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Lettre à Mohamed Mahboub Stambouli : «Te souviens-tu, Sidi ?»
Publié dans Le Temps d'Algérie le 06 - 01 - 2016

Te souviens-tu Sidi, lorsque tu me réveillais à deux heures, en pleine nuit, pour me demander de retrouver le poème que tu avais écrit en hommage à ton ami Boubegra ou celui que tu avais adressé à Cheikh El Khaldi ?
«Te souviens-tu, Sidi, lorsque tu me parlais justement de Cheikh Abdelkader El Khaldi. Tu m'avais dit qu'un jour, son gsasbi (joueur de flûte) t'avait demandé une qçida dans le but de se mettre à chanter. Cheikh El Khaldi qui avait surpris son musicien en train de lire ce poème, le lui enleva et lui dit : "Je chanterai cette qaçida ce lundi en direct à la radio" et la qaçida a été chantée par Cheikh El Khaldi.
Tu m'avais dis, Sidi, que quelques jours après, tu rencontrais le grand poète et lui demandais comment se fait- il qu'il avait décidé de baisser son niveau, lui le grand poète, en chantant en direct tes paroles et qu'il t'avait répondu : "Si cette qaçida ne m'avait pas touché au cœur, je ne l'aurai jamais chantée !".
Te souviens tu, Sidi, quand tu me parlais de Mohamed Bencheneb, cet érudit qui, un jour, alors qu'il venait dans un train de Médéa, une jeune française dit à ses parents : "Regardez le bicot", il acquiesça avant que la française n'eût le même jour une surprise.
A dix heures, elle se retrouva à l'université en face de l'homme portant toujours son burnous pour passer son examen d'oral à l'université. Cet homme au burnous, Mohamed Bencheneb, qui était doyen de la faculté de lettres posa trois questions à la jeune étudiante qui ne put répondre à aucune. Bencheneb regarda de face l'étudiante et lui lança : " Le bicot te donne un zéro !".
Le plagiat
Te souviens-tu, Sidi, quand tu me disais que les plus grands comédiens étaient tes amis Rachid Ksentini, Hassan Hassani et Badreddine Bouroubi ? Au sujet de Ksentini, tu m'avais appris qu'il avait fait partie d'un cirque américain durant quatre années et que toi, Boubegra et Tayeb Abou L'hassan aviez passé trois années ensemble dans les camps de concentration de Beni Messous, Tefechoun, Paul Cazelles et Bossuet. Parmi tes amis, il y avait aussi Himoud Brahimi, Said Bestandji qui a composé pour toi des centaines de chansons et bien d'autres notamment le luthier de Blida Mohamed Benaicha. Tu m'avais aussi dit que ton ami intime Bouroubi était un très grand comique et qu'il était le plus grand chanteur moderne des années 1940 aux côtés de Abderrahmane Aziz, sans compter, bien sûr, les chanteurs tels que Lili Boniche et Selim H'lali.
Au fait, concernant les chanteurs juifs, tu m'avais dit qu'il n'y avait pas de problèmes entre eux et les Arabes à l'époque et que chaque année, ces chanteurs t'invitaient, toi le musulman pratiquant et fils de muphti à leur zyara, dite Ennessim à Médéa.
Te souviens-tu, Sidi lorsque, après le passage d'un film à la télévision et après avoir remarqué que c'était ton scénario qu'on avait plagié en changeant seulement un petit passage à la fin, tu m'avais dit au sujet du plagiaire : " l'imbécile, il aurait dû laisser le scénario tel quel !".
Te souviens-tu, Sidi lorsqu'un jour tu avais reçu une lettre des droits d'auteur t'annonçant que la SACEM t'avait envoyé dix dinars ( soit un FF) pour le passage à la radio en France de la chanson Ya Laâdra, le grand succès de Chaou et que tu m'avais dit, c'est leur façon de me dire, voilà, on t'a volé !".
Te souviens-tu, Sidi, lorsque tu me parlais des chants patriotiques que tu avais écrit dont Min Djibalina et Nadani Messali Adjebtou Ennidae composée par Bestandji ?
Te souviens-tu, Sidi, lorsque, alité à cause de la maladie, tu m'avais dit : "normalement, moi je suis mort depuis 1957 durant les séances de torture, tout ce que je vis maintenant, c'est en plus".
Lagaillarde
Te souviens-tu, Sidi lorsque je t'avais demandé que gardes-tu comme mauvais souvenir de la révolution tu m'avais raconté deux histoires. La première lorsque le sanguinaire Laguaillarde t'avait pris en otage avec cinq autres algériens. Il avait égorgé les quatre premiers et, fatigué, il s'assit sur le corps du cinquième, passa sa langue sur le couteau plein de sang, te cracha sur le visage avant de quitter la salle. La deuxième, c'était lorsque à Mimeche, sur les hauteurs de Blida où on habitait, tu te trouvais au bord d'un puits assis à côté d'un traître que tu devais tuer sur ordre du FLN.
