Tout auréolé du Premier Prix Emir Abdelkader, remis par son association à Mostaganem le 21 septembre à des personnalités de dimension internationale (Lakhdar Brahimi, Fédérico Mayor et Raymond Chrétien), Cheikh Khaled Bentounès, en pèlerin du vivre ensemble, s'est rendu à New York, à la fin du mois de septembre. But de sa mission : avoir le soutien de l'ONU à son initiative, à savoir la promotion de la Journée mondiale du vivre ensemble (JMVE). Pour cela, il s'est adressé au Haut représentant des Nations- Unies pour l'Alliance des civilisations (ONUAC), M. Nassir Abdelaziz Al-Nasser, de nationalité qatarie. Rejet des ordres soufis Ce dernier a fait recevoir Cheikh Bentounès par son chef de cabinet et porte-parole Madame Nihal Saâd. La surprise de Cheikh Bentounès fut grande de s'entendre dire par Mme Nihal Saâd que l'Onuac «n'accorde aucun soutien aux mouvements soufis» (sic). Cette réponse, qui témoigne tout à la fois de l'ignorance et de l'amalgame que fait visiblement madame Nihal Saâd entre un mouvement spirituel et une démarche civilisationnelle plus globale, à savoir la promotion du «vivre ensemble», a conduit Cheikh Bentounès à lui écrire une lettre pour l'inviter à réviser sa position. «J'espère que vous aurez le temps d'étudier le dossier des actions entreprises par AISA ONG internationale, pour vous faire une idée exacte du message que nous essayons de promouvoir, pour la paix, le dialogue des cultures et le vivre ensemble» commence-t-il par écrire. Ensuite, revenant sur l'échange de propos au moment de l'audience, Cheikh Bentounès explique à son interlocutrice que «nos engagements émis lors du premier sommet humanitaire à Istanbul au mois de mai dernier, vont dans le sens des actions de votre organisme». C'est pourquoi il a de nouveau exprimé dans sa lettre l'espoir de voir l'instance onusienne apporter son soutien «pour la promotion de la Journée mondiale du vivre ensemble (JMVE)», marqué cette année par la remise du Premier Prix Emir Abdelkader. Cheikh Bentounès fera observer que la cérémonie de remise de ce prix était présidée par Madame Fadila Laanan, secrétaire d'Etat à la région de Bruxelles et ministre-président du Gouvernement, et de son Excellence Monsieur Idriss Jazairi, ambassadeur, rapporteur spécial du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, directeur exécutif du centre de Genève pour la promotion des droits de l'Homme et le dialogue global. Pas moins de 3 000 personnes, y compris 9 ambassadeurs et consuls généraux de différents pays ont assisté à la cérémonie. S'agissant des actions en faveur de la jeunesse, l'ONG AISA a créé «depuis 25 ans la branche des Scouts musulmans de France (SMF) en France, Allemagne, Belgique, Hollande, Espagne, reconnue par l'OMMS organisme international qui regroupe le scoutisme dans le monde. Et le Cheikh d'indiquer encore dans sa lettre que «nous sommes également partenaires de l'Union du scoutisme musulman (IUSM), dont le secrétariat général est à Djeddah, et également membre fondateur du Conseil français du culte musulman (CFCM) depuis 2003.» Il soulignera en outre les «relations excellentes» qui existent entre son ONG et de grandes institutions religieuses de par le monde comme El-Azhar en Egypte, la Zitouna en Tunisie, la Karaouiine au Maroc, et le Haut conseil islamique en Algérie ainsi que la Rabita des Ouléma du Sahel. «D'autre part, nous organisons des expositions itinérantes à travers le monde notamment celle de l'Emir Abdelkader qui a fait plusieurs pays dans le monde et l'exposition ‘‘Voilement et Dévoilement'' (cette exposition sera à l'université de New York à partir de la première semaine d'octobre, elle concerne l'historique de la femme et du port du voile, nous avons aussi d'autres expositions». Cheikh Bentounès évoquera également la création en 2007 de la Fondation Djanatu el-Arif (Jardin des connaissants) à Mostaganem «qui milite et éduque à la sensibilisation au développement durable et sur le réchauffement climatique auprès des écoles avec la formation d'éducateurs, et qui a participé à la COP 21 en France en 2015.» «Notre affiliation à l'école de la pensée soufie n'est pas un handicap » En brossant un aussi large tableau, Cheikh Bentounès rappelle à la destinatrice de sa lettre l'obligation pour son organisme d'appuyer la démarche du vivre-ensemble, puisqu'il fait partie de l'ONU. S'agissant de l'obédience de l'ONG, qui semble nourrir l'appréhension de Mme Nihal Saâd, Cheikh Bentounès explique que «notre affiliation à l'école de la pensée soufie fondée par le Cheikh Ahmed Mustapha el-Alawi, au début du 20ème siècle, auquel l'Unesco a rendu hommage en le reconnaissant comme un grand penseur du 20ème siècle, est loin d'être un handicap à un moment où le monde musulman vit des moments graves et où l'image de l'Islam ne cesse de se dégrader ». Cette explication étant apportée, Cheikh Bentounès invite une nouvelle fois dans sa lettre la porte-parole et chef de cabinet de M. Massir Abdelaziz Al Nasser à revoir son opinion et «de voir que les actions que nous menons vont dans le sens de la promotion d'un islam d'ouverture, de liberté et qu'il est de votre responsabilité et de votre devoir en tant qu'organisme international de coopérer et d'aider les idéaux qui contribuent à donner la place à cet islam de tolérance et de fraternité pour réconcilier la famille humaine dans sa diversité ». Pour Cheikh Bentounès, président de AISA ONG Internationale, qui a un statut spécial auprès du Conseil économique et social des Nations-Unies (Ecosoc), il était à ses yeux de la plus haute importance de faire ces clarifications. (Sur la photo, Cheikh Bentounès, reçu par le représentant permanent d'Algérie auprès des Nations-Unies).