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LES ISLAMISTES �LIMINENT UN OPPOSANT
La Tunisie face � ses assassins
Publié dans Le Soir d'Algérie le 07 - 02 - 2013

Le pire est peut-�tre � craindre dans cette Tunisie qui peine toujours � asseoir une transition tranquille, apr�s la r�volution dite des �jasmins�. Enlis� dans une grave crise politique, menac� dans sa s�curit� par le terrorisme, le pays plonge dans le crime politique : l�assassinat, hier matin, du leader de l�opposition Bela�d Chokri, devant son domicile, en plein c�ur de Tunis. Ses proches accusent le parti islamiste Ennahda de Rachid Ghanouchi.
Sofiane A�t Iflis - Alger (Le Soir) - La Tunisie bascule. Dangereusement. L�assassinat, hier, de Bela�d Chokri, secr�taire g�n�ral du Parti des patriotes d�mocratiques, figure de proue de l�opposition coalis�e au sein du Front Populaire, n�augure rien de bon pour ce pays non encore sevr� de l�amer go�t de sa r�volution avort�e, d�tourn�e par les islamistes qui en ont tir� le plus grand profit politique. Le crime politique est toujours annonciateur du pire, notamment dans cette Tunisie tr�s instable. La liquidation physique de Bela�d Chokri, militant de l�extr�me gauche panarabiste, fervent opposant au gouvernement islamiste d�Ennahda, donne un autre visage, tr�s dangereux, � la violence en Tunisie. Bela�d Chokri, personnalit� politique tr�s m�diatis�e apr�s la r�volution dite des �jasmins�, a �t� atteint de trois balles, tir�es � bout portant par un homme v�tu, selon les premiers �l�ments d�information, d�une kachabia. Il a �t� assassin� alors qu�il venait juste de sortir de chez lui. La nouvelle de son assassinat s�est r�pandue telle une tra�n�e de poudre. Vite, des rassemblements de d�nonciation ont essaim� un peu partout en Tunisie. Dans la capitale, les manifestants, d�abord un petit nombre, puis une v�ritable mar�e humaine, se sont rassembl�s devant le si�ge du minist�re de l�Int�rieur, avenue Habib-Bourguiba. Reprenant � leur compte les accusations prof�r�es par les proches de la victime � l�encontre du parti islamiste Ennahda de Rachid Ghenouchi, les manifestants ont scand� des slogans hostiles au parti et au gouvernement. L�accusation la plus franche a �man� du fr�re de la victime, Abdelmadjid Bela�d qui a clam� : �J�accuse Rachid Ghanouchi d�avoir fait assassiner mon fr�re.� Aussi, dans certaines localit�s, les manifestants se sont attaqu�s aux locaux du parti Ennahda, saccageant certains d�entre eux. A Sidi Bouzid, ville o� s��tait immol� Mohamed Bouazizi, le martyr par qui les Tunisiens d�clench�rent la r�volution dite des jasmins, la police a us� de gaz lacrymog�nes pour disperser les manifestants. A Tunis �galement, o� une foule immense a accompagn� la d�pouille de Bela�d Chokri, transport�e � bord d�une ambulance tout au long de l�avenue Bourguiba. Les manifestants ont ripost� par des jets de pierres et de bouteilles. En fin d�apr�s-midi, les manifestants ont dress� les premi�res barricades dans Tunis o� la nuit risque d��tre agit�e.
Quatre partis appellent � une gr�ve aujourd�hui jeudi
Quatre partis de l�opposition tunisienne se sont imm�diatement concert�s apr�s l�assassinat de Bela�d Chokri. Ils ont d�cid� de suspendre leur participation � l�Assembl�e nationale constituante et ont appel� � une gr�ve g�n�rale pour aujourd�hui jeudi. Le Front populaire, le parti r�publicain, Al Massar et Nidaa Tounes ont en effet lanc� un appel � une gr�ve g�n�rale en guise d�un premier acte de protestation et de d�nonciation de l�assassinat du leader de l�opposition. Une action qui pourrait conna�tre des prolongements, tant est que l�opposition tunisienne ne compte pas laisser impuni ce crime politique, intervenu au moment fort d�une crise politique, r�sultante de la m�sentente entre Ennahda et ses alli�s dans le gouvernement. Des alli�s qui r�clament un remaniement gouvernemental. Ce � quoi Ennahda ne veut pas acc�der.
Le gouvernement tente l�apaisement
Le pr�sident tunisien Moncef Marzouki, qui se trouvait au Parlement europ�en � Strasbourg, a d�nonc� le crime qu�il a qualifi� d�odieux et qu�il a attribu� aux �ennemis de la r�volution�. �Cet odieux assassinat d'un leader politique que je connais bien (...) est une menace, c'est une lettre envoy�e mais qui ne sera pas re�ue�, at- il d�clar� devant le Parlement europ�en, ajoutant : �Nous refusons ce message et nous continuons � d�masquer les ennemis de la r�volution.� Moncef Marzouki a, par ailleurs, estim� exag�r�es les accusations du fr�re de la victime contre le parti Ennahda. �C'est exag�r� de lancer des accusations de ce type, c'est absurde�, s'est-il exclam� lors d'une conf�rence de presse � Strasbourg, poursuivant : �Je ne peux pas accepter qu'on commence � lancer des accusations de ce type. C'est une affaire qui sera probablement difficile � diligenter.� Pour le pr�sident tunisien, l�objectif des criminels est que les Tunisiens s�accusent les uns les autres. Moncef Marzouki, qui devait rallier Le Caire pour participer � la conf�rence de l�OCI, est rentr� directement � Tunis. Avant l�intervention de Marzouki devant le Parlement europ�en, le Premier ministre tunisien, Hamadi Jebali, a d�nonc� l�assassinat le qualifiant d�acte terroriste. �C'est un acte criminel, un acte de terrorisme pas seulement contre Bela�d mais contre toute la Tunisie�, a-t-il dit � la radio Mosa�que FM. Il a promis de tout faire pour arr�ter le tueur. �Le peuple tunisien n'est pas habitu� � ce genre de choses, c'est un tournant grave (...) notre devoir � tous, en tant que gouvernement, en tant que peuple, c'est de faire preuve de sagesse et de ne pas tomber dans le pi�ge du criminel qui vise � plonger le pays dans le d�sordre�, a-t-il encore d�clar�. Le parti Ennahda, sur qui p�se l�accusation, a, de son c�t�, d�nonc� un crime odieux visant � d�stabiliser le pays. Le chef du Front populaire Hamma Hammami avait auparavant soutenu qu��il (l�assassinat de Bela�d Chokri) a �t� commis par des partis politiques qui veulent enfoncer le pays dans le meurtre et l'anarchie. Tout le gouvernement et tout le pouvoir assument la responsabilit� de ce crime odieux car les menaces contre Chokri et d'autres ne datent pas d'aujourd'hui�.
S. A. I.
REACTIONS...
HANNENE ZBISS, JOURNALISTE � R�ALIT�S :
�L�opposition va exiger le d�part d�Ennahda�
�Cet assassinat politique marque un passage d�une �tape � une autre, bien plus grave. La Tunisie est aujourd�hui confront�e � une situation de liquidation physique. L�assassinat de Chokri Bela�d intervient en pleine crise politique, il faut s�attendre � des r�percussions sur le remaniement du gouvernement. Les partis d�opposition vont exiger le d�part d�Ennahda des minist�res de souverainet�, � savoir ceux de l�Int�rieur, des Affaires �trang�res et de la Justice. Nous ne savons pas si Ennahda c�dera facilement. Mais une chose est s�re, l�opposition et la soci�t� civile sont d�cid�es � mener la contestation jusqu�au bout pour obtenir la chute du gouvernement actuel et aller vers un gouvernement d�union nationale.�

