Alain Mabanckou a fait partie des �crivains en r�sidence d�auteur � Alger, dans le cadre du Panaf. Dans son dernier roman Black Bazar, il livre une chronique farfelue d�une microsoci�t�, l�immigration noire dans le Paris de toutes les illusions. Alain Mabanckou nous plonge dans la vie de la communaut� congolaise du quartier de Ch�teau- Rouge dans le XVIIIe arrondissement de Paris gr�ce au journal d�un personnage atypique, un dandy africain, amoureux des chemises italiennes et des chaussures anglaises qui se d�couvre une vocation d��crivain, suite � une d�ception amoureuse. En effet, sa femme le quitte, en s�enfuyant avec son amant, l�Hybride, un joueur de tam-tam, en emmenant leur unique fille. Ce chagrin d�amour tourmente le Fessologue, le personnage principal de Black Bazar (�dition Le Seuil) qui ne supporte plus l�appartement en raison de la silhouette de sa femme ou de l�Hybride qu�il devine dans tous les coins et recoins de la maison. Le Fessologue, surnomm� ainsi, car rien ne l�int�resse que la face B des femmes, capable de sonder les femmes rien qu�en regardant les mouvements de leurs popotins, d�cide d��crire, d�crire Black Bazar. Il est d�cid� de taper � �crire, de torturer sa machine � �crire, m�me si, de l�avis de ses amis, l��criture n��tait pas pour lui. Mais les mots le d�mangent, peut-�tre pense-t-il encore � sa femme, � leur premi�re rencontre. Couleur d�origine �tait la femme de sa vie. N�avait-il pas trouv� en elle �le derri�re de ses r�ves�. Mais, il faut se r�signer, Couleur d�origine vit avec l�Hybride quelque part au pays. Alain Mabanckou peint dans cette chronique africaine, des personnages aux noms �vocateurs Couleur d'origine, Monsieur Hippocrate, Pierrot Le Blanc, Roger Le Franco- Ivoirien, ne pas les nommer, c�est les rendre plus accessibles, donc plus indentifiables par les lecteurs. En dehors des descriptions trop lourdes (des pages enti�res) et parfois saugrenues du �derri�re� des femmes, le roman se lit agr�ablement. Les personnages, tous issus de l�immigration noire, surtout des Congolais, de la nationalit� du Fessologue. Ce dernier aime rejoindre ses amis au Jip�s, un bar afrocubain pour parler des femmes, de l�art de s�habiller avec �l�gance (il fait partie de La Soci�t� des Ambianceurs et des Personnes �l�gantes) la SAPE, de sa femme et surtout de son voisin Monsieur Hippocrate dont les premi�res pages nous font croire qu�il s�agit d�un vieux Fran�ais, �go�ste et chauvin qui n�aime pas �tre d�rang� dans son quotidien de blanc ; or, ce Monsieur Hippocrate est un Antillais noir et raciste qui lui pourrit la vie. Une vie qu�il passe � tra�ner au Jip�s, � ricaner des hommes mal sap�s, � bouder les femmes aux fesses plates. Il d�cide donc de tout �crire, en l��crivant, en tapant avec acharnement sur sa machine � �crire pour lui faire sortir les mots qu�il faut. Des mots parfois amers, dr�les, burlesques, path�tiques, ainsi se dessine le roman Black Bazar, un regard lucide et critique sur une communaut� qui partage ses espoirs et ses d�sespoirs, ses d�chirures et d�ch�ances dans un espace contraint au r�tr�cissement pour faire face � un pays o� tout est � reconqu�rir. Pour Fessologue, peut-�tre du nouveau quand survient Sarah, une artiste-peintre qui s�est introduite subitement dans son bar et dans sa vie. Avec elle, le Fessologue devient L�on Morin, pr�tre, il doit se surpasser, trouver son propre style, peut-�tre des pantalons pattes d��l�phant et des cheveux d�fris�s, bross�s vers l�arri�re. La m�tamorphose du Fessologue suit le mouvement de l��volution de la communaut� noire. Il y a entre les pages de la revendication de la situation socioculturelle d�une Afrique qui se cherche, une nouvelle approche de la cause, diff�rente de celle de C�saire ou Senghor. Mais, aussi ne faut-il pas chercher entre les pages de Black Bazar qu�un roman contemporain � lire, un beau roman sensible, dr�le et talentueux. Alain Mabanckou semble amorcer dans sa carri�re d��crivain une nouvelle vision de l��criture ou sa vision parisienne aussi semble avoir chang�. Sa caricature de la communaut� noire africaine, avec une note d�autod�rision, nous fait penser � de �l�autoflagellation �. Est-ce un moyen plus efficace d��voquer la vie difficile des Africains, parfois clandestins, victimes du ch�mage, du racisme et de l'exclusion ?