Né et élevé dans une famille à tradition footballistique, il aurait aimé goûter au plaisir de l'instant. Comme des millions d'Algériens, il n'aurait pas résisté à l'envie de fêter les Verts. Avec un œil de connaisseur, il aurait commenté à satiété leur historique aventure mondialiste. L'incertitude du destin en a voulu autrement. Mohamed Haddad, le beau gosse dont la quotidienneté se conjuguait au football, a tiré définitivement «sa révérence». Victime d'un cancer, l'homme s'est éteint la semaine dernière dans un hôpital parisien. Fort de son vécu de sportif, Mohamed, 52 ans, avait lutté, une année durant, contre la maladie. De thérapie en thérapie, il n'avait cessé, avec le concours des siens et de l'équipe médicale, de résister au mal irrémédiable. En vain. «La veille de sa disparition, j'ai pu prendre la mesure de son courage et de sa sérénité face à une maladie qu'il savait intraitable», raconte, au Temps d'Algérie, Noureddine Youb, cadre du sport à la retraite et ancien membre du bureau fédéral de la FAF. De passage à Paris, Youb était à son chevet en compagnie de Nacer Guedioura, l'ancien sociétaire de l'EN et de l'USM Alger. «Connaissant son amour et sa passion débordante pour le foot, je suis persuadé qu'il aurait vibré pour l'équipe nationale à l'occasion de sa double confrontation contre l'Egypte.» Né en 1957, Mohamed laisse au crédit de la mémoire sportive le nom d'un footballeur dans l'âme. Un joueur qui, sans avoir intégré les rangs de la sélection nationale, n'en a pas moins été une valeur sûre et visible dans le décor footballistique national. Les années printanières de sa vie se sont croisées avec la mémorable histoire du MC Alger. Il était le capitaine de la grande équipe juniors vainqueur, en 1977, dans un 5 Juillet plein, de la Coupe d'Algérie de la catégorie face à un grand NA Hussein Dey. Avec Ramdane Betrouni, Tahar Bousri, «Eusobio», Ramdane Slimane et autres champions en devenir, le défunt était le chef de file d'une jeune génération mouloudéenne d'exception. Drivée par le regretté Mahmoud Ramdani, l'équipe «juniors» cohabitait avec une ambitieuse équipe cadets et une séduisante formation minimes, le tout reposant sur une prometteuse école de football. C'était, au milieu des années soixante-dix, au plus fort du cheminement heureux de l'équipe fanion en Coupe d'Afrique des clubs champions. A l'époque, la section football du MCA reposait sur une organisation pyramidale unique dans les mœurs des clubs algériens. La disparition de Mohamed Haddad impose un rappel. Le MCA des années Balamane-Drif avait tiré les leçons d'une histoire cinquantenaire nationaliste à souhait mais dénuée de résultats. A l'image de ce qui se faisait sous les cieux européens, le regretté Ferhat et Abdelkader avaient mis en place une entité exclusivement dédiée au «Mouloudia en devenir, les Vert et Rouge du futur». C'était le temps de la commission des jeunes dirigée par Abdelkader Kadri et animée, entre autres, par Ahmed Laagoune, Mahmoud Ramdani, Lounes Zouaoui, Mohamed El Kamal, El Hadj Messaoud. «Mohamed Haddad était de cette veine là», rappelle, en guise d'hommage appuyé, Abdelkader Drif. «Capitaine de l'équipe juniors, il symbolisait à la perfection une stratégie à vision lointaine. Au-delà de son appartenance à la famille mouloudéenne, Mohamed appartenait à une famille à tradition sportive. Il a été enfanté par la sœur d'une sommité du football national: j'ai nommé le meilleur arrière central du monde en son temps et membre de la prestigieuse équipe du FLN, Mustapha Zitouni.» Une matrice familiale qui se passe d'un surcroît d'hommages.