Les déclarations faites par le ministre des Finances sur les augmentations des prix des carburants et autres produits de large consommation dans le cadre du projet de loi de finances 2016 ont suscité l'ire des députés. Les parlementaires ont dénoncé un «empiétement injustifié» de la part d'Abderrahmane Benkhalfa sur les prérogatives de l'Assemblée populaire nationale, seule institution habilitée constitutionnellement à décider du sort du projet de loi de finances. Le ministre des Finances a dû donc se rétracter et présenté mardi ses excuses officielles aux membres de l'APN, après avoir annoncé lors de son passage, au Forum de la Chaîne I de la Radio nationale, la hausse des prix de l'électricité et du carburant, tandis que le projet de loi est encore au stade de présentation et de débat au niveau de la commission des finances de l'APN. Habituellement, les propositions du gouvernement en matière de gestion des finances publiques sont annoncées avec précaution et soumises d'abord à l'aval du Parlement. Nommé dernièrement au poste de ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa a donné l'impression de ne pas avoir saisi le sens des pratiques usuelles dans ce domaine. Ces propos ont surpris plus d'un, en ce sens que les hausses proposées par l'Exécutif semblaient être en vigueur et que les parlementaires ont totalement adhéré à cette décision. Toutefois, la réaction des députés a été violente. Des membres de la commission des finances de l'APN auraient refusé de recevoir, mardi matin, le ministre de l'Energie, Salah Khebri, pour protester contre la façon de faire de Benkhelfa. Ils ont demandé des explications quant à l'empressement du ministre des Finances à adopter des mesures jugées impopulaires et antisociales. «Nous ne sommes pas une caisse d'enregistrement. Je pense que le ministre a fait une erreur de communication», a souligné en effet le député du FLN, Wahid Bouabdellah. La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), est allée, hier, dans le même sens. Louisa Hanoune a dénoncé l'article 71 de la nouvelle loi de finances qui permet au ministre des Finances de «tripoter» les budgets et considère que cette loi va instaurer «une politique d'austérité sauvage». Selon des sources parlementaires, deux députés du FLN, Mohamed Chérif Ould El Hocine et Lyes Saïdi ont saisi le ministre des Relations avec le Parlement, Tahar Khaoua, au sujet des déclarations du ministre des Finances. La réponse de Benkhalfa a été immédiate, a-t-on appris. Il aurait fait le déplacement à l'APN pour présenter ses excuses en écartant toute volonté d'intrusion dans les missions de l'Assemblée. Ce qui a permis au ministre de l'Energie de présenter le budget de son secteur, tout en répondant aux questions sur les intentions du gouvernement en matière de tarification sur les prix de l'énergie. Cette polémique renseigne à bien des égards que le passage du projet de loi de finances au niveau de l'APN ne se fera pas aussi facilement comme le souhaitait le gouvernement. Une forte opposition des parlementaires n'est pas du tout à écarter surtout pour les augmentations des prix de produits de large consommation (carburants, électricité, gaz…). Certes, le parti majoritaire ne peut pas bloquer un tel texte de loi proposé par un gouvernement composé essentiellement de membres du FLN, mais des amendements seront certainement introduits comme ce fut le cas pour le projet de loi de finances 2015. Le débat s'annonce d'ores et déjà houleux.