Dans un pays à la traîne de tout, il est des informations qui étonnent d'abord, avant de procurer un vague plaisir. Même si, les choses étant toujours au point où elles ne devraient pas être, ce petit plaisir est systématiquement tempéré par le doute, quand ce n'est pas carrément par l'incrédulité, c'est toujours bon à prendre, dans une Algérie où il ne se passe pas grand-chose. Tenez, la presse faisait état hier de l'arrestation d'un maître-chanteur en herbe du côté d'Aïn Defla. Un fait divers comme on en découvre tous les jours dans les journaux et les discussions du café de la gare ? Pas vraiment. D'abord, parce que la police met rarement la main sur les maîtres-chanteurs. Cela demande des enquêtes sérieuses qui ne sont pas forcément la priorité des services de sécurité, les maître-chanteurs sont toujours trop malins et les victimes ne portent pas forcément plainte. Où ils ont quelque chose de plus compromettant à cacher que l'objet du chantage où ils n'ont pas très confiance en l'efficacité de la police. Dans un cas, ils subissent en tentant de trouver eux-mêmes la solution. Dans l'autre, ils calculent avant d'opter pour l'issue qui leur en coûte le moins, pour s'en sortir avec un minimum de dégâts. Mais dans le dernier cas révélé à Aïn Defla, il n'est pas question d'un chantage ordinaire, notre maître-chanteur en herbe fait dans l'innovation. Manifestement «à jour» en matière de technologie de la communication, c'est en utilisant «l'outil informatique» comme arme du crime qu'il a contacté sa victime, avant de la harceler quotidiennement pour qu'elle mette la main à la poche sous peine de faire des révélations sur «certains aspects de sa vie privée», pour reprendre les termes de la justice locale qui l'a mis en détention préventive. Les réseaux sociaux, ça peut tout de même servir à autre chose qu'à publier ses photos de vacances, partager ses états d'âme du jour, s'exprimer librement, retrouver des amis perdus de vue ou se faire de nouvelles connaissances. Quand on est dans l'innovation, il faut innover en tout, n'est-ce pas ? Surtout là où c'est facile et ça peut rapporter gros, comme dans la pub pour le loto. C'est même dans ce «secteur» là que les Algériens ont été les plus performants, en matière de «compétences» informatiques. Les réseaux sociaux sont peuplés par une armée de pirates, l'expression politique et l'expression tout court sont squattées par une meute d'anonymes qui polluent le paysage et obstruent la perspective, le commerce on line pullule d'escrocs et les hackers sont élevés au rang de héros nationaux. Encore heureux que les maître-chanteurs, on n'entend pas beaucoup en parler. Mais en entendre parler, il faut qu'ils soient débusqués, pour celui d'Aïn Defla. Il serait étonnant qu'il soit si seul. Dans la lutte contre la cybercriminalité aussi, on connaît nos performances. Par Slimane Laouari Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.