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Prix et salaires : quelles vérités ?
Publié dans Le Soir d'Algérie le 11 - 09 - 2013


Par Zoubir Zemzoum
Pour résoudre certains problèmes récurrents, secrétés par leur mauvaise gouvernance, dans les différents secteurs de la vie nationale, nos dirigeants ont pris la mauvaise habitude de s'attaquer aux effets et non aux causes des maux qui entravent, ou dénaturent, le bon fonctionnement de nos institutions, détournent de leurs objectifs nos plans de développement et retardent, bien souvent, la satisfaction des besoins matériels et immatériels de nos populations.
L'exemple des carburants
L'exemple du trafic du carburant, à nos frontières, illustre, parfaitement, cette ligne de conduite de nos responsables. En dénonçant l'ampleur de ce mal endémique dont les préjudices causés à notre économie et à nos finances publiques sont incalculables, notre ministre de l'Energie a pris, pour une fois, son courage à deux mains, pour tirer la sonnette d'alarme sur la gravité de ce «cancer» qui rogne nos finances. Emboîtant le pas à son ministre, le Premier ministre affirme, quant à lui, sa détermination à engager une lutte sans merci contre les trafiquants d'essence. Il nous prédit, dit-il, une lutte implacable contre cette mafia organisée du pétrole. Pour ce faire, il s'en remet à la sempiternelle «conjugaison des efforts de tout le monde» pour stopper cette hémorragie. Le ton dur employé par le Premier ministre et sa volonté affichée d'en découdre avec les trafiquants nous renseignent sur le caractère essentiellement répressif des mesures envisagées pour colmater les brèches ouvertes dans notre réseau de distribution énergétique. Dans ce genre de combats, l'expérience nous a enseigné, pourtant, que l'intensification des contrôles de nos frontières n'est pas la solution appropriée. Tout le monde sait que le dispositif de surveillance mis en place par les autorités sera battu en brèche par le génie malfaisant des différents intervenants dans ce commerce illicite. Les contrebandiers ne se font pas trop de soucis, d'ailleurs, sur l'issue de cette expédition. Ils savent que ces coups de pied périodiques donnés dans la fourmilière ne peuvent les gêner longtemps dans leur entreprise. De telles actions nous prouvent, encore une fois, que le recours à la politique de l'autruche privilégiée par les pouvoirs publics, ne résoudra pas la question de fond qui les interpelle. En s'entêtant à agir sur les effets de ces phénomènes plutôt que sur leurs causes, ils ne pourront jamais extirper le mal à sa racine. Si nous sommes d'accord avec le ministre de l'Energie pour dire que «la contrebande du carburant est une gangrène pour l'économie nationale» et l'appuyons, dans sa volonté de mettre un terme à ce trafic, nous ne pouvons approuver, par contre, les mesures aléatoires préconisées par le gouvernement pour éradiquer ce fléau, parce que nous sommes convaincus de leur inefficience, pour la simple raison qu'elles ne visent pas le tarissement de la source génératrice de ce trafic.La mobilisation des organismes de surveillance ne peut, à elle seule, pour des raisons évidentes, connues de tout le monde, venir à bout de tous les réseaux mafieux gravitant autour de ce trafic de carburant. Cette politique, expérimentée déjà dans d'autres domaines, a démontré toute la nullité de ses résultats. Tout le monde sait que la source du mal réside dans le bas prix de notre essence, par rapport à celui affiché dans les stations-service des pays limitrophes. Après un examen minutieux des tenants et des aboutissants de ce dossier, la logique exige de nos autorités, une réflexion approfondie sur le comment faire pour ajuster le prix de notre essence à celui de nos voisins, sans pour autant porter préjudice au pouvoir d'achat de nos concitoyens les plus démunis, sans un surenchérissement des coûts de production pour nos entrepreneurs. Certes, les retombées de cet ajustement des prix influeront négativement sur les prix des carburants, et par ricochet, sur le pouvoir d'achat des citoyens les plus démunis. Elles constitueront, sans doute, une charge supplémentaire pour nos entrepreneurs qui se plaignent, déjà, du manque de compétitivité de leurs produits inhérent à la concurrence