Les islamistes d'Ennahda qui n'ont pas présenté de candidat aux présidentielles tunisiennes, pour avoir tout misé sur les législatives d'octobre 2014, ont orienté discrètement leur base militante vers un vote en faveur de Moncef Marzouki. Sauf que le candidat du congrès pour la République a finalement été classé loin derrière Béji Caïd Essebsi qui a remporté le premier tour avec un score de 44,2%. Mehdi Mehenni - Alger (Le Soir) Les Tunisiens qui découvrent les vertus d'un scrutin libre et transparent, après le règne de deux présidents que seule la force d'abord militaire, puis populaire a pu éjecter, ont fait preuve d'une conscience politique ordinairement méconnaissable à un Maghreb traumatisé par la pensée totalitaire. Un débat qui a réuni, dimanche soir, des représentants de partis et analystes politiques sur un plateau de la chaîne Nessma TV, conforte justement cette lecture. Une analyste politique a, en effet, précisé que Moncef Marzouki, qui est parti «mendier» des voix chez les islamistes d'Ennahda, a perdu, en partie, estime de la population et ses propres partisans, d'où son score de 31,2% au premier tour. En même temps, le parti de Ghennouchi qui a «discrètement» orienté sa base militante, laquelle malgré cela est restée confuse sur le choix à prendre, a fini par offrir un cadeau empoisonné au chef du Congrès pour la République. C'est que ce dernier, pour plaire aux «voix islamistes», est tombé dans le piège d'un discours similaire à celui des extrémistes. En qualifiant Béji Caïd Essebsi, de «Taghout», c'est-à-dire mécréant, le candidat de l'extrême gauche tunisienne a étonné, voire déçu même parmi les siens. Il se trouve que même pour le second tour, le cadeau empoisonné d'Ennahda n'aura pas encore fini d'intoxiquer la popularité en chute libre de Moncef Marzouki. Le représentant de Ghennouchi dans le débat du plateau télévisé de Nessma TV a laissé entendre que son parti qui a tout misé sur les législatives d'octobre 2014, en obtenant 67 sièges sur 217, attendra de voir la structuration du nouveau parlement et la répartition des tâches pour se prononcer sur la question de savoir à qui ils vont offrir les voix de leur base militante pour le reste du scrutin présidentiel. Même si leur soutien à Marzouki a été avoué à demi, le lâchage est prononcé sur le même ton. Une agitation islamiste qui, en plus de continuer à nuire à Moncef Marzouki, ne semble pas en position de pouvoir déséquilibrer la montée régulière et paisible de la popularité du candidat Béji Caïd Essebsi. M. M.