SAMI TAHRI, SECR�TAIRE G�N�RAL ADJOINT DE L�UGTT ET MEMBRE DU PARTI DES PATRIOTES D�MOCRATES :
�Faire que ce soit le premier et dernier assassinat politique�
�Nous devons faire en sorte que le meurtre de notre fr�re Chokri Bela�d soit le premier et dernier assassinat politique qui se produit en Tunisie. Il faut d�noncer avec force les facilit�s dont b�n�ficient les extr�mistes de la part des autorit�s, notamment de la part du minist�re de l�Int�rieur. Les partis politiques de l�opposition se concertent pour �viter que le pays ne sombre dans le chaos.�
Me SA�DA GARRACH, AVOCATE ET MEMBRE DE L�ASSOCIATION DES FEMMES D�MOCRATES :
Chokri repr�sentait un r�el danger pour les islamistes�
�Chokri Bela�d �tait un ami, un fr�re et un camarade. Je milite � ses c�t�s depuis 1985. Il nous a annonc� avoir re�u des menaces. Il les a prises tr�s au s�rieux. Chokri �tait croyant et courageux, il n�a jamais �t� l�che. Mais il n�a jamais exig� de protection personnelle. Il a pris attache avec les autorit�s pour exiger que la loi soit appliqu�e � l�ensemble des Tunisiens. De par sa grande culture politique et ses connaissances religieuses, Chokri Bela�d repr�sentait un r�el danger pour les islamistes. Il est clair qu�ils ne supportaient plus son franc-parler.�


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