La mise en œuvre de l'accord d'association, bien que saluée par les opérateurs économiques, a généré des problèmes dans des secteurs stratégiques pour l'Algérie, en particulier l'agroalimentaire. Sur une douzaine de requêtes introduites par les entreprises algériennes ayant constaté un impact négatif sur leurs activités, suite à la mise en œuvre de l'accord d'association avec l'Union européenne (UE), seul le cas de l'entreprise de production d'engrais Fertial est considéré comme recevable par la commission technique de suivi de la mise en œuvre de la zone de libre-échange avec l'UE. «Le cas de cette entreprise devra être défendu de manière très énergique lors de la prochaine réunion du comité permanent de suivi de la mise en œuvre de l'accord d'association entre l'Algérie et la communauté européenne et ses Etats membres en septembre 2010», a révélé hier une source au fait du dossier. Lorsque Fertial a tenté d'exporter vers l'Europe, on lui a appliqué des mesures antidumping dans le souci de protéger les producteurs européens. Et là «nous ne sommes pas d'accord car ils considèrent que le prix du gaz n'est pas le prix réel. Nous, par contre, nous considérons que ce prix s'inscrit dans la colonne des avantages comparatifs. Nous n'avons pas à appliquer aux producteurs algériens le prix à international». Le double prix a été déjà accepté pour un certain nombre de pays qui sont membres de l'UE ou de l'OMC comme l'Arabie Saoudite, relève la même source. «Si on continue de nous imposer des droits antidumping pour les fertilisants, cela signifie qu'ils ont condamné toute l'industrie qu'on appelle énergétivore comme l'ammoniac», avertit la même source. «Il faut que nous soyons assez vigilant et qu'on défende énergiquement notre position. Car jusque-là les pays de l'UE sont en train de tergiverser. Ils ne veulent absolument pas régler le problème.» De l'avis de la même source, «le lobby des producteurs de fertilisants en Europe est très puissant et défend ses intérêts. Ils semblent résister aux pressions qu'on est en train d'exercer sur eux». Peu de requêtes sont recevables Théoriquement, poursuit la même source, «les requêtes ne devaient pas être introduites dès la première année de mise en application de l'accord car le démantèlement tarifaire, qui est progressif, ne concerne dans la première phase que les matières premières et les demi-produits». Ces produits ont toujours été importés à des taux très bas. Donc, «ce ne sont pas des produits qui pouvaient poser des problèmes à notre production nationale». Les requêtes allaient devenir importantes au fur et à mesure, lorsque le démantèlement tarifaire serait élargi aux produits finis. Cependant, dans le lot des matières premières, figurent des produits qui posaient problème. Il s'agit par exemple du cas du sucre. Pour un consommateur, c'est un produit fini mais pour un industriel, c'est une matière première qu'il utilisera dans la fabrication d'autres produits comme les boissons gazeuses et les jus. Lorsque l'accord d'association a été mis en œuvre, un groupe a introduit une requête à travers laquelle il a posé le problème en vue de bénéficier d'un contingent tarifaire. Il plaide d'ailleurs pour un volume de 450 000 à 700 000 tonnes de sucre par an que pourront exporter des producteurs algériens. Cette question devra être négociée à l'occasion de la prochaine révision de l'accord d'association en 2010, avait alors confié le patron du groupe. Or, enchaîne notre source, le sucre produit par le groupe était importé d'autres pays avant d'être raffiné en Algérie, contrairement à l'Europe où le sucre est totalement produit localement. Donc, «le sucre algérien que propose d'exporter le groupe ne peut bénéficier d'un contingent tarifaire car ce produit n'est pas d'origine algérienne. Le raffinage n'est pas considéré comme une opération de transformation substantielle du produit». Cette requête n'a pas été admise finalement. C'est un règlement algérien «Sur l'ensemble des requêtes examinées, seules quelques-unes ont été considérées recevables», nous indique notre source qui explique que les opérateurs économiques font la confusion entre les problèmes posés par le marché parallèle où on propose des produits en provenance de régions autres que l'Europe. Les produits pour lesquels la commission technique s'est prononcée favorablement sont le sucre, la margarine et le cacao. Pour le cas de la margarine, notre tarif douanier n'est pas diversifié. «Nous, on la considère comme un produit agricole et les pays européens le conçoivent comme un produit agricole transformé. Dès lors qu'on ne s'est pas entendu sur ce point, la requête introduite par les producteurs de la margarine était, de notre avis, recevable.» «Il fallait donc revoir la position tarifaire pour la classer dans la position tarifaire adéquate, c'est-à-dire similaire à celle des pays européens (produit agricole transformé).» Pour le cacao, c'est une autre problématique qui se pose. Les Européens, lorsqu'ils importent ce produit, ne payent aucun droit douanier alors qu'en Algérie ce même produit est soumis à un taux de 5%. Les Européens sont, à cet effet, favorisés en ce qui concerne ce produit car ils deviennent plus compétitifs. «Les entreprises algériennes ont demandé d'être, au moins, traitées sur un pied d'égalité avec les Européens, de façon à améliorer leur compétitivité. Cela étant, le cas du sucre, de la margarine ou du cacao peut être résolu en Algérie à travers l'aménagement des tarifs douaniers. C'est au ministère des Finances de revoir les positions tarifaires», estime notre source. BCR plie sous la contrefaçon Par contre, la requête introduite par l'entreprise BCR ne concerne pas la mise en œuvre de l'accord d'association. BCR souffre de la concurrence asiatique et de la contrefaçon, atteste la même source. Certaines entreprises confondent entre l'impact induit par la mise en œuvre de l'accord d'association et celui engendré par la concurrence déloyale causée par les importations à partir de la Chine ou de certains pays asiatiques. Dans ce cas précis, ce genre de requêtes est infondé, mais à cause de cette incompréhension, un questionnaire a été élaboré pour permettre aux entreprises de comprendre les situations où il est possible de soumettre des requêtes. L'avenir des produits finis ? Dans les prochaines années, les plus importantes requêtes concerneront éventuellement les produits finis. «Nous ne savons pas encore si ces produits souffriront ou pas de la mise en œuvre de l'accord d'association du fait que le démantèlement n'a pas encore atteint cette catégorie de produits.» Toutefois, indique notre interlocuteur, «nous n'avons pas beaucoup d'inquiétudes à nous faire car les produits européens sont chers et ne vont donc pas poser un problème aux produits algériens». Il propose cependant l'amélioration qualitative de notre production et la mise à niveau de nos entreprises. Les importations depuis les pays européens n'ont pas baissé, et ce, grâce au démantèlement tarifaire. N'était cette mesure, ces importations auraient connu une chute significative. Lors de la prochaine réunion, qui se tient chaque cinq an (clause rendez-vous de l'accord d'association), prévue en septembre 2010, «ce sont les secteurs utilisateurs d'énergie qui seront au centre des discussions».