Alors que le Liban est menac� d�embrasement, le monde arabe administre encore une fois la preuve de son impuissance. Lors du dernier sommet de la Ligue arabe � Riyad, pour n�avoir pas pris le soin d�examiner la crise libanaise, les chefs d�Etat arabes ont laiss� ce pays face � ses probl�mes. Les deux d�l�gations libanaises, l�une conduite par le pr�sident Emile Lahoud, l�autre par le Premier ministre Fouad Siniora, aux vues diam�tralement oppos�es, sont reparties du sommet comme elles �taient arriv�es : chacune campant sur ses positions. Emile Lahoud ne voulait pas entendre parler de l�institution du tribunal international charg� de juger l�assassinat de l�ex-Premier ministre, Rafik Hariri, tribunal que Fouad Siniora veut mettre en place. Deux mois apr�s le sommet de Riyad, qualifi� d�historique, en raison de l�offre de paix arabe faite � Isra�l en contrepartie de la restitution des territoires occup�s depuis juin 1967, la crise libanaise rattrape encore une fois les pays arabes. Intervenant en pleine crise palestino-palestinienne sur fond d�intervention muscl�e d�Isra�l � Ghaza, les affrontements entre l�arm�e libanaise et Fath al-Islam, groupe islamiste radical, compliquent singuli�rement la donne au Proche-Orient. Entre faire cesser les affrontements interpalestiniens, �viter que la situation se d�t�riore dangereusement au Liban et contraindre Isra�l � accepter l�offre de paix adopt�e � Riyad, les pays arabes se retrouvent devant un vrai casse-t�te. Certains estimeront qu�ils en ont l�habitude et qu�ils en ont vu d�autres. Reste que la crise actuelle, se greffant sur le conflit irakien, et la tension entre l�Iran et les Etats-Unis, est autrement plus dangereuse pour la stabilit� r�gionale que ne l�ont �t� les crises pass�es. Pr�occup�s par la mont�e en puissance de l�Iran sur la sc�ne r�gionale, pays qu�ils suspectent d�alimenter le conflit irakien et accusent d�aider le Hezbollah libanais, les Saoudiens, soutenus par l�Egypte et, partant, par Washington, essaient tant bien que mal de faire face. Ils essaient de contenir l�influence grandissante de l�Iran dans la r�gion en soutenant le gouvernement de Fouad Siniora. Entre cette lutte d�influence entre Saoudiens et Iraniens pour s�assurer le leadership r�gional, la Syrie, contrainte de quitter le Liban, cherche � pr�server ses int�r�ts et son statut de pays incontournable pour toute sortie de crise proche-orientale. La minorit� allaouite au pouvoir � Damas sait que la majorit� sunnite b�n�ficie du soutien plus ou moins tacite de l�Arabie saoudite. L�id�ologie panarabiste dont se pr�vaut la Syrie n�a jamais �t� en odeur de saintet� en Arabie saoudite. Sans pour autant souhaiter ouvertement la chute du r�gime syrien, les Saoudiens ne font rien non plus pour qu�il se maintienne. Isol� sur le plan r�gional, il fait tout pour y revenir et d�fend comme il le peut ses int�r�ts : Damas a aid� le Hezbollah quand �a l�arrangeait et continue sans doute � le soutenir. Il a ferm� les yeux sur les djihadistes qui transitaient par le territoire syrien pour se rendre en Irak. Et s�il n�y a aucune preuve formelle que la Syrie soit derri�re Fath al-Islam, les affrontements � Tripoli, fief des Hariri ennemis du r�gime syrien, tombent � point nomm�. Car ce groupe salafiste palestinien ne peut durer que si la Syrie le veut. Les Palestiniens qui le soutiennent sont minoritaires dans un pays qui n�est pas le leur et il suffirait que Damas coupe les vivres � ce groupe radical. Mais il ne le fera pas sans contrepartie. Et celle-ci a pour nom le tribunal international dont la Syrie ne veut pas.