Il semble que le dispositif actuel de lutte contre le ch�mage ne donne pas satisfaction au gouvernement malgr� les chiffres officiels d�fendus notamment par le ministre de la Solidarit� et de l�Emploi. Si l�on en croit ce dernier, le taux de ch�mage qui �tait de 29% en 1990 est tomb� � 11,2% en 2007 ! Le ministre du Travail vient de pr�senter en Conseil de gouvernement qui l�a adopt�e et sur la base d�une appr�ciation critique du dispositif actuel, une nouvelle �strat�gie de promotion de l�emploi et de lutte contre le ch�mage �. De quoi s�agit-il ? De �la lutte contre le ch�mage par une approche �conomique�, du �soutien � l�investissement g�n�rateur d�emploi�, de �l�adaptation des fili�res et des profils de formation aux besoins du march� du travail� selon les propres termes utilis�s dans le document du minist�re du Travail. A la lecture de ces objectifs, on s�attend � trouver dans la �strat�gie� pr�sent�e par le ministre du Travail des d�veloppements sur la nouvelle politique d�investissements productifs, un programme de soutien � l�entreprise comme foyer de cr�ation de richesses et d�emplois et des propositions relatives � une politique d��ducation et de formation plus soucieuse de la demande exprim�e par le march� du travail. Rien de cela. Le document du ministre du Travail ne renvoie m�me pas � quelques travaux que les trois minist�res : de l�Investissement, de l�Education et de la Formation professionnelle, auraient engag� en coh�rence avec cette nouvelle strat�gie de l�emploi. Le minist�re du Travail risque donc de voir sa �strat�gie� n�engager que l�administration dont il a la charge mais l� n�est pas l�essentiel. L�analyse plus en d�tail de son document confirme notre appr�hension puisque n�y sont d�velopp�es que des mesures de r�am�nagement du dispositif actuel de lutte contre le ch�mage, accompagn�es de quelques souhaits anodins sur ce qui devrait �tre d�cid� dans le domaine de l�entreprise. Disons-le d�s � pr�sent : la �strat�gie� se r�duit � une politique �d�emplois aid�s� financ�s par la d�pense publique. Nous sommes toujours dans le traitement social du ch�mage avec des �am�liorations� du dispositif actuel d�insertion professionnelle et du fonctionnement des institutions d�encadrement du march� du travail. Il s�agit de solutions d�attente en esp�rant que l�investissement productif reprenne, que la croissance devienne plus vigoureuse et l�entreprise plus performante et plus cr�atrice d�emploi. Comment parvenir � ce nouveau contexte �conomique ? Le document du minist�re du Travail ne fait aucune proposition. Nous avons d�j� eu l�occasion d�analyser la logique du dispositif actuel et d�en montrer les limites quant � ses effets sur la r�sorption durable du ch�mage. Rappelons simplement que selon les derniers chiffres de l�ONS, 3 169 500 emplois sont des emplois pr�caires puisque l�emploi non permanent qui comprend les contrats � dur�e d�termin�e, les apprentis et les aides familiaux repr�sentent 36,9% du total des occup�s. L�essentiel des emplois cr��s le sont dans le cadre du dispositif de soutien public � l�emploi dans le cadre des programmes Esil (Emploi salari� d�initiative locale), contrats de pr�emploi pour les dipl�m�s du sup�rieur au ch�mage (CPE), les emplois dits �activit�s d�int�r�t g�n�ral� (AIG) ou filet social, les emplois cr��s dans le cadre des travaux d�utilit� publique � haute intensit� de main-d��uvre (Tuphimo) et l�emploi des jeunes (Ansej). Tous ces emplois sont tenus � bout de bras par l�Etat et la d�pense publique. Il s�agit d�ailleurs plus de gestion du ch�mage que de politique d�emploi. La nouvelle �strat�gie pour l�emploi� du minist�re du Travail reste dans la m�me logique. Deux grandes orientations y sont d�fendues : 1/L�emploi est la r�sultante de la croissance �conomique, elle-m�me r�sultant de l�investissement et de la performance de l�entreprise. Nous avons