Le débat sur les crânes des résistants algériens refait surface en France. Alain Froment, qui a dirigé pendant dix ans les collections d'anatomie du Musée de l'Homme de Paris, estime qu'ils doivent être restitués à leur pays d'origine, soulignant le symbole que représentent ces résistants algériens. «Bien sûr, on voit le symbole que représentent ces résistants algériens. Nous en avons hérité pour des raisons historiques, mais il faut évidemment les rendre, il n'y a aucun débat là-dessus», a affirmé ce docteur en anthropologie biologique, chargé de la gestion du dossier de la restitution des crânes à Algérie, dans une interview à l'hebdomadaire Le Journal des arts, paru vendredi. Il a indiqué que le musée «n'a pas la main» pour la restitution, en raison des modalités du véhicule juridique qui restent «en suspens». «C'est la raison de cette commission franco-algérienne», a-t-il expliqué, précisant dans ce cadre que «la politique est distincte selon que les restes sont nommés ou anonymes». Il a ajouté que la commission, dirigée par le médecin légiste le professeur Belhadj, fait en quelque sorte un «travail d'identification judiciaire». «Ensemble, nous examinons les cadavres un à un pour déterminer leur âge, leur sexe. Ce travail collectif est salutaire puisqu'il nous a permis de documenter de manière approfondie nos collections», a-t-il souligné, indiquant que des archivistes algériens «étudient par ailleurs les archives coloniales à Aix», qui ont déjà trouvé des éléments que «nous n'avions pas ici et qui permettent d'identifier des crânes». «Nous avons un mandat de la présidence, puisque Emmanuel Macron a dit que nous restituerons les crânes des résistants algériens. Et il a bien dit ‘résistants'», a-t-il tenu à souligner en réponse à une question sur la restitution des autres restes d'Algériens conservés en France. Il a précisé que la plupart des crânes sont «anonymes» et qui «ne rentrent pas dans la négociation». «Si c'est un anonyme documenté comme victime d'une exaction, il est possible de discuter : il rentre dans un fait de résistance ou d'exaction, donc il y a réparation», a-t-il expliqué, indiquant qu'il y a «381 crânes algériens, dont la grande majorité proviennent des fouilles archéologiques». Par ailleurs, il a fait savoir que toute procédure de restitution est encadrée par des circuits juridiques «complexes» que sont chargés de démêler les membres de la commission franco-algérienne en lien avec les autorités des deux pays. Dans une interview à l'APS, en avril 2018, le chercheur algérien Ali Farid Belkadi, à l'origine de la découverte au Musée de l'Homme de Paris des crânes des résistants algériens, avait indiqué, rappelle-t-on, que «parmi les 536 restes mortuaires d'Algériens recensés, il y a 70 crânes appartenant aux résistants de Zaâtcha (Biskra)». «Les 70 crânes de Biskra, sont bel et bien ceux de résistants de Zaâtcha, qui furent décapités à la fin du siège de l'oasis par les soldats du corps expéditionnaire français», avait précisé ce chercheur en histoire et anthropologie, soulignant que certains ossements concernent la préhistoire. «La présence de ces crânes et de divers ossements en provenance d'Algérie est bel et bien établie et vérifiée dans la base de données du musée où figurent les ‘spécimens' informatisés et non l'intégralité des collections qui restent encore à repérer et à cataloguer», avait-il ajouté.