Le projet de loi sur l'audiovisuel, qui attend d'être débattu par le Parlement, après avoir été finalisé par le gouvernement, est loin d'être exempt de critiques. Les experts dans le domaine des médias notent avec exaspération la frilosité du gouvernement à consentir à une ouverture véritable du secteur, jusqu'ici apanage exclusif de l'Etat, à l'investissement privé. Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) Invité en tant que communicant à la journée d'étude sur le projet de la loi sur l'audiovisuel, organisée, hier, à l'Assemblée populaire nationale (APN) par le groupe parlementaire du Rassemblement national démocratique (RND), Slimane Bekhlili a radicalement recommandé le renvoi du texte au ministère de la Communication pour une nouvelle reformulation. Et ce n'est pas par coquetterie intellectuelle qu'il a suggéré la déprogrammation dudit projet de loi de l'agenda de l'APN aux fins d'une remontée à la source. Slimane Bekhlili a relevé en effet une insurmontable contradiction entre les dispositions de la loi mère, la loi organique relative à l'information, et le projet de loi spécifique à l'audiovisuel. En effet, les articles 62 et 63 de la loi organique relative à l'information disposent clairement que l'activité audiovisuelle s'exerce en toute liberté, alors que le projet de loi sur l'audiovisuel, censé s'y conformer, rétrécit le champ d'intervention du privé aux seuls chaînes thématiques. Slimane Bekhlili a également mis le doigt sur la problématique de l'autorité de régulation telle que prévue par le projet de loi. D'abord en ce que sa composante soit totalement désignée par les pouvoirs publics mais aussi par rapport à ses prérogatives qui, dans certaines situations, sont transférées au ministère de la Communication. L'article 106 du projet de loi sur l'audiovisuel, inséré comme disposition transitoire, dispose qu'en attendant la mise en place de l'autorité de régulation, les missions de régulation sont dévolues au ministère de la Communication. Slimane Bekhlili a estimé en outre que le référent, dans le même projet de loi, aux plages horaires consacrées à l'information qui pourraient être concédées aux chaînes thématiques est une aberration. Car, pour lui, il y a matière à préciser davantage ce qui est entendu par le vocable thématique, tant est que l'information pourrait être comprise comme une thématique. C'est pour cela d'ailleurs qu'Abdelaâli Rezzagui, enseignant à l'Ecole de journalisme d'Alger, a préféré, lui, le générique de chaînes spécialisées à celui de chaînes thématiques. «Ce projet de loi sur l'audiovisuel repose sur de faux concepts. Le vocable thématique ne sied pas à l'audiovisuel où l'on parle plus de chaînes spécialisées», a-t-il asséné. Il a relevé par ailleurs, qu'il est tout de même inquiétant qu'à aucun moment, le projet de loi en question ne se réfère à la justice, comme est censée l'être toute loi. D'autres intervenants se sont inquiétés de la survie des chaînes thématiques. Selon eux, les annonceurs ne vont pas se ruer vers de telles chaînes, tant leurs audiences seront limitées. «Sans publicité, ces chaînes ne pourront pas se développer et finiront par disparaître», a soutenu Slimane Bekhlili. L'autre problème auquel sera inéluctablement confronté le futur univers audiovisuel a trait aux disponibilités techniques de diffusion. Avec les disponibilités actuelles, la capacité se réduit à seulement 13 chaînes. Mauvaise note, enfin, pour les professionnels des médias et à leurs prétendues représentations qui ont été les grands absents de ce débat.