d�j� signal� que le document du minist�re du Travail ne dit pas un mot sur le �comment� d�une croissance �conomique vigoureuse, d�une politique judicieuse d�investissement et d�une r�habilitation de l�entreprise. Mais m�me en �pardonnant � ces lacunes, le minist�re du Travail semble ignorer que la croissance �conomique, aujourd�hui, dans un contexte de mondialisation est de moins en moins � fort contenu d�emploi, que le plein emploi n�est pas une r�sultante automatique de l�investissement mat�riel, que nous sommes � l��re de l��conomie fond�e sur la connaissance (EFC) et que l�entreprise a besoin, pour prosp�rer et cr�er de l�emploi, d�une politique de l�offre qui la lib�re des diff�rentes charges et contraintes. 2�/ La seconde orientation de la �strat�gie pour l�emploi� adopt�e en Conseil de gouvernement concerne la mise en place d�un dispositif d�aide � l�insertion professionnelle (DAID) qui est en fait la proposition centrale du document. Qu�est-ce que ce DAID ? Avant de pr�senter le contenu du dispositif d�aide � l�insertion professionnelle, rappelons que 70% des ch�meurs alg�riens sont des jeunes �g�s de 16 � 29 ans. Les exclus du secondaire et les dipl�m�s de la formation professionnelle repr�sentent 64% de ces jeunes ch�meurs (rappelons ici � nos lecteurs notre chronique intitul�e �L��cole alg�rienne produit des ch�meurs�) ; les jeunes sans qualification en repr�sentent 22% et les dipl�m�s de l�enseignement sup�rieur 14%. Le nouveau dispositif de lutte contre le ch�mage cible donc en priorit� cette population de jeunes ch�meurs. Il se compose de trois programmes : 1- Le contrat d�insertion des dipl�m�s (universitaires) : le CID qui remplace le CPE (contrat de pr�emploi dont le minist�re du Travail reconna�t enfin l�inefficacit� : �tr�s forte concentration des postes finances dans l�administration, manque de perspectives de recrutement durable pour le b�n�ficiaire, inexistence d�accompagnement par la formation�. Bref de l�argent du contribuable gaspill� ! Le nouveau contrat � destination des dipl�m�s du sup�rieur est un �contrat de travail aid� dans lequel l�Etat assure une partie du salaire du jeune dipl�m� recrut� et ce, pendant 5 ans de mani�re d�gressive. Dans les administrations, ce contrat est prolong� � deux ans pay�s par l�Etat. De plus la r�mun�ration re�ue par le dipl�m� sera augment�e. Mais quant au fond, nous sommes toujours dans la m�me logique que le CPE c�est-�-dire emploi aid� et traitement social du ch�mage. 2/- Le contrat d�insertion professionnelle (CIP) en direction des exclus du secondaire et des dipl�m�s de la formation professionnelle. Il s�agit aussi d�un contrat de travail aid� : l�Etat assure des indemnit�s mensuelles et offre un contrat de travail (CTA) � l�entreprise pour l�encourager � recruter le jeune ch�meur apr�s une ann�e. 3�/Le contrat de formation insertion (CFI), � l�adresse des jeunes ch�meurs sans qualification. Ce contrat est r�gi par les m�mes dispositions appliqu�es au CIP. En r�sum�, la �strat�gie de promotion de l�emploi et de lutte contre le ch�mage� du minist�re du Travail est en fait une reprise corrig�e du dispositif d�j� en place et qui n�est rien d�autre qu�un traitement social du ch�mage. D�un autre c�t�, l�approche d�fendue par le ministre du Travail est archi-traditionnelle : elle consiste � affirmer que l�emploi est la r�sultante d�actions de d�veloppement �conomique et uniquement. M�me la croissance �conomique dont est attendue le plein emploi est mal abord�e : comme nous l�avons d�j� soulign�, elle est r�duite � des politiques d�accumulation dans les secteurs, au moment o� dans le monde la croissance est de plus en plus tir�e par l�immat�riel et l��mergence de l��conomie fond�e sur la connaissance (EFC). De m�me, la croissance est de moins en moins � fort contenu d�emplois. Il faut donc chercher la cr�ation d�emplois, aussi et de plus en plus