Pour éviter l'effondrement du marché gazier, les pays producteurs et exportateurs doivent coordonner leurs actions pour obtenir des prix acceptables. Actuellement, «le prix est très bas», s'est inquiété Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines. Intervenant hier sur les ondes de la Chaîne III, il a interpellé les pays producteurs du gaz à mettre une stratégie pour obtenir des «prix justes». Il a regretté cependant l'absence d'échanges d'informations entre les pays membres du forum du gaz, qui compte 15 pays producteurs, alors que les contrats de ce même forum le prévoient. Sachant que les contrats de vente sont frappés de confidentialité, «les pays producteurs de gaz ne fournissent pas d'informations sur les prix conclus dans les contrats de vente signés à long terme». Il s'agirait, poursuit le ministre, «de voir comment échanger ces informations, coopérer et préparer le long terme . S'il est question de «réduire le gaz disponible sur le marché international, il faut une meilleure cohérence entre les pays producteurs afin d'obtenir une concertation au sujet des plans de développement». Et ce pour obtenir un volume qui sera disponible sur le marché international «tout juste suffisant pour permettre un prix raisonnable et juste pour ces pays producteurs». Le ministre justifie le recul des prix du gaz d'une manière substantielle par le développement d'une nouvelle technologie aux Etats-Unis qui a permis à ce pays une autosatisfaction en gaz. «Le gaz exporté auparavant aux USA est en train de se réorienter vers l'Europe et l'Asie, ce qui a eu un impact sur les prix au niveau du marché spot.» Certes, les contrats à long terme n'ont pas décliné, mais ce n'est pas autant rassurant, pense Chakib Khelil, relevant l'étroite relation existant entre le prix du pétrole et celui du gaz du fait que le prix du gaz représente le 10e du prix du pétrole. Il faudra à présent diviser le prix du pétrole par 15 voire par 20 pour obtenir le prix du gaz. Revenant sur le rôle du forum des pays producteurs et exportateurs du gaz, créé en Russie et localisé par la suite à Doha, il a expliqué qu'il ne s'agit pas d'«une organisation, mais devait juste fonctionner comme l'Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep), afin de défendre les intérêts économiques des pays membres malgré leurs divergences politiques», dans le but d'obtenir un meilleur prix du gaz. Evoquant la baisse de la production pétrolière, conformément aux quotas décidés par l'Opep, il a émis le souhait de stabiliser cette production à 1,4 million de barils par jour, similaire à celui précédent la décision de l'Opep, prise à Oran en décembre 2008 lorsque l'Algérie a réduit sa production de 200 000 barils/jour. Ramenée à un volume de 1,2 million barils/jour, l'effort de réduction de la production avait pour but de stabiliser le marché, en réponse aux engagements internationaux de l'Opep qui a décidé de réduire la production de 4,2 millions de barils/jour en décembre 2008. Les réductions de production conduisent à l'augmentation des prix, ce qui signifie, poursuit le ministre, «les 15% perdus en volume de production» ont conduit à une hausse des prix, qui sont passés de 30 dollars au cours de 2008 à 80 dollars actuellement. Le prix du baril aurait pu chuter à 20 dollars «Si l'Opep n'avait pas décidé une réduction, les prix actuels du pétrole seraient peut-être à moins de 20 dollars», a-t-il relevé. Le quota actuel de 1,2 million baril/jour sera maintenu jusqu'à une nouvelle décision de l'organisation relative à une augmentation de la production. Une fois les conditions du marché international «plus intéressantes» «nous pourrons augmenter notre production à 1,4 million barils/jour». Les conditions économiques en question ont trait au taux du dollar, à un recul de la spéculation. A propos des efforts de l'Algérie axés sur l'augmentation des capacités de production du gaz, Chakib Khelil a relevé que les découvertes faites jusque-là sont plus importantes pour le gaz. Donc le développement des capacités est «normal» pour satisfaire les besoins du marché national et les efforts d'exportation puisque «nous allons passer de 62 milliards m3/an à 85 milliards m3/an vers 2013 ou 2014», a-t-il précisé. Quant à la stratégie de développement des énergies nouvelles et renouvelables qui porte sur la diversification de ces sources pour ne plus continuer à dépendre uniquement du pétrole et du gaz, il a soutenu que «la rentabilité des projets est à attendre à long terme». Pour l'énergie nucléaire, le projet de loi est en discussion au niveau du gouvernement. «Nous renforçons nos capacités au niveau des réacteurs de recherche, de capacités en ressources humaines avec la création de l'institut sur le génie nucléaire.» Lequel institut s'occupera notamment de la formation du personnel chargé du suivi, de la conception et l'exploitation des centrales nucléaires, dont la première est prévue pour 2020, avant d'être suivie par d'autres cinq ans. Une action de mise à niveau des centres de recherche nucléaire est déjà engagée, a-t-il noté. Sans omettre la réorganisation de cette activité, il citera aussi la coopération dans ce domaine avec la France, l'Argentine et la Chine, en plus des discutions engagées avec la Russie. Concernant l'investissement, le ministère de l'Energie compte d'abord sur les investissements des entreprises, à l'image de ceux réalisés dans la production de l'électricité à base de gaz ou de pétrole. Le ministre s'attend par contre à un soutien de l'Etat pour supporter les surcoûts induits par l'investissement dans les énergies renouvelables qui sont désormais plus chères. Tout en rappelant la création du fonds des énergies renouvelables, le ministre a indiqué que la réalisation d'une centrale nucléaire coûtera deux fois plus cher qu'une centrale électrique. La taxe carbone réduira la consommation de pétrole A propos des craintes exprimées par les pays producteurs de pétrole au sujet d'une éventuelle nouvelle taxation sur les hydrocarbures qui risque d'être décidée lors de la rencontre sur le climat qui se tiendra en décembre à Copenhague, Chakib Khelil a même redouté que les pays producteurs de pétrole soient classés dans le même groupe que les pays «grands pollueurs» de l'environnement. La taxe carbone, déjà appliquée par la France, pourrait être adoptée et aura un impact sur la demande en pétrole et en gaz. Le fait d'imposer une taxe signifie, selon Chakib Khelil, une hausse des prix, ce qui engendrera une chute de la consommation. Pour défendre leurs intérêts, les pays producteurs de pétrole doivent coordonner leurs actions et se concerter pour agir lors de la conférence de Copenhague. L'avenir de l'utilisation du pétrole ne sera plus brillant si les deux mesures venaient à être retenues, a-t-il prévenu.