déloyale qui leur est imposée par les importateurs. N'en déplaise à tous les avis contraires à cette mesure, l'ajustement des prix de l'essence, comme d'ailleurs celui de tous les produits importés, est le premier levier de commande d'une véritable et déterminante politique de remise en ordre de notre économie et d'assainissement de notre commerce extérieur et intérieur. Pour démentir les arguments avancés, bien évidemment, par les porte-parole de la mafia de «l'import-import», l'Etat dispose, pour peu que ses dirigeants aient le courage politique d'appliquer cette vérité des prix à tous les produits importés, des justificatifs politiques, économiques, financiers, sociaux, écologiques et moraux, pour formuler et défendre l'argumentaire plaidant pour l'acuité, la fiabilité et, donc, la faisabilité d'une telle mesure, des plus salutaires pour le pays. Recensant, tout d'abord, les avantages escomptés par cette décision. L'ajustement des prix de l'essence sur ceux de nos voisins va arrêter, sans aucun doute, immédiatement et sans coup férir, cette hémorragie. Elle mettra, de ce fait, un terme à ce trafic et éliminera, en même temps, la corruption provoquée par la contrebande et réduira, sensiblement, la pénétration sur le sol national, des produits prohibitifs, éminemment nocifs pour la santé de notre jeunesse et dangereux pour notre sécurité, comme le cannabis, le tabac, les armes, etc. Car, c'est avec l'argent de ce trafic de carburant et autres articles chèrement importés par le pays, que les trabendistes financent tous ces produits interdits à l'importation. La répercussion de cet ajustement des prix de l'essence sur ceux de nos voisins se traduira, aussi et immédiatement, par une réduction significative de nos importations de carburant et une diminution de l'enveloppe en devises qui lui est consacrée. Le pays va économiser, en outre, non seulement les quantités d'essence écoulées sur le marché de nos riverains mais aussi, une partie, de celle consommée abusivement, par nos concitoyens, car la cherté du carburant réduira l'utilisation inopportune des voitures qu'on voit circuler sans raisons valables à longueur de journée. Le volume d'importation des véhicules neufs baissera et celui de leur facture, aussi. Cette tendance à l'économie du carburant et à la réduction de l'achat de véhicules neufs agira positivement, enfin, sur l'environnement, par une diminution de la pollution et sur la densité de la circulation et la sécurité routière, par un recul du nombre des accidents. A tous ces avantages, qu'on ne met jamais sur un plateau de la balance des paiements, on nous oppose, sur l'autre, le poids de l'effet négatif, de cette augmentation des prix de l'essence, sur le pouvoir d'achat des citoyens les plus démunis et sur le coût de production dans nos entreprises industrielles et agricoles. Cet argument qui nous est balancé à la figure, chaque fois qu'on évoque la nécessité de cette parité des prix, ne tient pas la route. A ce sujet, il faut prendre l'exemple sur les pays voisins. Si les Tunisiens et les Marocains, dont le niveau de vie et le pouvoir d'achat sont inférieurs à ceux de l'Algérien, s'accommodent de la cherté de leur carburant, pourquoi l'Algérien ne l'admettrait-il pas ? Il faut préciser, en outre, que l'augmentation du prix du carburant ne touchera que les salariés à moyen et faible revenus, car, ceux dont les émoluments mensuels dépassent les cent mille dinars, et les nantis peuvent supporter aisément de telles charges. Cet argument, défendu surtout par les mandants de ce trafic, ne doit pas constituer une entrave à l'application de ce réajustement, inéluctable, des prix de nos carburants. Quant à nos entreprises, l'Etat est en mesure de réduire les effets négatifs de cette augmentation du prix de nos carburants, sur la compétitivité de nos entreprises, grâce à la ristourne financière récupérée sur l'enveloppe attribuée à l'importation de l'essence. Une ponction sur celle-ci serait la bienvenue pour les entreprises en difficulté, sous forme d'aides d'encouragement à la production ou d'allègements fiscaux que nos entrepreneurs jugent, déjà, assez lourds. Ce qui nous paraît logique et réalisable pour les carburants peut l'être aussi pour tous les produits soutenus par l'Etat.
