L'artisanat est défini comme toute création, transformation, restauration d'art, entretien… à dominante manuelle exercée à titre principal, permanent ou sous une forme sédentaire, ambulante ou foraine. Depuis les temps les plus reculés, l'artisanat n'a pas été seulement synonyme d'un métier ou de sources de revenus, il a toujours été et continue à être inhérent aux modes de vie même des populations. Ses diverses manifestations, notamment par la production d'objets exécutés et décorés à la main, est un véritable héritage qu'il faut sauvegarder à tout prix. L'artisanat que d'aucuns considèrent aujourd'hui comme un secteur qui se meurt possède une originalité propre. C'est un art précieux qui s'exprime par la poterie, la céramique, la sculpture, la dentelle, la broderie, la dinanderie, la maroquinerie, la bijouterie, le tissage, etc. C'est justement pour redorer le blason de cette activité que se tiennent les journées portes ouvertes sur l'artisanat à la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, organisée à l'occasion de la Journée nationale de l'artisanat qui coïncide avec le 9 novembre de chaque année. Cette manifestation, qui se poursuivra jusqu'au 13 du mois en cours, est à mettre à l'actif de la direction de la PME et de l'artisanat ainsi que de la chambre de l'artisanat et des métiers de Tizi Ouzou. De nombreux participants intervenant dans différents domaines exposent leurs produits depuis avant-hier à la grande salle d'exposition de la maison de la culture. L'expo-vente a déjà drainé une foule nombreuse depuis le premier jour, au grand bonheur des artisans eux-mêmes. Constat : contrairement à ce qui se dit sur cet art aux multiples manifestations, l'artisanat intéresse toujours. Les organisateurs visent à travers cette manifestation, la troisième du genre depuis le début de l'année dans la ville des Genêts, à mettre en œuvre les mesures de promotion et de soutien des activités de l'artisanat et évaluer son impact, de soutenir et d'animer les actions et l'organisation de groupements professionnels, d'associations et espaces intermédiaires intervenant dans le domaine ainsi que d'encadrer et d'animer les manifestations économiques pour la promotion de l'artisanat et des métiers.
Les artisans retrouvent le sourire Comme à chaque manifestation du genre, les artisans retrouvent un tant soit peu le sourire, du moins le temps que durent les salons et autres expositions qui leur permettent d'écouler leurs produits, eux qui par moments attendent des mois et des mois pour se manifester à cause de tous les aléas auxquels est confrontée cette activité. Ainsi, des produits de bijouterie, de dinanderie, de poterie, de vannerie, de tapisserie… sont exposés au hall d'exposition. Les visiteurs y affluent par centaines et les produits s'achètent quand même tant que les prix sont «cassés». «Avant, c'étaient les acheteurs qui venaient à nous, maintenant les choses ont changé et c'est à nous d'aller vers eux pour écouler nos produits», nous dira cette femme d'Aït Hichem qui étale fièrement de jolis tapis de différentes dimensions, ornés de différents motifs qui sont un langage de signes comme ceux qu'on retrouve sur la poterie de Maâtkas. Tantôt ces signes symbolisent la virilité, tantôt la féminité et la fertilité.
Un carrefour d'échange d'expériences Cette manifestation se veut aussi un véritable carrefour d'échanges d'expériences entre les artisans qui n'ont pas caché leur satisfaction. En effet, cette manifestation est conçue, à l'instar des précédentes, comme une manière de redonner un peu d'espoir aux artisans et aux façonniers qui voient leurs activités dépérir au fil des années. Considéré comme un patrimoine à sauvegarder et à revaloriser, le secteur de l'artisanat est un vecteur de développement local et un secteur créateur d'emplois, pour peu que les pouvoirs publics daignent lui redonner la place qui était sienne. S'il est vrai que les fulgurants développements technologiques avaient donné presque le coup de grâce à l'artisanat, il occupe quand même une place prépondérante, car étant le gagne-pain de plusieurs familles, notamment dans certaines régions de Kabylie, connue pour ses produits de bijouterie (Ath Yenni), la tapisserie (Aït Hichem), la poterie (Maâtkas)…
Les artisans face à leurs tourments La cherté, voire la rareté de la matière première, comme le corail pour la bijouterie, le manque de perspectives, le déclin de l'activité artisanale face aux développements technologiques a fait que les jeunes tournent le dos à cette activité ancestrale, puis les problèmes liés à la commercialisation sont autant de facteurs qui font que la situation est des plus difficiles. Pour la bijouterie par exemple, seuls 24 artisans ont bénéficié d'une aide de l'Etat de 10 millions de centimes chacun, à travers toute la wilaya de Tizi Ouzou. Les bénéficiaires estiment que cette aide demeure insignifiante, vu les problèmes qu'ils rencontrent dans l'exercice de leur métier. Du côté des responsables du secteur, on estime que les artisans ne se manifestent pas pour fournir les dossiers nécessaires afin d'obtenir ces aides. Quoi qu'il en soit, une aide est toujours la bienvenue. Elle peut même booster le moral des artisans. D'autres font face à des aléas d'une autre nature. C'est le cas de ces deux jeunes filles originaires de Sid Ali Bounab, qui exposent des produits de poterie qu'elles façonnent elles-mêmes. Aller chercher en des lieux isolés la matière nécessaire (argile, ocre…) n'est pas une mince affaire. L'insécurité ambiante qui règne dans certaines localités fait que les femmes surtout, qui ont l'apanage de cette activité en Kabylie, se voient dans l'obligation de se résigner. Aussi, le secteur connaît une certaine crise qui a surgi à cause du manque d'organisation et l'absence de tout travail de concertation avec les autorités. Ajoutez à cela les problèmes liés à la commercialisation et aux difficultés liées à l'obtention de crédits bancaires. L'ensemble de ces facteurs risque de donner le coup de grâce à l'artisanat en général. Des mesures doivent êtres prises pour aider les artisans à sortit de leur cocon. Les produits de l'artisanat kabyle, qui sont à la fois un symbole fort de la région et une culture bien ancienne, peuvent constituer un gisement économique et booster d'autres secteurs tels que le tourisme.