Au moment où le traître prenait son casse-coûte, arrivait de loin ton ami Badreddine Bouroubi et il ne fallait pas qu'il assiste à l'exécution. Rapidement, tu avais dis au harki regarde de l'autre côté et tu l'avais poussé dans le puits.
Avant l'arrivée de âmmi Noureddine (Bouroubi), tu avais jeté aussi le sandwitch dans le puits pour ne pas laisser de trace. Tu m'avais avoué : "à ce jour, j'entends la voix de ce traître qui criait lorsque je l'ai jeté dans le puits". Et bien sûr, tu avais accueilli ton ami Badreddine en riant comme d'habitude et n'avais raconté cette histoire absolument à personne sauf à moi, le plus petit de tes fils, ton ami et ton confident.
La couture
Te souviens-tu, Sidi, lorsque j'avais neuf ou dix ans, tu m'apprenais à coudre alors que mes pieds n'arrivaient que difficilement à la pédale de la machine Singer que je garde toujours. Tu m'avais dit que c'était un juif de Médéa qui t'avait appris l'art de la fetla (dorure et du soutache). En cette période, il y avait les enfants de tes amis de Bouzareah qui venaient prendre des cours d'arabe pour préparer leurs examens de 6e, brevet et bac et nous, on en profitait en suivant ces cours.
Te souviens-tu, Sidi, lorsque juste après le cessez-le-feu, tu avais été nommé directeur de l'école de Trab Lahmar à Blida et que, parallèlement aux cours que tu donnais, tu avais formé une troupe de musique et de théâtre avec tes élèves.
Le dernier jour
Te souviens-tu Sidi, de ces soirées quand tu me parlais de tes débuts dans le monde du théâtre et de la poésie ? Tu n'avais que 14 ans à Médéa lorsque tu avais appris par cœur le Coran. Un jour, Cheikh Seghir, le maître de la Meddersa d'El Kouttab te surprit sous l'ombre d'un arbre et prit la feuille sur laquelle tu étalais ton premier poème. Il t'avait dit : "tu te moques de moi Mahboub, tu écris un tel poème et tu viens chez moi prendre des cours de grammaire ? "avant d'ajouter : "dès aujourd'hui, c'est toi qui me remplacera en classe lorsque je m'absenterai."
Te souviens-tu, Sidi quand tu m'a parlais de la première fois que tu as joué dans une pièce de théâtre alors que tu n'avais que sept ans ?
Te souviens-tu quand tu me citais tous les membres de la troupe Hilal sport que tu avais créée en 1935 à Médéa et ceux de Reda Bey, la première troupe de jazz d'Algérie ?
Te souviens-tu de ce jour alors que tu étais en tournée à Berrouaguia, tu es allé chez le coiffeur et ce dernier rejouait ton rôle de guebli (bedouin).
Tu lui avais dit : "Tu joues ce rôle mieux que moi car moi je suis citadin. Toi tu le joues naturellement. Tu devrais créer une troupe.
Tu ne peux que réussir. Et l'homme a suivi ton conseil et a très bien réussi car il est devenu le grand Hassan Hassani. C'est lorsqu'il est venu chez nous à Bouzareah que j'ai appris qu'on avait aussi un lien familial avec cet artiste exceptionnel.
Te souviens-tu, Sidi, lorsque Khiti, ma mère, te disait : "Boubegra, c'est le meilleur de tes amis ?"
Te souviens-tu, Sidi quand tu me parlais de Iguerbouchene, cet autre ami dont des jaloux disaient de lui qu'il n'avait pas les mains d'un pianiste et qui t'avais demandé une fois, alors qu'il t'hébergeait dans sa villa de Beau fraisier à Bouzareah alors que tu étais recherché par la police française, si tu pouvais trouver un texte pour une musique qu'il avait composée depuis longtemps et que même des paroliers égyptiens et libanais n'avaient pas réussi à trouver.
Il t'a fait écouter cette musique sur son piano avant de partir à l'école normale où il était professeur. A son retour le soir, tu lui as remis le texte et il se mit au piano. Le grand Igor appela son épouse en s'écriant : "Antoinette, j'ai trouvé le génie !" Après avoir constaté sa satisfaction, tu lui as remis neuf autres chansons écrites le même jour sur le même rythme.
Oui, tu étais un vrai génie, Sidi puisque tu avais réussi à écrire dix chansons le même jour.
Te souviens-tu, Sidi lorsque tu m'avais dit, lorsqu'on voulait te rendre hommage : je n'ai que faire des médailles, le meilleur hommage qu'on puisse me rendre est de passer mes productions.
Te souviens-tu, Sidi quand tu m'avais dit que les gens vont connaître la valeur de mes productions cinquante ans après ma mort ?
Te souviens-tu, Sidi des trois poèmes que tu écrivais chaque jour ?
Te souviens-tu, Sidi ?.... Tu peux te souvenir de tout, sauf de ce 7 janvier 2000, lorsque tu as cessé d'écrire et de produire. Ce jour-là, c'est moi, ton fils, ton ami, ton confident qui ne l'oubliera jamais…


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