En mars dernier, lors d�une conf�rence de presse, le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, en r�ponse � des questions de plusieurs journalistes, avait annonc� que les textes d�application de la loi de pr�vention et de lutte contre la corruption, vot�e en janvier 2006, para�tront en septembre 2006, soit 9 mois plus tard. Ces textes n�ont toujours pas vu le jour. Visiblement, le gouvernement Belkhadem ne semble pas �tre concern� par les engagements de son pr�d�cesseur : il fait plut�t marche arri�re, � l�image de l�abrogation, il y a quelques jours, de l�obligation de paiement par ch�que. Face � la multiplication des affaires de corruption, de nombreux pays ont adopt� des lois sp�cifiques destin�es � la lutte contre le ph�nom�ne, ainsi que l�Alg�rie vient de le faire, mais sans strat�gie nationale et sans programme d�action. L��laboration et l�application de ces lois posent des probl�mes. La question de l�effectivit� des lois se pose avec acuit�. Il ne suffit pas en effet d��laborer une loi et de la faire voter, encore faut-il en assurer une application �quitable et effective conform�ment � la philosophie qui sous-tend la notion d�Etat de droit. Le dispositif l�gal contre la corruption doit �tre compris comme l�ensemble des textes ayant pour vocation sp�cifique de pr�venir et de r�primer la corruption, mais aussi la r�glementation destin�e � assurer la transparence, voire les textes qui consacrent la d�mocratie et garantissent les droits fondamentaux des citoyens. Dans nombre de pays, les affaires de grande corruption impliquant des autorit�s du pouvoir ex�cutif, des �lus, des hauts fonctionnaires et des patrons de grandes entreprises se sont multipli�es ces derni�res ann�es. Cette situation qui mine la d�mocratie et menace la stabilit� des institutions a amen� les gouvernements � faire voter des lois sp�cifiques contre la corruption. C�est souvent � la suite d�alternances politiques que des lois sp�ciales de lutte contre la corruption ont �t� �dict�es et parfois abusivement utilis�es � des fins de r�glements de comptes politiques. Paradoxalement, l�adoption de lois anticorruption n�emp�che pas les initiateurs desdites lois de faire voter des lois d�amnistie taill�es sur mesure pour s�assurer une retraite politique paisible. S�il suffisait de lois r�pressives pour venir � bout de la corruption, celle-ci n�existerait plus. Il est imp�ratif d�assurer l�effectivit� des lois et leur application par des institutions judiciaires fiables. La volont� politique du pouvoir ex�cutif et la culture d�int�grit� de la magistrature sont indispensables � cet effet. Sans une v�ritable volont� politique, les lois anti-corruption restent lettre morte. Il est par ailleurs illusoire d�esp�rer d�une justice elle-m�me gangren�e par la corruption qu�elle puisse s�vir avec efficacit� contre ce ph�nom�ne. Il existe un large consensus sur la priorit� � donner � la pr�vention. En effet, une politique exclusivement r�pressive est insuffisante. En outre, le recours syst�matique � la r�pression traduirait en partie l��chec de la pr�vention. Les poursuites judiciaires sont n�anmoins incontournables et participent �galement � la pr�vention, l�effet dissuasif. Les r�formes l�gislatives doivent donc tout autant s�attacher � la pr�vention qu�� la r�pression des actes de corruption. Le dispositif l�gal pour combattre la corruption ne peut pas �tre consid�r� uniquement sous l�angle p�nal mais doit inclure toutes les th�matiques suivantes : l�acc�s � l�information ; les conflits d�int�r�ts ; les march�s publics ; la libert� d�expression ; la libert� de la presse ; la protection de ceux qui d�noncent la corruption et de ceux qui portent plainte ; les conditions permettant � la soci�t� civile de se mobiliser ; les �lections d�mocratiques ; la lutte contre l�enrichissement illicite ; le contr�le de la l�galit� des d�cisions et des actes de l�administration par le juge ; la s�paration des pouvoirs, notamment l�ind�pendance des juges, etc. Pour rappel, cette loi de pr�vention et de lutte contre la corruption avait �t� d�pos�e � l�Assembl�e nationale en avril 2005, soumise une premi�re fois au vote des d�put�s en juin 2005, puis ce vote fut report� � plusieurs reprises, et ce n�est que six mois plus tard, le 3 janvier 2006, que les d�put�s vot�rent cette loi en l�amputant de l�article 7 qui sanctionnait tout retard dans la d�claration de patrimoine, tant pour les �lus que les fonctionnaires astreints � cette d�claration. Ce vote qui scandalis�t l�opinion publique confirmait en fait l�absence de volont� politique � lutter contre la corruption, tant chez les parlementaires qu�au niveau de l�Ex�cutif. Car m�me le reste de la loi est tr�s en retrait par rapport � la Convention des Nations unies, et elle n�apportera rien de nouveau dans le dispositif l�gislatif et r�glementaire visant � moraliser la vie publique. Djilali Hadjadj