Encore une fois, l'opposition se trouve à la croisée des chemins et navigue à vue après avoir donné l'impression, trois ans durant, d'avoir enfin atteint un stade de maturité qui lui permettrait de faire le poids face au pouvoir. Que ce soit dans les institutions élues ou en dehors du cadre législatif, les partis politiques - de toutes les mouvances - opposés au pouvoir font chacun cavalier seul. Certes, rien ne les oblige à unir leurs visions et positions ou à partager un projet quelconque. Mais force est de constater que même ceux qui, il y a quelques mois, se vantaient d'avoir réalisé un saut qualitatif en se rassemblant autour de l'ICSO, se trouvent, pour oser le mot, en situation de guerre «fratricide». Aujourd'hui, bien que ce soit pour la forme, l'opposition structurée au sein de l'Assemblée nationale aurait pu unir sa voix en adoptant une position commune lors du vote du plan d'action du gouvernement qui passera par la «force» de la majorité parlementaire. Hélas, il n'y a pas eu de concertation dans ce sens et chacun suit finalement son propre chemin. Certains comme le RCD et probablement le MSP vont rejeter la feuille de route du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, d'autres vont s'abstenir, à l'image du PT, tandis qu'un autre groupe pourrait opter pour le boycott de la séance de vote. Sur le terrain, la situation n'est pas meilleure. Bien au contraire, elle renvoie parfaitement l'image de la déchirure et la perte de vitesse. Outre le FFS et le PT qui ne se sont jamais inscrits dans la démarche concertée de la majorité de ces partis, les membres de la désormais «défunte» Instance de concertation et de suivi de l'opposition (ICSO) se dénigrent et se renvoient la balle en public. Dernière sortie en date, le communiqué de Jil Jadid, à l'issue de son Conseil national tenu le 16 septembre, où il tirait à boulets rouges sur ses ex-partenaires. «Ces partis qui n'avaient de cesse de dénoncer à très haute voix la mascarade des élections ont préféré briser une solidarité naissante contre le système et enterrer les revendications communes pour obtenir une poignée de sièges», écrivait le parti de Djilali Soufiane, reprochant au RCD, au MSP et autres de n'avoir pas soutenu son appel à l'application de l'article 102 de la Constitution, portant «déclaration d'empêchement du président de la République». «Après avoir négocié et signé des communiqués de l'ICSO consignant la constatation de la vacance du pouvoir et réclamant des élections présidentielles anticipées, ils se sont délestés, un à un, de cet engagement devenu subitement trop lourd pour eux», avait-on ajouté de même source. Manque d'engagement Avant lui, c'était Mohcine Belabbas, qui avait fait le procès de ce conglomérat et de ses membres. Le président du RCD qui intervenait le 17 septembre dernier à l'ouverture du camp des jeunes de son parti, organisé à Béjaïa, a accusé les autres partis d'avoir manqué d'engagement pour renverser les rapports de force contre le pouvoir. «Nous n'avons pas été suivis par les autres acteurs de notre regroupement dans notre démarche de mobilisation pacifique», a déclaré Mohcine Belabbas. C'est dire que l'heure est plutôt à la division et non à l'union. Un constat qui prédit un avenir sombre pour l'opposition et son rôle dans la vie politique nationale, surtout qu'en ces temps de crise, il serait plus crédible pour les partis la composant de présenter au peuple algérien «un projet alternatif» à ce que compte faire le pouvoir, à travers l'Exécutif dirigé par Ahmed Ouyahia. Or, à suivre le parcours et le discours des formations politiques dites de l'opposition ces derniers jours, on comprend bien qu'il y a déficit en matière de réflexion et de capacité à dépasser les divergences et les intérêts. Si ce n'est un avenir sombre donc, quel avenir reste-t-il à l'opposition ? Certainement pas meilleur que ce qu'elle est en train de vivre actuellement. Trois ans après l'expérience de l'ICSO, née au lendemain de la présidentielle de 2014, montre ses limites et… échoue. Sur ses décombres, il est difficile de construire ne serait-ce qu'un accord temporaire sur une question.