La présidente de la section correctionnelle du tribunal de Boufarik avait fait la moue en appelant le détenu par son prénom : Tarik. Il est vrai qu'il y a des magistrats qui ont l'art de détester les malfaiteurs aux historiques patronymes. Et dans la région de Boudmagh Imène, le prénom de Tarik rappelle facilement Ibn Ziad. Se présentant pour s'être pris à une jolie fille à qui il avait pris le portable heureusement sans violence. Et la victime avait été formelle. «Il n'avait d'yeux que pour l'appareil», avait-elle précisé à la barre. Il ne restait plus à la juge du siège qu'à prendre ses responsabilités et juger le vol mais pas les violences. Et ici, la juge a droit à un coup de chapeau ainsi que la représentante du ministère public qui avait, elle aussi, écarté le second délit, ce qui est à l'honneur du parquet qui corrige une telle bévue, car Tarik Abdesslam allait écoper d'une lourde peine de prison pour le vol seulement. Des vols de portable sont quasi quotidiens même à Boufarik. Devant Imène Boudmagh, la juge du pénal, Abdesslam nie férocement malgré le témoignage de la victime, une belle jeune fille tout de marron vêtue et décidée à enfoncer son bourreau qui avait eu, ce mardi, la guigne d'avoir à sa gauche un témoin venu participer à la manifestation de la vérité. «J'ai vu ce jeune se débarrasser du portable en voyant arriver la voiture radio de la police avant de prendre la fuite», avait raconté le témoin. Le détenu dément formellement, avant que Chérif, le second témoin, ne vienne à son tour donner un éclairage pour le tribunal mais qui était passé à côté. Le tribunal y passe outre, car le dossier est plus que clair. Le délit y est, la victime est sûre d'elle, et cette jeune fille était décidée à tout faire pour que justice se fasse. «Parlez en toute sécurité. Vous êtes sous la protection du tribunal», avait averti la présidente sereinement. Il est vrai que le voleur, sachant que la partie était perdue d'avance, avait opté pour une défense personnelle, car Boudmagh l'avait informé que le tribunal pouvait renvoyer les débats s'il voulait être assisté par un avocat, «et c'est la loi», précise la juge. «Non, je veux me défendre tout seul, car je suis innocent», avait-il martelé en remarquant que Djamila Benkhettou, la dynamique représentante du ministère public, attendait le moment pour requérir. Elle le fit sans état d'âme en ces termes : «Inculpé ce n'est pas la première fois que vous vous invitez dans cette juridiction. Alors deux ans ferme vous donneront à réfléchir.» La parquetière, pour une fois, s'était levée, comme pour rappeler aux justiciables et autres curieux présents dans la salle d'audience de Boufarik (cour de Blida), qu'elle entendait en qualité de magistrat debout montrer la voie au juge du siège, une juge recroquevillée au-dessus du code pénal d'où elle allait puiser les termes de l'article 350 du code pénal.