Vers la réévaluation du dinar
Pour compenser le taux de perte du pouvoir d'achat des salariés et des travailleurs les moins nantis, les pouvoirs publics pourraient, là aussi, puiser dans la cagnotte de la ristourne, assez conséquente, tout de même, si on se réfère à la baisse substantielle effectuée sur la facture de nos importations, pour réajuster les salaires des travailleurs à moyens et faible revenus, sans pour autant accroître notre déficit budgétaire. Il est possible, aussi, d'établir l'équilibre recherché, entre les prix et les salaires, par une réévaluation du dinar. Pour de nombreux spécialistes en la matière, un débat, serein et approfondi sur cette option, doit être engagé pour déterminer les conditions de sa faisabilité et indiquer les techniques à mettre en œuvre pour sa réalisation. Questionnés à ce sujet, certains financiers et économistes estiment qu'aujourd'hui, rien ne s'oppose à la convertibilité du dinar. Suggérée naguère par le FMI et la Banque mondiale, la dévaluation du dinar n'a pas drainé les investissements escomptés par les pouvoirs publics et n'a pas été d'un grand secours pour nos exportations puisque nous produisons peu de choses. Tous les indicateurs économiques et financiers du pays plaident pour cette convertibilité du dinar. La réévaluation de notre monnaie est un moyen d'appui à l'application de la vérité des prix dont nous avons énuméré tous les avantages. Elle permet également au citoyen, à bas et moyen salaire, grâce à la plus-value apportée à son pouvoir d'achat, de faire face aux effets négatifs de la vérité des prix, et aux gouvernants de minimiser les conséquences financières d'une possible augmentation des salaires sur le budget de l'Etat. En alignant le taux de réévaluation du dinar sur, au moins, la valeur des monnaies de nos pays voisins, nous donnerions un argument politique supplémentaire, aux plus réticents parmi nos décideurs, pour aller dans le sens de cette convertibilité du dinar, hâter l'application de la vérité des prix et mettre, enfin, un terme aux soutiens des produits de première nécessité qui n'ont plus leur raison d'être. Voilà une politique judicieuse qui, par la maîtrise des prix et des salaires obtenue en fin de parcours, peut engager le pays sur la voie de l'assainissement de ses finances à travers la consolidation des équilibres de son budget, et assurer ainsi, à son économie une croissance soutenue un développement durable. La vérité des prix, soutenue par la réévaluation du dinar, ainsi située politiquement et comprise économiquement et socialement, doit être parmi les préoccupations majeures du gouvernement, car elle actualise, sur un autre plan, l'autre facette, la plus hideuse, de ce trafic de l'essence, celle de la corruption dont le développement et la généralisation à toutes nos institutions est des plus inquiétantes. C'est une gangrène nourrie par la multiplication et le tissage des réseaux mafieux et spéculatifs, engendrés par une politique d'importation anarchique et déraisonnée et une organisation anachronique de notre commerce externe et interne. Pour toutes ces raisons, la vérité des prix reste, nous en sommes convaincus, le moyen le plus indiqué pour remettre de l'ordre dans notre politique d'importation et dans notre modèle de consommation. La boulimie de l'Algérien, relevée durant le mois de Ramadhan, est pour beaucoup dans l'amenuisement de son pouvoir d'achat. Encouragée par l'offre démesurée des produits importés, la surconsommation des ménages est à l'origine de l'endettement auquel recourt le citoyen pour satisfaire ses nouveaux besoins. C'est dans la fringale de l'Algérien qu'il faut trouver, aussi, une raison objective à l'amenuisement de son pouvoir d'achat, bien plus que dans celle découlant de l'inflation.
