Le roi Abdellah vient de limoger Cheikh Sa�d al-Shethry, un membre influent du Conseil des oul�mas et du Comit� permanent des recherches et des fatwas. La faute de ce religieux ? Avoir critiqu� en direct � la t�l�vision l�introduction de la mixit� dans la nouvelle universit� King Abdullah University of Science and Technology de Djeddah que le souverain saoudien venait d�inaugurer. Ce religieux a qualifi� la mixit� de �mal� et de �grand p�ch�. Pour qui conna�t l�Arabie saoudite, ce qui vient de se passer est un �v�nement � ne pas n�gliger quand on sait le poids de ce pays dans le monde arabe et islamique. Dans ce pays o� je me suis rendu � deux reprises comme journaliste, j�ai discut� avec des journalistes et des repr�sentants de l��lite saoudienne. ` Des personnes qui veulent faire bouger les choses dans le sens du progr�s, sans pour autant renier leurs convictions islamiques. Elles soutiennent le roi Abdellah qui veut �d�bloquer� la soci�t�. En effet, ce pays a beaucoup investi dans la formation et l��ducation. Des milliers de jeunes dipl�m�s, form�s � coups de millions de dollars dans les meilleures universit�s du pays et du monde anglosaxon � Etats-Unis et Grande Bretagne � sont, pour la plupart, au ch�mage. Quant � ceux qui travaillent ou dirigent des entreprises, les intellectuels et les universitaires, ils doivent faire avec le poids du religieux wahhabite. Ces �lites, dont beaucoup de femmes, qui savent que le p�trole a une dur�e de vie limit�e, veulent faire �voluer la soci�t� saoudienne et se heurtent � toutes sortes d�interdits. Elles ne demandent pas la lune mais elles voient que dans les pays voisins, le poids des interdits religieux est, disons, plus souple qu�en Arabie saoudite. Elles sont convaincues que l�Arabie saoudite ne peut �chapper aux �volutions que conna�t la plan�te � l�heure d�Internet. Et que leur pays ne peut se r�soudre � v�g�ter dans un �tat moyen�geux n�acceptant de l�Occident que sa technologie et non ce qui va avec. Mieux, contrairement � ce qu�on croit, �a d�bat en Arabie saoudite. La presse locale s�en fait l��cho. Le wahhabisme n�est pas l�Islam, mais une id�ologie, une variante du salafisme. L��ge d�or de l�Islam � la civilisation omeyade et abbasside � qu�un certain Ghazali qui officiait � l�ENTV avait condamn�, avait permis au monde musulman d��tre en avance sur le reste du monde. L�ouverture existant � cette �poque, entre le IXe et le XIIe si�cle, est inimaginable aujourd�hui. Un Moutanabi, un Omar Khayam, un Ibn Rochd, un Hafiz, El B�s�ri, le Turc Jalaleddine al-Roumi qui s�inspirait d�Esope et qui dialoguait avec les th�ologiens juifs (eh oui !), Ibn Tarkan qui a comment� La R�publique du philosophe grec Platon, al Halladj, Abou alla al Ma�ri(1), l�Andalou Ibn Tufa�l, � et chez nous, je parle du Maghreb, Ibn Khaldoun � auraient, au mieux, �t� mis au ban de la soci�t� comme des �munafiqin� (hypocrites au sens islamiste du terme), au pire, subi le sort de Salman Rushdie ou ex�cut�s. Pour en revenir � l�Arabie saoudite, le fait que le roi Abdellah ait pris conscience que son pays ne peut avancer sans tordre le cou au wahhabisme, id�ologie qui au temps d�Ibn Saoud dans les ann�es 30-40 avait d�cr�t� �haram� l�usage du t�l�phone et de la radio, ne peut �tre trait� comme si de rien n��tait. Ce n�est sans doute pas un tournant majeur, mais il est significatif de l��volution que conna�t la soci�t� saoudienne. Dans un pays o� l�on interdit aux femmes de conduire des voitures au nom de l�Islam, le limogeage de cet individu ne doit pas �tre banalis�. Il t�moigne des �volutions que conna�t la soci�t� saoudienne. H. Z. (1) Il avait �crit ceci : Les habitants de la Terre se divisent en deux ; Ceux qui ont de l'esprit mais pas de religion ; Et ceux qui ont de la religion mais pas d'esprit.