L'�crivain sino-belge Han Suyin, d�c�d�e vendredi � Lausanne, � 95 ans, a �crit de nombreux romans et r�cits historiques sur la Chine et joua un r�le diplomatique discret, mais majeur, comme �ambassadrice� de bonne volont� de la Chine de Mao Ts�-Toung en Occident. Cette fr�le et charismatique femme myst�rieuse, qui se disait �r�volutionnaire chinoise� en Occident et �bourgeoise� en Chine socialiste, arpentait les radios et les t�l�visions du monde dans les ann�es 1960 et 1970 pour tenter de briser l'image repoussante qu'avait la Chine de Mao, avant son admission � l'ONU. Si pour beaucoup elle fut un �pont n�cessaire�, une �ambassadrice de charme�, Han Suyin fut tr�s critiqu�e par les adversaires du r�gime pour avoir tent� de justifier le �Grand Bond en avant� � la fin des ann�es 1950, et la �R�volution culturelle� des ann�es 1960. Parfaitement sinologue, francophone et anglophone, elle voyageait beaucoup. Ses romans, notamment Multiple splendeur, L'arbre bless� � sur l'amour de ses parents �, Une fleur mortelle ou L'�t� sans oiseaux la font comparer � l'Am�ricaine Pearl Buck en introduisant le lecteur dans l'intimit� de la vie des familles chinoises, par-del� les soubresauts politiques. Son originalit� tient � l'assimilation dans son �uvre entre son propre destin et celui de la Chine. De son vrai nom Rosalie Elisabeth Comber, baptis�e Matilda Rosalie Elizabeth Zhou, Han Suyin � son nom de plume choisi, �su yin� signifiant �voix ordinaire� �, naquit le 12 septembre 1917 � Xinyang, dans la province du Henan. Son p�re, Yeng Dongzhou, n� en Chine, avait fait des �tudes de g�nie ferroviaire � Bruxelles. C'est l� qu'il rencontre Marguerite Denis, fille d'un ministre belge. Ils se marient en 1908, malgr� les pr�jug�s raciaux de l'�poque, et eurent huit enfants. Le couple s'est install� en Chine en 1913, et Han Suyin se lance dans des �tudes de m�decine, mais doit travailler pour les payer. Elle est r�volt�e par le sort des ouvriers chinois, bien moins pay�s que les Europ�ens. Repartie en Europe pour ses �tudes en 1934, elle revient en Chine pour participer, comme infirmi�re, � la guerre contre l'occupation japonaise en 1938 et sa conscience patriotique se renforce. Elle obtient son dipl�me de docteur en m�decine � Londres en 1948. Entretemps, elle a connu une s�rieuse d�ception amoureuse avec son premier mariage, un ing�nieur tr�s anti-communiste, Dang Baoyang. Elle divorce et il sera tu� pendant la guerre civile. Han Suyin entretient plus tard une liaison avec le journaliste britannique Ian Morrison, qui meurt pendant la guerre de Cor�e en 1950. Remari�e avec un sp�cialiste britannique du contre-espionnage, Leon Comber, elle vit et travaille comme m�decin alternativement en Malaisie et � Singapour, et se rapproche de plus en plus des communistes. Elle n'est pas l� pendant la r�volution de 1949 en Chine. Elle retrouve en 1956 seulement son pays natal, et son p�re malade. Elle est re�ue, �tant d�j� c�l�bre, avec faste, par le Premier ministre Zhou Enlai. D�s lors, vivant le plus souvent � Hong Kong et mari�e � une troisi�me fois � avec un ing�nieur indien, Vicent Ruthnaswany, ayant renonc� � la m�decine, elle s'attache, tant dans ses �crits que ses prises de parole, � montrer les progr�s ��clatants�, � son sens, de la Chine populaire, o� elle vit quatre mois par an. Mais ses �uvres n'y sont jamais publi�es. �Mao est le plus grand homme que la Chine ait connu�, soutient-elle en octobre 1968 dans Le Figaro. D�but 1970, le g�n�ral de Gaulle ayant quitt� le pouvoir demande � Han Suyin de lui organiser une rencontre avec �le grand timonier�, le 18 juin 1971. Mais l'ancien pr�sident fran�ais d�c�dera entretemps. Toujours en activit� dans les ann�es 1980, Han Suyin r�side d�s lors le plus souvent � Lausanne. Tr�s discr�te, elle soutient n�anmoins Deng Xiaoping et la Chine de �l'apr�s-Mao�, y compris sur la question tib�taine, ce qui lui attire les foudres, en 2001, des partisans de l'ind�pendance.