L'offre et la demande
Si la demande s'adapte souvent à l'offre, celle-ci a tendance à provoquer et à attiser la demande en élargissant ses espaces par la diversité et la qualité de ses produits proposés sur le marché. Avant la politique de libéralisation de notre économie, décidée par nos dirigeants, sous la pression du FMI et de la Banque mondiale, le citoyen algérien avait pris l'habitude de consommer ce que le marché lui offrait en produits nationaux et ceux étrangers importés par l'Etat. Comprimée à l'extrême, l'offre n'avait pas un impact sérieux sur le pouvoir d'achat du citoyen dont le salaire suffisait, alors, à satisfaire ses besoins primaires. Le libéralisme brutal de notre système a permis, en un laps de temps très court, aux nouveaux maîtres de «l'import-import» d'inonder le marché par des produits nouveaux et diversifiés. Au plan psychologique et matériel, cette ouverture a libéré, certes, l'Algérien de l'aliénation des chaînes devant les Souk el-fellah et les Galeries et contribué à l'amélioration quantitative et qualitative de ses standards de consommation et de vie, mais a aiguisé, aussi, progressivement, son envie d'acheter tout ce que le marché lui offre. L'enrichissement de son menu alimentaire, le plus apporté à son confort domestique, dans son cadre de vie et dans ses loisirs(électroménager, meubles, logement, voiture, téléphonie, vacances, voyages, etc.), se sont traduits, bien entendu, par un coût que son salaire ne pouvait satisfaire, d'autant que la dévaluation du dinar avait déjà réduit la valeur financière et économique de sa fiche de paye. A défaut d'une augmentation de salaire, équivalente à la dévaluation de sa monnaie, le recours à la «chipa», au «trabendisme» et à toutes les pratiques de fraudes et de détournement des deniers publics ont imprimé les mœurs du citoyen et dénaturé son comportement social et sociétal. Cet apport pécuniaire, illicite en soi, a permis, sans aucun doute, aux uns et aux autres d'arrondir leurs fins de mois, mais ils ont permis aux nouveaux maîtres du marché de généraliser leurs pratiques corruptives à tous les niveaux des institutions du pays et de peser de tout leur poids, par la puissance de leur argent, sur la gouvernance du pays. Par la position dominante acquise au sommet du pouvoir, par l'instauration, dans la société, de pratiques mafieuses, cette nouvelle «bourgeoisie compradore» a réussi à gangréner toutes les institutions du pays et tous les rouages du pouvoir.
Les dangers de la libre importation
Au plan économique, nous connaissons tous les dégâts causés à notre tissu industriel, notamment dans le secteur des textiles, par l'importation des produits asiatiques et la concurrence déloyale imposée à nos entreprises publiques et privées. Ce qui s'est traduit, au plan social, par la perte d'emplois pour des milliers de pères de familles et l'accroissement du chômage. Au plan social, comment peut-on agir, dans un tel contexte, sur le mode de consommation des Algériens, rationaliser et prioriser ses besoins et ses dépenses, sans une intervention drastique dans nos échanges commerciaux avec le reste du monde, sans un assainissement et une réévaluation quantitative et qualitative de nos importations ? Si le gouvernement éprouve, aujourd'hui, toutes les difficultés du monde à élaborer une politique rationnelle des prix et des salaires, en rapport réel avec le développement effectif de notre production nationale, cela est dû à ce laisser-aller et laisser-faire dans notre politique d'importation, dont nous mesurons, à présent, les méfaits de toutes ses dérives et ses perversions économiques, commerciales, sociales et morales, sur le devenir de la nation et du peuple. Si le ministre des Finances a mis en garde le gouvernement contre les dangers de la croissance annuelle de nos importations et celle de l'enveloppe financière qui lui est consentie et à laquelle vient s'ajouter les méfaits de la surfacturation utilisée par des importateurs véreux, c'est parce que la politique d'importation suivie jusqu'à ce jour par l'Etat met en péril l'avenir financier et économique du pays par la réduction de nos réserves financières, le déséquilibre de nos budgets, et l'accroissement de nos déficits. La vérité des prix s'impose, donc, à nous, comme le seul fondement, crédible et salutaire, sur lequel il est possible d'élaborer une politique d'assainissement de notre commerce extérieur et de notre marché intérieur, de rationaliser notre politique d'importation et de mettre un terme aux dérèglements constatés dans notre système politique, dans