Pour sa première visite à l'étranger depuis sa nomination, le chef du gouvernement tunisien, Youssef Chahed, a choisi l'Algérie. Un allié «stratégique» non seulement du point de vue économique mais aussi sur tout ce qui a trait aux questions sécuritaires auxquelles la Tunisie ne peut à elle seule y faire face. D'ailleurs, il l'avoue lui-même. Après avoir affirmé hier à son arrivée à Alger que son pays œuvrait à la préservation du caractère «exceptionnel» des relations algéro-tunisiennes, dont il souhaite préserver le niveau, le chef du gouvernement tunisien qui est «porteur d'une lettre du président tunisien, Béji Caïd Essebsi, à son frère le président Abdelaziz Bouteflika», a expliqué que «son choix d'effectuer sa première visite à l'étranger en tant que chef du gouvernement en Algérie vise à souligner l'importance de ces relations». M. Chahed qui a été reçu par le président Bouteflika, signe que cette visite revêt un cahet particulier, n'a pas omis d'évoquer l'aspect sécuritaire et la lutte contre le terrorisme. Il souhaite donc relancer davantage ces relations, non seulement la coopération économique et commerciale mais aussi «dans le domaine sécuritaire», a-t-il tenu à préciser, car c'est aussi «la volonté des deux peuples frères, algérien et tunisien, qui ont en partage une histoire commune, des luttes communes et un avenir commun». Du côté algérien, l'on souhaite également que cette visite soit «l'occasion d'aborder un certain nombre de questions d'intérêt commun liées à l'évolution de la situation sous-régionale et ayant notamment trait à la coordination politique et sécuritaire ainsi qu'au développement transfrontalier», comme l'a précisé un communiqué du Premier ministère à la veille de cette visite. Alger, qui a de tout temps considéré que sa paix et sa sécurité dépendaient aussi et grandement de la paix et de la sécurité de ses voisins, a toujours coopéré étroitement avec la Tunisie dans ce domaine, en lui «filant», entre autres, des informations sur le mouvement des terroristes qui infestent son territoire, notamment près de la frontière algérienne aux monts Chaâmbi, fief de Daech. La Tunisie qui ne s'est dotée que tout récemment d'une loi antiterroriste, compte, selon les chiffres de l'ONU, pas moins de 7000 terroristes qui ont rejoint les rangs de Daech, dont 1000 seraient basés en Libye voisine, un pays qui se tourne souvent aussi vers Alger dans l'espoir de relancer le dialogue politique, actuellement au point mort, pour des raisons souvent pas du tout «objectives». Les Occidentaux qui disent soutenir le processus de paix en Libye, sont des soutiens avérés du général Haftar, opposé au gouvernement d'El Sarraj qui souhaite contrôler l'armée… et les puits de pétrole. El Sarraj s'était tout récemment aussi rendu à Alger alors que se tenait à Paris une réunion sur la Libye, en l'absence justement du pays concerné et de la Tunisie qui est un pays voisin. Un «flop» qui n'a abouti à aucune décision, confortant ainsi la position d'Alger qui plaide pour une solution politique. C'est ce que l'Algérie a fait avec le Mali par exemple en réussissant à faire signer un accord de paix au gouvernement et aux groupes rebelles du Nord. Ces pays voisins savent pertinemment qu'Alger est un passage incontournable vers la paix et la stabilité. Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération international, Ramtane Lamamra, qui a assisté à l'entretien du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, avec son homologue tunisien, n'avait-il pas soutenu à Washington, en 2015, que l'Algérie est un pays exportateur de la paix et de la sécurité ? La Tunisie, tout comme la Libye ou le Mali ont compris le message.