«Le gouvernement dit la vérité. Il applique le programme du Président», déclarait, jeudi dernier, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, répondant tacitement au directeur de cabinet de la présidence de la République. Même s'il concède la poursuite de la baisse des prix du pétrole, Abdelmalek Sellal réfute, cependant, toute politique d'austérité comme il mise sur la rationalisation de la dépense publique et l'encouragement de l'investissement productif. Cherif Bennaceur - Alger (Le Soir) - «Nous disons la vérité aux Algériens. Le gouvernement dit toujours la vérité», déclarait le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, lors de l'émission Hiwar Essaâ, diffusée jeudi soir sur la troisième chaîne publique. Une déclaration que l'on peut interpréter comme une réponse tacite au directeur de cabinet à la présidence de la République, Ahmed Ouyahia, qui a appelé récemment à «dire la vérité» et éviter tout populisme. Cela même si le secrétaire général par intérim du RND a précisé, par la suite, que ses propos ne ciblaient personne. Toutefois, le Premier ministre assurera aux téléspectateurs que «celui qui veut faire de la politique, il y a des partis politiques (pour cela), des échéances électorales auxquelles il peut concourir». Voire, Abdelmalek Sellal, qui assurera que le gouvernement «applique le programme du président de la République», affirmera que «l'Etat algérien dispose d'institutions légitimes, de l'Etat de droit». En outre, l'illustre invité de l'ENTV considère que l'Algérie est «ciblée» même si le gouvernement a toute «maîtrise» dans le domaine sécuritaire et autre. Invitant à ce que «le front interne soit fort», Abdelmalek Sellal appellera ainsi à éviter tout «pessimisme», à encourager «la confiance» et éviter «la défiance». De la nécessité donc d'être optimiste, le Premier ministre en semblait convaincu lors de sa prestation télévisuelle. Certes, Abdelmalek Sellal reconnaît la réduction sensible des revenus du pays, de près de 50%, durant le premier semestre 2015, en raison de la chute des cours du pétrole. Des prix qui resteront faibles durant les prochains mois et même en 2016, fluctuant autour des 60 dollars le baril, n'écartera-t-il pas. Pourtant, le Premier ministre considère que les décisions du président de la République concernant notamment le remboursement anticipé de la dette, le niveau élevé des réserves de change qui couvrent «26 mois d'importations avec le rythme actuel sans aucun problème» ainsi que la démarche prospective adoptée par l'exécutif, outre l'important potentiel en ressources humaines, ont permis et permettent de contrecarrer «sans problème» le choc externe. Arguant d'une dynamique économique en branle, Sellal relèvera que le taux de croissance économique a dépassé les 7% hors hydrocarbures durant le premier semestre 2015 et que les importations de médicaments mais aussi de véhicules ont fortement diminué durant cette période, estimant ainsi que la politique gouvernementale menée jusque-là «commence à porter ses fruits». Pour autant, et même s'il reste persuadé que l'Algérie restera «une puissance énergétique» en dépit de la propension d'aucuns à vouloir la «déstabiliser», Abdelmalek Sellal insistera sur la nécessité de développer une économie forte, libérée de sa dépendance aux hydrocarbures et basée sur l'investissement productif créateur de richesses et sur l'«efficience économique». Mais aussi sur la nécessité de la rationalisation des dépenses publiques, la maîtrise des dépenses de fonctionnement, l'ajournement de certains projets non urgents, la lutte contre la fraude et la promotion de «la citoyenneté économique», chaque Algérien devant être concerné selon lui par la question économique. Abdelmalek Sellal relèvera ainsi la nécessité de lutter contre le gaspillage, déplorant au passage un prix du diesel (13 dinars le litre) assez «irréaliste». Ce faisant, le Premier ministre réfutera toute remise en cause totale des acquis sociaux, «irrévocables» selon lui, dans la mesure où «le citoyen algérien est habitué à un certain niveau de vie auquel il faut s'adapter». Comme il récusera toute politique d'austérité, celle-ci générant selon lui «la pauvreté et nous n'en sommes pas à ce stade, heureusement». L'hôte de l'ENTV indiquera ainsi que l'abrogation de l'article 87-bis du code du travail sera effective dès le mois d'août 2015 et qu'à partir de septembre, plus de 2,1 millions de fonctionnaires et travailleurs du secteur économique bénéficieront donc d'une revalorisation salariale, pour un coût de 54 milliards de dinars. Dans ce contexte, Abdelmalek Sellal reviendra sur les décisions «historiques», «courageuses» prises la veille en Conseil des ministres, celles notamment liées à la loi de finances complémentaire pour 2015, la réglementation des marchés publics et du code des procédures pénales (dépénalisation de l'acte de gestion). Outre le réaménagement de la fiscalité (réduction de la taxe sur l'activité professionnelle (TAP) de 2 à 1% pour les producteurs et à 1,5% pour le BTPH et le tourisme contre 2% pour les autres activités dont l'importation, réduction de l'impôt sur le bénéfice des sociétés IBS à 19% pour les producteurs et 23% pour les autres activités contre 26% pour l'importation et la revente), le responsable de l'exécutif annoncera la suppression des Calpiref (Commission d'aide à la localisation, la promotion de l'investissement et la régulation du foncier) dans le souci de débureaucratiser l'environnement des affaires ainsi que l'imposition d'une amende de 3% par an pour tout investissement non réalisé. De même que le Premier ministre assurera que le dispositif de soutien à l'emploi des jeunes (Ansej) sera maintenu à charge, cependant, que les investissements projetés soient «rentables». D'autre part, Abdelmalek Sellal misera sur l'amélioration des disponibilités de financement de l'investissement, annonçant une réunion prochaine avec les banques. Il escomptera ainsi l'injection d'ici la fin 2016 dans le circuit bancaire d'au moins 700 à 1 000 milliards de dinars de fonds «informels» sans rapport avec le blanchiment ou terrorisme, sur la base d'une imposition forfaitaire de 7%. Par ailleurs, le Premier ministre annoncera que la prochaine réunion tripartite (gouvernement – Centrale syndicale — patronat) se tiendra début octobre 2015 en présence du directeur du Bureau international du travail (BIT), de manière inédite à Biskra, au regard de la dynamique économique, agricole et industrielle caractéristique de cette wilaya.