Le ministère de l´Intérieur espagnol a élevé au «niveau 2» le risque d´attentats terroristes d´origine islamiste. Madrid, Barcelone, Cordoue, Malaga et Ceuta sont les cibles potentielles d´éventuels actes de violence de la même portée que ceux du 11 mars 2004 contre la gare d´Atocha, dans la capitale, qui avaient fait 192 morts parmi les passagers et 1852 blessés, parmi lesquels des musulmans. Les auteurs de cette tragédie unique dans l´histoire du pays étaient des membres du Groupe islamiste des combattants marocain (GICM). Dans ces villes où la vigilance policière a été renforcée, il existerait de nombreuses «caches» et «planques» qui ont été repérées par les services de sécurité. Ce sont dans la plupart des cas des appartements et des locaux commerciaux, tenus par des islamistes, qui sont surveillés en permanence. 368 enquêtes ouvertes Les services de sécurité espagnols maintiennent ouvertes actuellement 837 enquêtes sur tout type de terrorisme dont près de la moitié (368) entrent dans le cadre de la lutte contre le «djihadisme». Un rapport élaboré par les enquêteurs sur ces activités de terrorisme indique que sur les 368 enquêtes anti-djihadistes en cours, 234 sont en phase de passage à l´action policière. Les 134 autres sont orientées en direction des réseaux dits «dormants» et qui peuvent être activés à tout moment, en fonction de la conjoncture et de l´évolution de la situation sur les fonts syrien, irakien ou sahélien. Jusque-là les services de sécurité ont identifié 234 suspects dont 63 vivent à Barcelone. 18% des personnes et des entreprises sujettes à enquête ont leur noyau principal dans la capitale catalane, alors que 13% sont établis à Madrid. Dans ce rapport qui identifie dans le détail les personnes suspectées d´appartenir à des réseaux de soutien du terrorisme et de captage des candidats au djihad, rien n´est laissé au hasard. Tout est consigné dans le document, des informations relatives aux activités commerciales des suspects, à leurs comptes bancaires, leurs numéros de téléphone et leurs contacts et lieux de fréquentation. Sur la base de ce précieux fichier, les services de sécurité espèrent prévenir les actes de terrorisme en préparation sur le territoire espagnol ou dans les pays voisins de l´Union européenne. Jusqu´à ces deux ou trois dernières années, la traque de l´ETA a été la priorité de la police et de la gendarmerie. Avec la nouvelle situation d´instabilité qui s´est instaurée dans la région sud de la Méditerranée, en 2011, avec la guerre de Libye et son prolongement sécuritaire jusqu´à la côte ouest africaine, zone située à moins d´une centaine de kilomètres des îles Canaries, les autorités espagnoles se préoccupent davantage de la portée du djihadisme. Ce phénomène a encore pris de l´ampleur avec l´afflux des djihadistes vers les fronts syrien et irakien où sont implantés les groupes de l´Armée islamique d´Irak et du Levant (EIIL). L´Espagne craint donc au plus haut point le retour, sur son territoire, des dizaines d´Espagnols qui sont allés combattre dans ces deux pays arabes. Expulsions systématiques Depuis 2004, le gouvernement espagnol a expulsé une centaine de supposés «djihadistes» de diverses nationalités pour motif de sécurité nationale. La fréquence des expulsions est en augmentation régulière aujourd´hui avec une moyenne d´une douzaine par mois, une hausse qui s´explique par la dégradation de la situation en Irak et en Syrie. Le pic a été atteint avec 15 expulsions en 2013, contre 4 seulement en 2004. Depuis le mois de janvier, 14 islamistes radicaux ont été réadmis dans leur pays d´origine, mais ce chiffre pourrait être facilement revu à la hausse d´ici la fin de l´année en cours. Les expulsés sont dans leur grande majorité des Marocains, mais il y a aussi des Tunisiens, des Syriens et des Pakistanais qui vivaient en Espagne où ils étaient mariés à des Espagnoles. Il y a quelques mois, un Algérien, Nouh Mediouni, 24 ans, incarcéré par le juge Pedraz sous l´inculpation d´apologie de terrorisme, a été mis dans le premier avion en partance vers Alger, dès sa sortie de prison.