Des tas de pierres jetées ici et là, des lampadaires arrachés, le siège de la sûreté de daïra partiellement incendié, des restes de pneus brûlés, des amoncellements d'immondices, des ruelles obstruées par l'écoulement des eaux usées débordant de canalisations éventrées : la localité d'In Salah que nous avons retrouvé ce mardi soir ressemble à un dépotoir à ciel ouvert. Des quartiers de la ville portent en outre les traces d'une violente émeute ayant opposé la population locale aux forces de l'ordre durant les journées de samedi et dimanche derniers. Une vaste opération de nettoyage a été par ailleurs initiée très tôt dans la matinée d'hier par les habitants d'In Salah dans le but de redonner à leur cité un aspect attestant d'un retour à la normale après une période d'affrontements qui n'a pas été sans provoquer beaucoup de dégâts. Le bilan des blessés est également lourd. En sus de la quarantaine de blessés parmi les policiers antiémeute, un chiffre que le ministère de l'Intérieur a mentionné dans un communiqué rendu public, le nombre de manifestants antigaz de schiste blessés durant les affrontements qui ont secoué In Salah aurait atteint les 300, indiquent plusieurs citoyens rencontrés hier dans cette ville. «Les policiers antiémeute ont fait usage de méthodes musclées et d'une grande violence contre les manifestants», témoigne Taleb Abderrahmane Ahmed, un des contestataires antigaz de schiste ayant pris part à la concertation qui a regroupé des habitants d'In Salah avec le commandant de la VIe Région militaire, le général-major Ammar Athamnia. Des dizaines de blessés ont été admis au niveau de l'hôpital d'In Salah, avons-nous constaté hier. Messaoudi Abdelwahab, Goumri Seddik, Ahmed Oubaâli Marmari Salah et Hemi Belkacem sont les quelques blessés auxquels nous avons rendu visite hier au sein de ladite infrastructure de santé. Tous dénoncent à l'unisson le comportement violent des policiers durant les récents affrontements qui ont ébranlé In Salah. «J'ai été atteint par une bombe lacrymogène tirée à bout portant qui m'a atteint à la tête», indique Ahmed Oubaâli. «On a toujours été pacifiques dans notre contestation contre l'exploration du gaz de schiste. On n'a jamais provoqué les forces de l'ordre et ils nous est même arrivé de partager avec eux notre nourriture durant les moments de notre sit-in devant le siège de la daïra. Eux, en revanche, nous ont violemment tabassés durant la nuit de dimanche dernier lorsque nous étions réunis place de la Résistance», raconte pour sa part Goumri Seddik. Il poursuit que les policiers antiémeute ont incendié toutes les tentes érigées à la place de la Résistance. Beaucoup de blessés gravement atteints, notamment à l'œil, ont été transférés vers des hôpitaux relevant notamment de Ghardaïa, Djelfa et Ouargla, et ce, en raison du manque de spécialistes dont «souffre terriblement l'hôpital d'In Salah», affirme son directeur Mohamed Bensalem. Le comportement violent dont les éléments antiémeute de la DGSN auraient fait preuve a constitué par ailleurs l'un des sujets débattus lors de la concertation ayant réuni une délégation d'une trentaine de manifestants avec le commandant de la VIe Région militaire, le général-major Ammar Athamnia. «Le général- major nous a assuré qu'une enquête approfondie sera menée concernant les dépassements des éléments de la police. Il nous a affirmé que l'institution ne tolère pas ce genre de dépassements», indique le contestataire Taleb Abderrahmane Ahmed.