Le cinéaste algérien Abderrahmane Bouguermouh qui a réalisé le premier long métrage en langue amazighe, Tawrirt yetwattun (La colline oubliée), en 1996, a partagé les mêmes visions sur le cinéma avec le réalisateur grec Theo Angelopoulos a indiqué l'anthropologue Yacine Si Ahmed. Se basant sur les résultats de son étude comparative entre leurs œuvres, l'anthropologue a déclaré à l'occasion d'une conférence animée dans le cadre de la 15e édition du Festival culturel national annuel du film amazigh à Tizi-Ouzou, que les deux hommes partagent plusieurs similitudes dans leurs parcours. En plus du cinéma qui les a unis, Abderrahmane Bouguermouh et Theo Angelopoulos qui se sont rencontrés à l'institut des hautes études cinématographiques (IDHEC) de Paris en France avaient des préférences partagées pour des thèmes liés à l'histoire, à la culture, aux mythes et à la mémoire collective, a-t-il précisé. «L'idée d'effectuer une étude sur le parcours des deux cinéastes m'est venue du défunt Bouguermouh lors d'une rencontre que nous avons eue en 2012 à Tizi-Ouzou. En lui parlant de mon projet de confronter son œuvre à celle d'un cinéaste étranger, il m'a recommandé Angelopoulos. Ce n'est que maintenant que j'ai eu l'occasion de présenter ce travail dans le cadre du festival», a-t-il souligné. Malgré les cultures différentes, Bouguermouh comme le Grec Angelopoulos, issus des deux rives de la Méditerranée, considéraient que «le cinéma est le seul art capable de retenir la mémoire et que même le film de fiction peut constituer un document historique et un agent de l'histoire et par conséquent une mémoire historique d'un peuple à une période déterminée», a-t-il indiqué. Ces deux cinéastes, a-t-il ajouté, ont introduit une perspective qui considère le film comme porteur de valeurs et de représentations de leurs temps. «Une perspective qui a donné lieu à d'innombrables débats dont celui sur le rôle joué par le cinéma contemporain dans ce qu'on a appelé historiquement cinéma national», a-t-il encore affirmé. Le cinéma est également une contre-analyse de la société pour ces deux Méditerranéens qui ont fait du film un moyen d'expression capable de dévoiler des silences et des ambitions sociales non avoués en permettant de voir au-delà de la réalité représentée, a-t-il dit en marge de son étude. Bouguermouh comme Theodoros Angelopoulos ont défendu à travers leur engagement dans le 7e art leur culture, leur histoire, leurs visions sociales et leurs idées, a-t-il conclu, affirmant que ces deux figures partageaient des regards croisés sur des questions multiples et surtout sur l'utilité du cinéma et son impact sur la société.