sur d�autres terrains. Le syst�me de formation, pour sa part ne peut �tre qu�une mesure d�accompagnement et ne peut se substituer � une politique de l�emploi. La formation ne cr�e pas en elle-m�me des postes d�emploi ni m�me des possibilit�s d�emploi. Pour preuve, le ch�mage qui frappe les jeunes dipl�m�s de plus en plus nombreux et dans beaucoup de pays. Et chez nous, le ch�mage touche plus fortement les jeunes dipl�m�s que les jeunes sans qualification ! A aucun moment, le document portant �strat�gie de promotion de l�emploi� ne traite le march� du travail comme espace autonome avec ses propres contradictions, ses propres logiques, ses propres potentialit�s. Et si la lutte contre le ch�mage passait aussi et surtout par la r�forme du march� du travail ? Au plan de la th�orie �conomique, deux grands courants de pens�e ont marqu� l�analyse du traitement �conomique du ch�mage : 1) Le courant des th�ories macro�conomiques pour lequel l�insuffisance d�offre d�emploi r�sulte de l�insuffisance des capacit�s de production et de l�investissement. La lutte contre le ch�mage passe donc par une politique de l�offre : all�ger les cotisations et r�duire les pr�l�vements obligatoires qui p�sent sur les entreprises pour les inciter � recruter. Dans le m�me courant de pens�e, les keynesiens expliquent que l�insuffisance de l�offre d�emploi r�sulte de l�insuffisance de d�bouch�s anticip�e par les entreprises, c�est-�-dire l�insuffisance de la demande solvable. La lutte contre le ch�mage passe par une am�lioration des carnets de commandes des entreprises, par une relance de la demande : cr�dits � la consommation, revalorisation des salaires. Le march� s�anime, les entreprises se remettent � produire et donc � recruter. Les exp�riences concr�tes qui ont suivi ces th�rapies n�ont g�n�ralement pas pu vaincre le ch�mage. D�autres facteurs interviennent. Le second courant de pens�e de traitement �conomique du ch�mage est celui des th�ories micro�conomiques : le travail est un facteur de production et une marchandise comme toutes les autres �chang�es sur un march�. Si le march� libre et concurrentiel du march� du travail est respect�, on arrive � un �quilibre entre l�offre et la demande d�emploi. La variable d�ajustement est le salaire. Cette th�orie a donn� lieu � de nouvelles formes de travail : contrats � dur�e d�termin�e, int�rims, travail � temps partiel. Cette flexibilit� du march� du travail vise � faciliter l�embauche en lib�rant l�entreprise des lourdeurs du licenciement : on sort et en entre plus facilement sur le march� de l�emploi. Danemark, Su�de, Finlande ont lib�ralis� leurs march�s du travail ; la Grande-Bretagne a suivi, la France a tent� mais a fait face � de grandes r�sistances (CPE). Dans les pays ayant appliqu� la flexibilit� pour l�entreprise, la s�curit� pour le salari� (indemnit�s de ch�mage, accompagnement pour trouver un nouvel emploi, formation qualifiante et recyclage, job centers qui mettent en relation demandeurs et offreurs d�emplois), le ch�mage a baiss� � des niveaux int�ressants : taux de ch�mage � 5% en moyenne, tr�s grande mobilit� du travail, ch�mage de plus en plus faible et de dur�e de moins en moins longue, plus grande adaptation de l�entreprise � la fois � la conjoncture �conomique et � la situation de l�emploi dans le pays. Ainsi, le v�ritable traitement �conomique du ch�mage est celui qui repose certes sur la croissance et l�investissement. Mais pas uniquement. Le march� du travail doit aussi �tre r�form�, fluidifi�, mieux encadr� pour l�accompagnement du ch�meur tant dans son recyclage et sa qualification que dans sa mise en relation avec l�offreur d�emploi : l�entreprise. Relisons � pr�sent la �strat�gie de promotion de l�emploi� du minist�re du Travail. Ne s�agit-il pas encore une fois d�un simple traitement social du ch�mage co�teux, �ph�m�re et sans utilit� pour l��conomie ?