notre modèle de développement économique, social et sociétal. Il s'agit là, d'une mesure radicale qui a le mérite de fermer totalement et définitivement le robinet alimentant tous les trafics recensés, de lutter, en même temps, contre la corruption qui s'y rapporte, de protéger le pays contre les agissements néfastes de tous les réseaux mafieux gravitant autour de «l'import-import» dominant. Dans ce bras de fer entamé contre les trabendistes, la vérité des prix, soutenue par la convertibilité du dinar, reste, à notre sens, le seul moyen dont dispose l'Etat pour sortir le pays de l'ornière. L'Algérie ne peut plus continuer à augmenter annuellement l'enveloppe en devises allouée à l'importation pour satisfaire, à la fois, les besoins de ses populations et celles des pays limitrophes, voire même, ceux de nos émigrés, résidant dans certains pays européens. Seule l'application de la vérité des prix peut contribuer à la moralisation, dans nos institutions, des organismes et des corps constitués, sans lesquels il est impossible de lutter contre les trafiquants de carburant et tous ceux qui prélèvent une bonne partie de nos produits importés à coup de milliards de dollars pour les écouler sur les marchés des pays voisins et ceux des pays européens et africains. C'est dans la libéralisation anarchique de nos échanges commerciaux avec le reste du monde et la désorganisation de notre marché intérieur, que la corruption a trouvé, dans le terrain fertile de «l'import – import», tous les ingrédients, de sa prolifération tentaculaire et de son emprise malsaine sur toutes les institutions et tous les rouages de la gouvernance du pays. Au vu de ce constat, la vérité des prix est une option inéluctable que le pouvoir doit, sérieusement et impérativement, faire valoir politiquement, économiquement, socialement et moralement pour engager l'Algérie sur la voie du salut qu'elle aurait dû emprunter, déjà, depuis bien longtemps. Faut-il aussi, pour ce faire, qu'il y ait, au sein du pouvoir, des patriotes assez courageux, pour oser affronter les adeptes du laisser-aller et du laisser-faire, pour contrer la révolte prévisible de tous les rentiers de l'import-import» et de résister, surtout, à l'interventionnisme de leurs soutiens politiques parmi les élus et les décideurs du pays. L'exemple de la lutte engagée par l'Etat contre les tenants du marché parallèle démontre, à lui seul, l'étendue et la profondeur du mal dont pâtissent notre système politique et notre modèle de gouvernance. Maintes fois annoncé, l'assainissement de notre marché national n'a pas résisté à la levée de boucliers d'une jeunesse qui se retrouve, sous la pression de la nécessité, prise en otage par des importateurs et des grossistes, sans vergogne, qui savent mobiliser, quand il le faut, tous ces vendeurs à la sauvette pour faire reculer les pouvoirs publics et rendre caduques toutes les décisions contraires à leurs intérêts prises par les autorités. Cet exemple démontre, si besoin était, sinon l'allégeance de ce pouvoir aux barons de «l'import-import», du moins, sa faiblesse et son manque de courage pour prendre les mesures idoines, aptes à imposer à cette faune mafieuse les lois de la République, à mettre de l'ordre dans les circuits du marché extérieur et intérieur, à renflouer, par l'imposition de ces derniers, les caisses de l'Etat, et à incorporer, grâce à cette nouvelle manne financière, toute cette jeunesse désireuse d'activer dans des circuits commerciaux légaux et règlementés, d'exercer leurs métiers en toute liberté, affranchis désormais du diktat et de l'exploitation éhontée de ces nouveaux caïds du commerce. En imposant à ces derniers la justification de la facture et du chèque de paiement à toutes leurs opérations d'achat et de vente, à tous les niveaux des pratiques commerciales, de l'importateur au détaillant, les pouvoirs publics auront agi, au terme de l'application de cette décision, dans le sens de l'assainissement et de l'organisation rationnelle de notre commerce extérieur et de notre marché intérieur, dans la perspective d'une relance réelle des secteurs de production de notre économie. A la vérité des prix qu'il faut généraliser à tous les produits d'importation et ceux provenant de la production nationale, il faut imposer la loi et la réglementation dans toute leur rigueur, à toutes les activités et opérations commerciales. C'est à ces seules conditions que le pouvoir pourra, s'il est mu par le courage politique, crédibiliser ses actes auprès de la population et mobiliser derrière lui tous les patriotes qui