Le marché pétrolier est pris dans une vague de pessimisme entourant la nature de la reprise économique. Les prix ont ouvert, hier, sur une nouvelle baisse en début d'échanges européens menaçant de repasser en dessous des 60 dollars le baril, seuil atteint la veille pour la première fois depuis fin mai dans un marché s'inquiétant de la faiblesse de la demande. Le redressement du prix du baril entamé il y a quatre mois semble ralentir depuis la mi-juin. Le baril de Brent de la mer du Nord (livraison en août) cédait 72 cents à 60,38 dollars, par rapport à la clôture de la veille, sur l'InterContinental Exchange (ICE), après un plongeon à 59,76 dollars. A New York le Light Sweet Crude s'échangeait à 59,60 dollars après être tombé à 59,25 dollars, un plus bas depuis le 26 mai. Le baril a connu une séance hésitante, jeudi, tombant jusque 59,25 dollars en cours d'échanges. C'est la première fois depuis le 26 mai qu'il passe sous le seuil de 60 dollars. Il enregistre ainsi une chute de plus de 13 dollars par rapport à ses sommets de la semaine dernière. Ce mouvement de prix pourrait être interprété comme un recentrage sur les fondamentaux baissiers, combinés avec des inquiétudes plus fortes sur les perspectives pour l'économie mondiale qui pourrait devoir passer par une régulation plus forte, commentaient les analystes. La demande mondiale reculera encore La demande mondiale connaîtra, quant à elle, selon le rapport mensuel publié hier par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), un net recul en 2009 (-2,9%), mais prédit un rebond en 2010 (+1,7%), porté par le retour attendu de l'activité économique. L'organisation internationale, qui défend les intérêts des pays industrialisés, estime que la consommation de brut noir va atteindre 83,8 millions de barils par jour (mbj) cette année, en baisse de 2,5 mbj par rapport à 2008. «La demande d'essence en Amérique du Nord est nettement plus faible que ce nous avions prévu», note l'agence, mettant en avant des «inquiétudes sur le rythme de la reprise économique». A l'inverse, selon le rapport, la demande pétrolière en Chine «dépasse les attentes», mais l'importance de ce pays sur la demande globale de brut ne doit pas être «surestimée», «du moins pour l'instant». L'Agence manifeste par ailleurs son incertitude quant à un rebond de la demande au deuxième semestre 2009 qui a été, selon elle, «annoncé un peu partout». Pour 2010, l'AIE prévoit un tableau «radicalement différent», avec une remontée de la demande de +1,7% pour s'établir à 85,2 mbj, en hausse de 1,4 mbj par rapport à 2009, au moment où la plupart des Etats devraient émerger du «plus profond ralentissement économique» en cinquante ans. La demande resterait toutefois «inférieure» aux niveaux atteints en 2008, prévient l'Agence, qui insiste sur la fragilité de ses prévisions, fondées sur une croissance mondiale en hausse de 1,8% l'année prochaine. L'AIE n'a pas pu prendre en compte la nouvelle projection du FMI publiée mercredi qui s'attend désormais à une croissance plus forte de plus de 2,5%. Dans ses statistiques hebdomadaires, publiées mercredi, le département américain à l'Energie avait de son côté fait état d'une nouvelle progression spectaculaire des stocks de produits pétroliers la semaine dernière aux Etats-Unis. De leur côté, les dirigeants du G8 réunis mercredi à L'Aquila (Italie), ont implicitement approuvé l'objectif de 75 dollars par baril affiché depuis l'été 2008 par l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Ils ont convenu qu'un juste prix du pétrole devait se situer entre 70 et 80 dollars le baril, a affirmé mercredi une porte-parole du président russe Dmitri Medvedev. Le G8 agira contre la spéculation sur les prix Le G8, selon le Premier ministre italien, Silvio Berlusconi, compte agir contre la spéculation internationale, notamment sur les prix du pétrole ainsi que certaines denrées alimentaires. S'exprimant hier à l'issue du sommet du G8 dont la présidence est assurée par l'Italie, il a relevé la «déception sur le fait que les spéculations internationales ont repris, en particulier sur les prix du pétrole, mais aussi sur ceux du soja, du blé, du riz». Le Premier ministre italien a cité comme exemple la volatilité des prix du pétrole, qui sont repassés cette semaine sous la barre des 60 dollars après avoir dépassé les 73 dollars la semaine dernière. Il a expliqué que les leaders du G8 avaient parlé de ce problème avec le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) et leur avaient «donné mandat» pour qu'ils suggèrent une initiative.