Alors que les observateurs étaient focalisés sur le désaccord entre le FLN et le RND ainsi que le 2e congrès qu'organisera l'Instance de suivie et de concertation de l'opposition (Isco), voilà une autre initiative qui a secoué la scène politique nationale. La surprenante sortie médiatique de 19 personnalités signataires d'une lettre demandant une audience au chef de l'Etat pour vérifier s'il était bien l'auteur des dernières décisions présidentielles a créé l'événement. Cette lettre des 19 a irrité au plus haut niveau de l'Etat. en témoignent les réactions en chaîne des partis gravitant autour du pouvoir. A commencer par le trio composant le cabinet gouvernemental, à savoir le FLN, le RND et le TAJ, qui sont tout de suite montés au créneau. D'une seule voix, ils tranchent que «personne n'a le droit» d'auditionner le président de la République. Le patron du FLN est allé jusqu'à prédire que «l'initiative sera vouée à l'échec». A entendre toutes ces réactions courroucées et les volées de bois vert envoyées aux «19», tout porte à croire que le président Bouteflika n'accédera pas à la demande d'audience. Ces derniers, faut-il le rappeler, doutent de la paternité des dernières décisions, soupçonnent des tierces personnes de prendre les décisions à la place de Bouteflika sans l'informer. Du coup ils (re)posent, la question lancinante et néanmoins controversée sur la santé du chef de l'Etat. A vrai dire, en demandant à rencontrer Bouteflika, les signataires de la lettre veulent vérifier ses capacités à gérer le pays. La réponse leur est livrée par les partis proches du pouvoir, en attendant une réaction officielle qui sera éventuellement faite aujourd'hui par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, en visite de travail à Blida. FLN, RND et TAJ font bloc «Ils disent que les décisions ne sont pas prises par le président et ils veulent l'auditionner. C'est une contradiction. Personne n'a le droit d'auditionner le président qui est élu jusqu'à 2019», a affirmé le patron du FLN, Amar Saâdani. «L'initiative sera vouée à l'échec», a-t-il tranché. «Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, est comptable devant le peuple souverain qui l'a investi et devant le peuple uniquement», a assuré le RND dans un communiqué signé par le secrétaire général du parti, également chef de cabinet de la présidence, Ahmed Ouyahia. Plus grave encore, le RND souligne que «la lettre met en doute la capacité du président Abdelaziz Bouteflika à diriger le pays. Elle l'accuse aussi de porter atteinte aux institutions de l'Etat et aux intérêts de l'Algérie». Et au RND de mettre les pieds dans le plat : «La lettre est signée par un certain nombre de personnes connues et que très peu de choses réunit. Cela dévoile l'identité de l'auteur de cette initiative, un chef de parti politique déchaîné depuis quelques mois déjà contre l'Etat et contre son premier dirigeant», lit-on dans le communiqué. L'allusion à Mme Louisa Hanoune y est évidente. Indésirables au palais… Le TAJ de Amar Ghoul a lui aussi exprimé son «rejet catégorique» de toute tentative visant à «remettre en cause» la crédibilité des institutions de l'Etat, en tête desquelles la Présidence de la République. Pour Ghoul et ses ouailles, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, assume «normalement» ses fonctions constitutionnelles. «Le président Bouteflika assume normalement ses fonctions constitutionnelles et suit personnellement tous les développements survenus sur les scènes nationale et internationale. Il dirige également les affaires du pays particulièrement à travers les réunions en Conseil des ministres, ses orientations et directives adressées au gouvernement et les audiences qu'il accorde aux chefs d'Etat et de gouvernement», commente le parti de Ghoul. Les signataires de la lettre savent dès lors à quoi s'en tenir : ils ne seront pas reçus par Bouteflika. Quelle suite donneront-ils alors à leur doléance ? Tout porte à croire, comme promis par la patronne du PT, Louisa Hanoune, que la démarche ne s'arrêtera pas en si bon chemin. D'autres actions seront entamées, a-t-elle affirmé, elle qui est accusée d'être à l'origine de la lettre. Lesquelles ? Les prochains jours nous le diront mais il est certain que la demande des «19» aura d'autres implications dans un climat politique pour le moins délétère.