ont à cœur les intérêts supérieurs de la nation et du peuple Aujourd'hui, on assiste à une flambée des prix des fruits et légumes et de certains produits de consommation courante. Les augmentations brutales et anarchiques des prix ne procèdent pas d'une volonté politique de nos gouvernants d'appliquer la vérité des prix, selon le mode opératoire énoncé plus haut, elles découlent de la perte de contrôle de l'Etat sur un marché dominé et dirigé par les barons de l'informel. C'est le fait accompli d'une réalité du marché, voulue par ces derniers, dans le but de provoquer dans les milieux populaires un ras-le-bol qui servirait de détonateur à la révolte populaire manquante sur l'agenda de leurs parrains, ceux-là mêmes qui, au nom de la liberté et de la démocratie, ont créé l'internationale de l'intégrisme islamiste, formé et armé ses légions de terroristes pour créer le chaos dans les pays arabes. Contrairement à ce que pouvaient espérer certains responsables, cette hausse des prix illégale, n'a pas infléchi à la baisse le volume global de la consommation des Algériens et, par prolongement, celui de nos importations. Ils ont été démentis par le gaspillage constaté, durant le mois de Ramadhan, du pain et bien d'autres produits alimentaires. Ce résultat a servi comme argument de plus pour ceux qui militent pour une politique réfléchie allant à l'encontre des allégations des partisans du statu quo favorable à leurs pratiques mafieuses, qui profitent de l'anarchie caractérisant notre commerce, extérieur et intérieur, de la déliquescence de nos institutions gangrénées par la corruption pour assouvir leurs ambitions politiques et économiques, au détriment des intérêts supérieurs de la nation et du peuple. Bien des observateurs nationaux et étrangers, qui sont convaincus du bien-fondé de cette politique de la vérité des prix, se demandent pourquoi le pouvoir algérien tarde-t-il à adopter cette ligne de conduite qui permettra à l'Algérie de s'engager résolument dans une politique de développement sain, harmonieux et durable ? A vrai dire, il n'y a pas d'hésitation du pouvoir, il y a duplicité voire une complicité de certains de ses responsables dans la pérennisation du système imposé par les barons de «l'import-import». Les entraves administratives, financières et commerciales rencontrées par les entrepreneurs nationaux et étrangers à investir dans les différents secteurs de l'économie nationale prouvent, idéologiquement et politiquement, la mainmise sur la gouvernance du pays par cette nouvelle «bourgeoisie compradore» dont les desseins mercantilistes s'opposent à ceux des entrepreneurs nationaux soucieux de produire, autant pour satisfaire les besoins matériels et immatériels de la population, que pour conforter l'indépendance économique et politique de l'Algérie. On ne peut pas comprendre l'essence de la crise politique et économique que connaît l'Algérie depuis plus de deux décennies sans se référer au changement de cap que lui ont imposé les partisans du libéralisme sauvage et débridé, sans se reporter aux conditions qui ont présidé à l'instauration du système politique et du mode de gouvernance qui leur a permis de monopoliser le pouvoir pour satisfaire les desseins de leurs mentors. Cette situation n'est pas propre à l'Algérie, tous les pays qui ont vécu le règne de l'étatisme et du parti unique la vivent aujourd'hui. Dans
ces pays, les pouvoirs, dominés par ces mercantilistes, se heurtent aux tenants nationaux de l'entrepreneuriat productif, dont la philosophie politique et la pensée économique sont diamétralement opposés à celles des barons de «l'import-import» qui ont la mainmise sur la gouvernance de l'Etat. La bataille de la succession au président Bouteflika, à laquelle nous assistons depuis l'aggravation de sa maladie, reflète l'antagonisme existant entre les représentants des deux forces politiques qui se disputent le pouvoir. Partant, l'Algérie ne transcendera cette crise plurielle que si le courant patriotique, représenté par l'entrepreneuriat national, se hissera, à l'issue des prochaines élections présidentielle et législatives, à la tête de la gouvernance du pays. Seul ce courant est capable, selon ce que nous retenons de son discours, d'instaurer dans le pays un véritable régime démocratique et authentique modèle de développement économique et social en conformité avec les idéaux de la révolution de Novembre et en rapport avec les aspirations à la liberté, à la justice et au bien-être, de la population algérienne.


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