Vingt-sept ans sont déjà passés depuis la mort tragique du père de la Colline oubliée et monument de la culture universelle, Mouloud Mammeri. A cette occasion, la commune de Beni Yenni, à une quarantaine de kilomètres au sud de Tizi Ouzou, s'est réveillée, hier, pour rendre un humble hommage à son illustre «amusnaw» qui a tant donné à la cause identitaire tamazigh. La cérémonie a été rehaussée par la présence des deux grands chanteurs, Idir et Lounis Aït Menguellet, et des autorités locales, à leur tête, le sénateur Houcine Haroun, le P/APW et le P/APC de Beni Yenni. Comme à l'accoutumée, les représentants de l'APC de Beni Yenni, en collaboration avec l'Association culturelle Talwit ont procédé, hier, au traditionnel recueillement sur la tombe du père de la grammaire et de la culture amazigh, Da Lmulud At Mammer, érigée dans son village natal de Taourit Mimoun et au cours duquel ils ont déposé des gerbes de fleurs à sa mémoire, suivi par la lecture de la Fatiha et une minute de silence. Une grande foule a pris part à l'évènement pour rappeler le parcours exemplaire mené par cet écrivain, auteur de le Sommeil du Juste et qui a mis en valeur l'amazighité, en particulier, mais aussi la culture berbérophone, en général. Il faut savoir que trois gerbes de fleurs ont été déposées pour enjoliver la tombe de Da Lmulud. La première a été déposée par les deux monuments de la chanson kabyle, Idir et Aït Menguellet, qui se sont déplacés spécialement pour rendre un vibrant hommage à cet immortel écrivain et par le chef de daïra, Nacer Ben-Mouhoub et le président de l'APC, Smaïl Deghoul. La deuxième a été déposée par les représentants de la Direction de la culture de Tizi Ouzou, à leur tête la première responsable de cet établissement, Mme Nabila Goumeziane. Quant à la troisième, elle a été déposée par les représentants de l'APC d'Akfadou (wilaya de Béjaïa). Les présents ont été invités à écouter des témoignages sur le parcours du démocrate que fut Da Lmulud. Docteur Slimana, qui a été l'un des étudiants de Mouloud Mammeri, a affirmé que c'était un homme à multiples façades, puisqu'il était écrivain, linguiste, poète et anthropologue. Il était hautement scientifique, mais toujours modeste. Nous avions beaucoup appris de ses cours en linguistique amazigh et nous souhaitons à ce que les futures générations continuent sur le chemin tracé par ce chercheur. Certes, il est mort, mais ses œuvres et son parcours resteront gravés éternellement dans nos mémoires, a-t-il insisté sous les applaudissements de l'assistance.
La stèle de Da Lmulud sera inaugurée ultérieurement S'agissant de l'état d'avancement des procédures quant à la mise en place de la stèle commémorative à l'effigie de Mouloud Mammeri et qui sera implantée au lieudit Baba Hamza au chef-lieu de la région, le P/APC de Beni Yenni a annoncé que la stèle devait être inaugurée à l'occasion du 27e anniversaire de sa disparition, mais à cause des lenteurs administratives douanières, la date de l'inauguration de cette stèle a été reportée. «Je dirais que la stèle dont l'enveloppe allouée est de 1 milliard de centimes est finalisée et elle est au niveau du port d'Alger depuis le 26 décembre dernier. Cette stèle devait être importée au nom de l'association culturelle Talwit qui est à l'origine de cette louable initiative. Une procédure qui a été rejetée par l'administration douanière qui a exigé à ce que l'importation de stèle commémorative se fera au nom du ministère de la Culture et non pas au nom d'une association. Ce qui nous a incités à revoir la procédure administrative d'importation et qui a retardé la livraison de ce monument. Mais je rassure la population que cette inauguration se fera dans les plus brefs délais», a-t-il précisé. A souligner qu'un riche programme a été concocté par les organisateurs durant la journée d'hier. Un déjeuner et une animation artistique étaient à l'ordre du jour. Pour rappel, Mouloud Mammeri a écrit plusieurs œuvres romanesques et linguistiques berbères, ainsi que d'autres essais, recherches et recueils, entre autres, La Colline oubliée, L'Opium et le Bâton, La Traversée du désert, Le Sommeil du Juste, romans traduits dans plusieurs langues. Il est mort dans un accident de la route, le 26 février 1989, dans la wilaya de Aïn Defla, alors qu'il était de retour d'un colloque sur l'identité amazighe tenu au Maroc. Ils ont dit : Lounis Aït Menguellet : «Nous sommes là pour rendre hommage à un homme qui a tant donné pour la cause identitaire et qui nous a laissé un grand héritage à suivre. J'espère que les futures générations continueront à suivre le chemin qu'il a tracé. Pour nous, Da Lmulud reste un modèle, une lumière et un révolutionnaire pour tamazight. Personnellement, je suis venu pour rendre hommage à un ami. Que Dieu ait son âme et l'accueille en Son Vaste Paradis.» Idir : «Je suis venu pour saluer le parcours de ce guerrier qui a toujours utilisé sa plume pour faire valoir ses idées et magnifier sa langue amazigh et la poésie berbère. Je dirais que c'est un homme exceptionnel parce qu'il nous a préparé une grammaire, un vocabulaire et une écriture amazighe qui s'est révélée efficace. Ajoutez à cela toutes les tribulations qu'il a effectuées, en parcourant les différentes régions d'Algérie pour essayer de tirer une substance de la poésie de chacune d'entre-elles. C'est un écrivain dont on a peu, il n'a rien à envier aux littérateurs du nord de la Méditerranée.» Le sénateur Hocine Haroun :«Je n'ai jamais raté la date de festivités commémoratives rendues à Mouloud Mammeri. C'est avec un grand plaisir que je suis venu prendre part à cet évènement. Grâce à Da Lmulud que nous avons appris comment écrire tamazight. Le caractère tamamrit demeure le caractère officiel de l'usage de tamazight. Hélas, nous avons perdu cette icône de notre identité dont malheureusement il reste très peu de nos jours. Ce qu'a donné cet homme pour l'Algérie, pour la liberté et la démocratie est incommensurable. Personnellement, j'ai beaucoup appris de lui en langue française et aussi en tamazight.»