Les députés des partis de l'opposition doutent de la capacité du nouveau Conseil national des droits de l'homme (CNDH) de mettre fin aux violations des droits humains en Algérie. Le projet de loi fixant la composition et les modalités de désignation des membres de ce Conseil ainsi que les règles relatives à son organisation et son fonctionnement, présenté hier à l'APN par le ministre de la Justice, Tayeb Louh, a été une occasion pour ces députés de formuler leurs critiques et leurs craintes. «Ce projet est le résultat des pseudo-réformes politiques. C'est une photocopie de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'homme avec quelques maquillages», a lancé Meriem Deradji, députée du Front pour la justice et le développement (FJD). Elle a ajouté que les droits de l'homme connaissent une régression en Algérie ces dernières années, dénonçant les atteintes à la liberté de la presse, à la liberté d'expression et les pressions exercées sur certains journaux. Ce à quoi le président de l'APN, Mohamed Larbi Ould Khelifa, a répondu à chaud : «Personne n'empêche personne de s'exprimer. La preuve ? Vous avez parlé en toute liberté», a-t-il répliqué. Il faut dire que le boycott du FFS qui a décidé de bouder tous les projets de loi découlant de la nouvelle constitution a laissé les islamistes seuls opposants dans une Assemblée, comme de coutume, presque vide. Naâmane Laouer, député du MSP et chef du groupe parlementaire de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV), a salué le fait que le CNDH soit doté de larges prérogatives. Mais il a exprimé des doutes quant à sa capacité de redresser la barre de la situation des droits de l'homme dans le pays. «La réalité du terrain est loin de ce que disent les textes de loi», a-t-il d'emblée souligné dans son intervention. Il s'interroge si le projet de loi servira à mettre fin à l'interdiction des manifestations pacifiques à Alger et la répression de certaines organisations et associations. Il se demande aussi si le nouveau Conseil contribuera à relancer les enquêtes sur les disparitions des années 1990 et à faire agréer les partis politiques et associations à qui on refuse l'agrément. Atteindre la catégorie A de l'ONU Un député du FLN, Layas Saadi, qui a salué le texte, a voulu critiquer la situation des droits de l'homme, en s'attaquant à Farouk Ksentini, président de la CNCPPDH, en raison de la position prise par ce dernier en faveur du retour d'Abdelaziz Belkhadem à la tête du FLN. «Il y a plusieurs problèmes dans le domaine des droits de l'homme en Algérie. Farouk Ksentini doit faire le bilan de la Commission», a-t-il lancé en l'accusant d'atteinte aux droits de l'homme. Le président de l'APN n'est pas resté insensible à cette intervention. Il appellera les intervenants à s'astreindre à l'ordre du jour qui est le projet de loi sur le CNDH. Lors de la présentation du projet, le ministre de la Justice, Tayeb Louh, n'est pas passé par trente-six chemins pour expliquer la philosophie générale du texte. Son objectif majeur consiste à soigner l'image du pays à l'international, satisfaire les exigences onusiennes dans le domaine des droits de l'homme avec, pour finalité, se hisser à la catégorie A du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qui avait dégradé l'Algérie en 2009 à la catégorie B. Il a souligné que le projet de loi reflète la volonté politique du pays de promouvoir les droits de l'homme et de se soumettre aux standards internationaux en la matière. Pour ce faire, il faudrait répondre à certaines exigences car le mécanisme onusien évalue les institutions nationales des droits de l'homme selon certains critères. Parmi eux, la création de l'instance par voie de loi et non pas par décret, son autonomie financière et administrative et la transparence de la désignation de ses membres, a détaillé le ministre. En 2009, avec la création de la Commission de Ksentini par ordonnance, l'Algérie a été déclassée par le Conseil onusien qui évalue les situations des droits de l'homme dans tous les pays membres de l'ONU. Louh précise que le CNDH respecte toutes les conditions et répond à toutes les normes internationales.