Cette semaine, � Chlef, une tr�s pertinente conf�rence a eu lieu � la salle de conf�rences du cin�ma Djamal. Cette manifestation entre dans le programme des soir�es culturelles du Ramadan, concoct� par le conseil culturel communal de la ville. L'auteur, professeur �m�rite de fran�ais, est aussi un sp�cialiste en toponymie et un linguiste. Son obsession est de reconstituer cette langue m�re qui a enfant� toutes les autres, parl�es de par le monde. Pour ce faire, il s'est appuy� sur un excellent ouvrage, le dictionnaire Bescherel paru en 1958, con�u par un �rudit ma�trisant parfaitement le celte, le latin et le grec. M. Kouadri Bouali pense que les linguistes europ�ens ont omis de faire le parall�le entre les langues s�mitiques et les europ�ennes pour d�terminer l'�tymologie des mots contenus dans leurs dictionnaires, �tant victimes de leur historiocentrisme. Le conf�rencier soutient mordicus que nul ne peut donner une origine compl�te et pr�cise � un mot s'il ne conna�t pas � fond les langues s�mitiques, dont l'arabe. C'est pour cela que l'on retrouve souvent des ast�risques o� la mention origine obscure devant des mots dans les dictionnaires. L'auteur vient d'effectuer deux stages en France et a �t� �tonn� par le manque de rigueur dans l'explication de l'origine de beaucoup de mots de la langue fran�aise. Et d'illustrer son propos par quelques exemples. Il cite le mot �hero� qui signifie chat en grec. De m�me cet animal se nomme �h�re� en arabe. Voil� un exemple de similitude entre une langue europ�enne et la langue arabe. Nous pouvons comparer bedaine (en fran�ais) et batne (en arabe) qui font tous les deux r�f�rence � l'estomac. Partant du fait qu'un mot se compose d'un radical et d'une racine, nous prenons l'expression �aberrant� qui est un mot partag� entre le latin (aberare signifiant �carter) et l'arabe classique ou dialectal �barra� qui signifie en dehors. La comparaison peut �tre �tablie sachant qu'aberrant exprime en dehors des r�gles, en dehors des normes, comme une id�e aberrante, insens�e, absurde. Notre conf�rencier pense aussi que le mot �abr�ger � est une interf�rence entre une langue europ�enne et une langue s�mitique. Si on supprime le pr�fixe �ab�, on arrive � �raja� qui signifie en arabe maghr�bin �couper � dans le sens de diminuer. D'autre part �abr�ger� vient du latin br�vis qui veut dire bref c'est-�-dire couper dans le sens de diminuer la longueur ou la dur�e. En conclusion le mot �abr�g� est un mot partag� entre le latin et l'arabe. Pour ce qui est du mot �abroger� (qui vient du latin rogarer : demander), on retrouve la racine �raja� qui veut dire aussi demander dans une langue s�mitique. M. Kouadri cite aussi �abattre� qui renvoie � �habate� (d�truire en arabe). Acabit (de la m�me sorte) serait d�riv� d'un mot arabe maghr�bin qui veut dire poids d'un homme. Le mot absolu (absolutis en latin) renvoie au mot �sal� ou �assil� qui signifie pur. �Sabstenir� (fran�ais) et �stenna� (arabe) sont tr�s proches pour signifier attendre avant de prendre une d�cision. Le mot �abonn� viendrait du mot �bone� qui veut dire � intervalles r�guliers ; or, un abonn� s'acquitte de quelque chose d'une fa�on r�guli�re. Notre sp�cialiste en philologie d�compose le mot �abdomen � en abd �qui veut dire cacher en langue s�mitique et �omen� qui sont les pr�sages. Cela s'explique si on sait que les pr�sages se lisaient dans les intestins d'animaux. Et les intestins sont cach�s dans l'abdomen. Ce passionn� de s�mantique nous explique aussi que le mot �augure� vient d'un mot kabyle �garidu� qui veut dire oiseau d'o� l'expression oiseau de bon ou de mauvais augure selon la direction qu'il emprunte lorsqu'on le l�che. Le mot �il� signifie tr�s fin dans des langues s�mitiques d'o� les mots fil, cil, poil. M. Kouadri Bouali note que certains mots du dictionnaire sont suivis d'un ast�risque, c'est-�-dire d'origine inconnue. Or, si ces lexicographes s'�taient int�ress�s aux langues s�mitiques, s�rement, ils auraient trouv� leurs �tymologies. Ils ont m�me des explications farfelues comme compagnons : deux individus qui sont dans un m�me char (?). Ce sp�cialiste en linguistique est � f�liciter pour son travail de longue haleine, mais les responsables de la culture devraient l'�pauler dans son travail passionnant.