins l�aurait contraint � corriger sa copie n�avait pes� � partir du d�sert qu�est devenu le champ politique. Parvenu sans difficult� � se rel�gitimer en tant que pilote sans partage des r�formes, c�est d�sormais � lui qu�incombe leur aboutissement. Les l�gislatives, �tant cette premi�re �tape, il ne peut que peser de toute sa fonction pour que formellement elles ne soient pas contestables et contest�es. Autres temps autres m�urs et de surcro�t autres objectifs vitaux, Bouteflika ne peut plus se payer le luxe du pass� (2002-2007) : celui du m�c�nat redistributif des maroquins. Et ce n�est pas tant le risque d�un Parlement-mosa�que qui le pr�occuperait en premier lieu qu�un �chec par l�abstention �lectorale qui l�affaiblirait au moment o� il souhaitera mettre sur le m�tier � tisser son canevas d�une nouvelle institution. Pour peu que l�on ne s�int�resse qu�� la seule volont� du chef de l�Etat de demeurer dans sa fonction jusqu�en avril 2014, il est parfaitement plausible d�interpr�ter sa r�apparition physique de jeudi comme un indice de ce que sera sa d�marche tout au long de cette ann�e. Et pourquoi compte-t-il � l�avenir s�investir directement et surtout sans d�l�gation de mission ni de porte-parole dans son ultime �uvre. Car au-del� des m�canismes suppos�s capables d�assurer enfin une bonne �lection il aura d�abord, pour souci personnel, le devoir de renouer les liens distendus avec un pays afin de s�assurer une sortie par le haut. Autrement dit, ne vient-il pas d�inaugurer un nouveau style qui, cette fois, l�obligera � agir, peser et convaincre par son seul talent et sans filet amortissant les d�rapages ? En effet, le rendez-vous du 10 mais n�est pas gagn� d�avance pour le r�gime m�me lorsqu�il pronostique une comp�tition ouverte et loyale. Bien plus que le d�ficit des urnes du pass�, il sera plut�t question des qualit�s humaine et intellectuelle des appareils qui animeront les d�bats et d�termineront l�adh�sion des �lecteurs. Sur cet aspect primordial, la preuve est faite depuis au moins 4 scrutins (2 l�gislatives et 2 locales) que le rabaissement syst�matique du niveau de �recrutement� aux fonctions �lectives �tait imputable au pouvoir. Ses encouragements � la d�mon�tisation de l��lite politique par le recours � la promotion d�un personnel � la culture politique approximative et � l��thique douteuse ont d�finitivement aboli, a contrario, le r�flexe civique chez l��lecteur. Les d�g�ts irr�parables qu�illustrent les votes de 2007, notamment, peuvent-ils, par la seule incantation d�un discours pr�sidentiel, passer par pertes et profits, pour ensuite relancer l�enthousiasme dans ce domaine ? Certainement pas, car le contentieux avec le pouvoir est toujours l� insidieux, implicite et parfois frontalement d�nonc� par les gr�ves et les frondes anti-autorit�. Tout cela constitue la r�alit� d�un pays d�senchant� et suspicieux face aux proph�tismes du politique. Voil� pourquoi il ne reste � Bouteflika qu�une marge �troite au moment o� il entame la derni�re ligne droite de sa carri�re. Celle dans laquelle il doit faire preuve de hauteur morale pour m�riter, plus tard, quelques accessits dans les futurs manuels d�histoire.