Mardi soir, la t�l�vision officielle illustrait le sujet principal de son JT par un long panoramique sur la salle du Conseil des ministres. Un arr�t sur image quasisurr�aliste par sa qualit� � remonter le temps. Un plan sorti quasiment des archives. Une performance visuelle dont elle n�est pas l�auteur mais simplement le metteur en sc�ne. Celle d�un ar�opage de personnalit�s, pr�sentes dans les commandes de l�Etat depuis au moins dix ann�es et qui ne semblent pas s�inqui�ter d�une telle long�vit�. C�est que le principal d�entre eux vient de plus loin encore. Lui qui a connu sa premi�re visibilit� politique au temps des d�crets de l�autogestion quand l�Alg�rie n��tait peupl�e que de 10 millions de sujets, constitue pour l�ensemble de la classe qui l�entoure l�exemple parfait pour durer dans la carri�re. C�est ainsi que les oligarchies naissent, grandissent et se cimentent. Par la complicit� du temps, elles se veulent familles insubmersibles sauf � �tre balay�es collectivement de la responsabilit�. Pour la plupart de cette fratrie politique, la promotion date d�j� du si�cle dernier. Or, neuf ann�es apr�s le changement d��re dans nos calendriers, elle demeure non seulement ind�boulonnable mais, de plus, n�a gu�re chang� de �logiciel� pour nous gouverner. Bien plus que toutes les autres consid�rations, c�est cet archa�sme qui de nos jours d�sole. En effet, lorsque le temps n�est plus per�u comme un alli�, ne faut-il pas craindre qu�il ne devienne le plus redoutable adversaire ? La capacit� de borner sa dur�e pour mieux en ma�triser les cons�quences n�est-elle pas un pr�alable � tout acte de gouvernance ? Param�tre concr�tement influent, le temps n�est une abstraction que pour ceux qui ont d�finitivement renonc� au progr�s. Justement ce qu�il est reproch� � ce personnel, reconduit d��ch�ance en �ch�ance, ce n�est pas qu�il vienne du �si�cle� pr�c�dent mais qu�il n�a pas encore pris conscience de ce basculement du temps avec ce que celui-ci pr�pare comme modification dans l�environnement ext�rieur � ce pays. Au moment o�, ailleurs, ce changement d��poque est l�occasion d��tre plus novateur, chez nous, h�las, cette volont� de faire d�un �autre temps, autres m�urs� ce caract�rise par une d�marche � rebours. Celle de marcher � reculons jusqu'� refuser � ce pays de s�installer dans �son� si�cle en le for�ant, en quelque sorte, � prolonger, fantasmatiquement, le si�cle� dernier ! La crise ou plut�t les crises qui continuent � secouer notre soci�t� contribuent fortement � aggraver notre retard. Pire, encore, elles d�mon�tisent le peu de savoir-faire capitalis� par le pass�. Nous r�gressons irr�m�diablement et comptons de moins en moins d�atouts au fil du temps et des approximations de nos dirigeants. C�est dire que le risque est r�el de nous retrouver bient�t avec une soci�t� totalement en panne. D�finitivement inapte � �laborer, par elle-m�me, des solutions afin de se projeter dans un nouveau pays. Un pays r�nov�. En cet an de gr�ce 2009, nous sommes d�j� 35 millions de sujets et qui plus est, sont mal administr�s. Car ceux qui nous gouvernent actuellement persistent toujours dans des approches qui non-seulement ont montr� leurs limites mais s�inscrivent �galement en total d�calage avec les demandes de la soci�t�. Une myopie persistante qui a fini par engendrer de colossales aberrations. C�est qu�il y a � l�origine de cette incurie, les insatiables app�tits politiques qui confisquent sans scrupule tous les centres de d�cision. R�futant toute approche novatrice qui leur �terait une parcelle de leur autorit�. Plus que la gabegie �conomique, ce fut, � l�origine, essentiellement le terrorisme de l�appareil d�Etat qui fit le plus de mal � ce pays auquel l�on a interdit la moindre imagination anticipatrice. La docilit�, fille a�n�e de la m�diocrit�, �tait alors exig�e en guise de crit�re d�accession � la responsabilit�. Pour oser une comparaison et dessiner � grands traits l�Alg�rie du pass�, encore perceptible dans celle de nos jours, il suffit de prendre pour r�f�rence les pratiques bureaucratiques de l�ex- Union sovi�tique avec l�id�ologie en moins. Ainsi, si dans le Moscou d�avant 1989, le socialisme apparaissait aux yeux de ses plus lucides adversaires comme un m�lange de marxisme primaire et de KGB fouettard, dans l�Alger de la m�me �poque il n��tait rien d�autre qu�une conjuration permanente avec pour complice un appareil de r�pression et des putschistes sans doctrine. A peine diff�renci�s par quelques slogans. Voil� pourquoi l�esprit de syst�me, reconnaissable � son opposition � l�ouverture, a pouss� les �lites � l�exil ou � la marginalit�. Certes parmi elles, il y eut quelques opportunistes qui pr�f�r�rent quelques fonctions dor�es en �change de leur silence. Par leur trahison souterraine, ces clercs ont eux aussi fini par n��tre plus de leur �poque. C'est-�-dire dans le si�cle de leur soci�t�. D�sormais, l�Alg�rie est un cas d��cole. Celui des nations qui ont rat� tous les rendez-vous.