Le printemps islamiste en Algérie ne dure pas longtemps. C'est une saison furtive qui ne réchauffe même pas les cœurs des «frères» que le feu de la fitna ravage chaque jour un peu plus. Pourtant, certains crédules ont vite fait de bénir la sainte alliance entre le parti Adala, d'Abdallah Djaballah, et Ennahda, de Ghouini, scellée au siège de la Foire internationale d'Alger… L'offre publique de vente aux enchères de l'idéal islamiste algérien a tourné court. Au centre des expositions des Pins maritimes, il y avait une foule dense et variée de la galaxie islamiste venue écouter le serment du cheikh Djaballah. Mais au final, ses appels aux condisciples de revenir au droit chemin de la réconciliation de cette mouvance, se sont perdus dans le silence lugubre de cette agora dédiée aux commerce et au négoce. Abou Djerra Soltani a, certes ,pointé son nez et même béni la sainte alliance. Mais c'était juste pour souligner sa différence d'approche et renvoyer Djaballah à son rêve de porte-étendard de l'islamisme politique algérien. Lui et son MSP refusent de donner la baraka à ce produit politique à la sauce islamiste devant naître d'un mariage forcé. De même que le Front du changement de Menasra et le mouvement El Binaâ El Watani (construction) d'Ahmed Dane ont refusé la planche du salut que leur tendait Djaballah et ses ouailles. La harangue des Pins maritimes, censée attirer des adeptes pour réenchanter l'idéal islamiste en Algérie, a tourné en un spectacle affligeant où Djaballah jouait l'imam face à une assistance visiblement pas très fidèle. C'aurait pu être un grand moment de rassemblement des «frères» désuni pour attaquer en rangs serrés les élections législatives et plus si affinités. Mais il est écrit quelque part que la galaxie islamiste en Algérie, fortement éclatée, n'a pas fini de manger son pain noir. Du haut de son «mihrab» le cheikh Djaballah a dû comprendre que la malédiction qui frappe sa communauté est beaucoup plus dévastatrice qu'il ne le pensait. Et pour cause, la lutte fratricide que se livrent ces derniers jours, et publiquement, Abderrazak Makri et Abou Djerra Soltani, souligne un peu plus la fracture irrémédiable d'un courant politique qui a perdu ses repères. Pendant qu'Abou Djerra Soltani prenait un thé à la menthe avec Djamel Ould Abbés, patron du FLN, Abderrazak Makri enrage sur cette énième sortie des rangs d'un puissant opposant à sa ligne politique qu'il a du mal à apprivoiser. A quelques mois des élections législatives, on n'est pas loin d'un schisme au sein du MSP. La guerre des positions est déclarée par le noyau participationniste du parti des Frères musulmans incarné par le tandem Abou Djerra-Saidi. Ils veulent forcer la main à l'irréductible Makri qui souhaite poursuivre aussi longtemps que possible la cure d'opposition du mouvement conçu et destiné à servir d'alibi islamiste au pouvoir. Ce dernier aura réussi, faut-il l'admettre, et avec maestria, à faire voler en éclat un courant politique pourtant très prégnant dans la société. L'entreprise de dévitalisation de cette obédience entreprise depuis des années semble avoir donné ses fruits : l'islamisme politique en Algérie, en tant qu'alternative, est peut-être définitivement disqualifié. A rebrousse-poil de ce qui se vit dans la sphère arabo-musulmane, l'Algérie est en passe de réussir sa bataille contre un courant lié et relié d'une manière ou d'un autre à des chapelles étrangères. C'est là l'un des rares «exploits» à mettre à l'actif du système algérien qui a produit des monstres avant de finir par les dompter.