De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari Les opinions publiques ont, à l'évidence, remporté la bataille de Ghaza, elles qui ont obligé leurs gouvernements à se démarquer d'Israël, ont même dénoncé en termes virulents les crimes de l'exécutif Netanyahu. Les principales capitales européennes et les institutions de l'UE (Parlement, Commission, Conseil) ont certes pendant 20 jours «rien vu», «rien entendu», mais depuis une semaine, ça bouge énormément. A Londres, à Paris, à Bruxelles, à Copenhague, Rotterdam, Amsterdam, Berlin, Cologne, Lille, Lyon, Marseille, Charleroi, Manchester, Luxembourg-City ou ailleurs à Liverpool, Bonn, Namur, les manifestations en faveur des populations ghazaouies ont rétabli le rapport de force et l'ont fait incliner en faveur du droit, de la justice et du bon sens. Le président français, ami de longue date de Netanyahu — comment peut-on être l'ami d'un si atroce individu, d'un criminel de guerre de cet acabit ? — a, le premier, été contraint à un exercice périlleux et fantasque. Lors de ces premières déclarations d'après les premières heures de l'expédition punitive des armées israéliennes, Hollande n'allait pas plus loin que la défense de la «sécurité d'Israël». Même les plus proches du sionisme parmi les membres de son gouvernement à l'exemple de Valls et de Cazeneuve n'ont pas aussi éhontément pris position en faveur du massacre des enfants, du bombardement des écoles et des tirs d'obus contre de modestes demeures et mesures palestiniennes. Sur les 2 000 morts jusque-là enregistrés par les services de l'ONU sur place, plus du tiers sont des civils. Le bilan est lourd, macabre, difficile à défendre. M. François Hollande a donc dû se résigner aux acclamations et aux cris d'horreur de ses citoyens. Une large majorité s'est dessinée dans l'espace politique français en faveur de Ghaza la martyre. D'où la volte-face du gouvernement français qui revient peu à peu aux fondamentaux de la politique dite arabe de la France, construite autour de la reconnaissance de l'Etat palestinien sur les frontières de 1967 et la sacro-sainte sécurité d'Israël. Le problème de Jérusalem étant laissé aux négociateurs tant Palestiniens qu'Israéliens; En Europe, même si le positionnement des Etats du Vieux Continent n'était pas, initialement, aussi engagé au côté de Netanyahu, les choses étaient compliquées. La Commission et le Parlement en instance de vacances et en renouvellement post-électoraux, les cabinets chargés des affaires courantes se sont déclarés absents comme s'ils n'avaient pas d'existence juridique et légale. Ce qui arrangeait énormément les affaires de l'exécutif Netanyahu qui pouvait compter sur les complicités active et passive de l'Union européenne et de ces Etats membres. Il est vrai, cependant, que des voix ont chahuté cette atmosphère qui couvrait la mort à Ghaza. Le Belge Elio Di Ruppo (chef du gouvernement), en France De Villepin, ex-Premier ministre, Paul Laurent, Parti communiste, Les Verts, le Front et le Parti de gauche, des sénateurs, des députés, une foultitude de maires et de conseillers généraux, des personnalités du monde des arts, de la culture, des ONG et parmi elles des justes juifs et parfois pro-israéliens, des figures de proue du monde universitaire, des gens simples répondent aux appels de manifester et de se rassembler ont dit non à Netanyahu, non aux crimes commis à Ghaza. Pourtant, il serait injuste de passer sous silence les prises de positions justes et fermes en faveur de la Palestine de Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères. Il se dégage la nette impression en France que deux pôles constituent, actuellement, la politique étrangère hexagonale. L'un emmené par Manuel Valls, ouvertement pro-sioniste et aligné sur les thèses extrêmes de Netanyahu et l'autre, drivé par Fabius plus conforme à la politique gaullienne et même mitterandienne au Proche-Orient. Ailleurs, en pays de l'UE, à peu-près la même évolution. Des lobbies sionistes et pro-israéliens prennent à la gorge les exécutifs et en espace public largement pro-palestinien... Actuellement, la guerre médiatique autour de la trêve a commencé et fait déjà rage. Et si Israël n'avait rien obtenu après un mois de massacres, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Ghaza ?...