Forte d'une relative hausse de la production, la Sonatrach a lancé, ces derniers jours, une véritable offensive sur les marchés internationaux du pétrole et du gaz. Le pétrole algérien est de nouveau exporté aux Etats-Unis, alors que les livraisons de gaz par canalisation, à destination de l'Italie et de l'Espagne, enregistrent des pics historiques, selon des analystes européens. Retour après quatre ans d'absence Après quatre ans d'absence, le pétrole algérien est de retour sur le marché américain, qui a été largement dominé par l'abondance de la production des hydrocarbures non conventionnels extraits de la roche de schiste. La baisse des prix du baril sur le marché mondial a provoqué un désastre dans l'industrie pétrolière aux Etats-Unis et bon nombre de champs producteurs sont à l'arrêt depuis deux mois. Les petites compagnies ont été contraintes de mettre la clé sous le paillasson. Les deux géants des services pétroliers ont annoncé hier la suppression de dizaines de milliers d'emplois. Toute cette situation a profité à la Sonatrach qui vise désormais une part de marché aux Etats-Unis. Elle vient de livrer une cargaison de pétrole à la compagnie Philips 66, troisième raffineur du pays. Cette compagnie, basée à la Côte-Est, a acheté un pack de 433 mille barils de pétrole brut pour sa raffinerie de Bayway, dans le New Jersey. Philips 66 devrait passer prochainement d'autres commandes de pétrole brut. Il faut noter que le pétrole brut algérien convient aux normes de raffinage adoptées aux Etats-Unis et devient un objectif privilégié pour les acheteurs des raffineurs américains. À la conquête de l'Europe Selon une agence d'analyse des flux de gaz sur l'Europe, les exportations du gaz algérien vers l'Espagne et l'Italie enregistrent des pics jamais égalés au cours des trois dernières années. Sur l'Italie, la Sonatrach a exporté, par gazoduc, pas moins de 44.6 millions de mètres cubes par jour, durant le mois en cours. En revanche, les importations italiennes en provenance de la Russie se sont stabilisées à hauteur de 46 millions de mètres cubes seulement, alors qu'auparavant, elles se situaient à environ 60 millions de mètres cubes. C'est donc la première fois que les quantités de gaz algérien sont supérieures à celles des Russes sur le marché italien. L'Italie est le troisième plus grand marché gazier de l'Europe avec une consommation d'environ 66 milliards de mètres cubes par an. Le pays est tributaire des importations à hauteur de 90% de sa demande. Idem pour l'Espagne qui, précisent les analystes, s'est tournée vers le gaz algérien avec une hausse sensible des importations. On évoque un volume quotidien de l'ordre de 25 millions de mètres cubes au cours du mois de mars et une quantité supérieure depuis le début avril. La force de la Sonatrach sur ces deux marchés repose sur les gazoducs qui relient l'Algérie à l'Italie et l'Espagne. En effet, l'Algérie a construit le gazoduc Enrico Matei qui la relie à l'Italie via la Tunisie et Pedro Duran Farrel, qui alimente l'Espagne via le territoire marocain. Un troisième gazoduc sous-marin, Medgaz, relie Hassi R'mel à l'Espagne en passant par Béni-Saf. Le défi tunisien La Sonatrach devrait venir, dans les prochains jours, à la rescousse de la Tunisie qui a vu sa production gazière perturbée par les mouvements sociaux enregistrés à Kerkennah. Le gaz naturel, exploité par Petrofac à travers les puits Chergui 3, 5, 6 et 8 dans les îles Kerkennah, permet de couvrir 15% des besoins de la Tunisie. Mais l'agitation sociale empêche depuis plus d'un mois l'exploitation de ce gisement, mettant ainsi les autorités dans l'obligation d'augmenter les volumes du gaz importé. La Tunisie produit 55% de sa consommation en gaz naturel à partir notamment des gisements de Petrofac à Kerkennah et ceux de British Gas situés à Sfax. La Sonatrach, quant à elle, assure le reste de la consommation, à hauteur de 45%. Au cas où la crise se poursuit à Kerkennah, la Sonatrach devra se préparer à combler le déficit par de nouveaux apports de gaz. Conseil de guerre à Hassi Messaoud Depuis hier, les bases de la Sonatrach et ses filiales à Hassi Messaoud sont en ébullition. Pour cause, le Top Management de la Sonatrach a prévu une visite de travail pour aujourd'hui et demain. Le P-dg de la Sonatrach et les principaux responsables de la compagnie devront définir les plans directeurs de la production pétrolière dans cette région et surtout lancer certaines opérations de revamping des installations de production et de traitement des hydrocarbures. Les responsables du groupe public devront assister au lancement de la production de certains champs qui devront augmenter la production de quelques dizaines de milliers de barils par jour. Ces mesures devront permettre à la Sonatrach de retrouver ses parts de marché en Europe et surtout prospecter de nouvelles opportunités dans les pays asiatiques.