Le président de l'Union nationale des entrepreneurs du bâtiment (Uneb), Ahmed Bengaoud, a estimé hier que les prix élevés du ciment sont uniquement liés à la spéculation. La situation est incontrôlable, le sac de ciment de 50 kg a atteint les 800 DA. L'Uneb remet en cause les déclarations du ministre du Commerce à ce sujet. El Hachemi Djaâboub n'attribue pas cette hausse aux spéculateurs, mais au manque de production, d'où la nécessité, selon lui, de créer quatre nouvelles cimenteries afin de répondre aux besoins. Le président de l'Uneb a soutenu dans le même contexte que «les administrateurs des usines accusent des carences au niveau de la gestion et de la distribution du produit». Selon lui, ils sont en partie responsables du retard de livraison de projets, notamment ceux du programme d'un million de logements et du secteur des travaux publics. Des entrepreneurs qui achètent du ciment à la sortie de l'usine et d'autres qui s'en procurent sur le marché parallèle, tel est le quotidien des opérateurs du bâtiment. M. Bengaoud indique que les besoins réels en ciment sont de l'ordre de 17 millions tonnes et non pas de 20 millions de tonnes par an, tel qu'annoncé par les responsables des structures publiques, entre autres, les ministères du Commerce et de l'Industrie. Quant aux cimenteries, elles fournissent 18 millions annuellement, soit un excédent de 1 million de tonnes. Elle a donc la possibilité d'exporter le surplus, «nulle raison d'importer un autre million», tient à préciser notre interlocuteur. Là où le bât blesse, c'est l'absence d'une bonne gestion des cimenteries. D'après le président de l'Uneb, «on vend du ciment sans se soucier de l'équilibre des prix». L'arrêt technique des cimenteries est l'autre épine dorsale. Le président de l'Uneb affirme que «la mainmise des spéculateurs est confirmée en cette période. Malgré les chutes de pluie enregistrées ces derniers jours, le prix du ciment reste élevé, alors que logiquement il devait baisser». De son côté, M. Yahiaoui, vice-président de l'Association générale des entrepreneurs algériens, a tenu à souligner que «pour mettre fin à la crise du ciment, il faudrait augmenter les capacités de production». Sur ce point, il partage l'idée du ministre du Commerce, selon laquelle l'Algérie a besoin de quatre nouvelles cimenteries. Mais il rejette l'idée qui consiste à vouloir démontrer que cette crise n'est pas liée à la spéculation. Selon notre interlocuteur, «il faut savoir que ce ne sont pas tous les entrepreneurs qui bénéficient de leurs quotas. Parfois, il y a de petits problèmes qui surgissent comme l'absence de chauffeurs ou le manque d'argent le jour de l'achat. Quand le concerné revient à l'usine pour prendre le restant de son quota, on lui indique qu'il n'est plus disponible. En réalité, ils obligent les entrepreneurs à acheter sur le marché noir, d'où les prix élevés du ciment. Car dans l'informel, aucun texte ne régit la vente». Et de poursuivre : «L'administration n'est pas innocente non plus, il y a une bureaucratie très lourde. On nous demande des documents qui ne sont pas nécessaires. Des fois, quand on leur donne des dossiers, ils ne sont pas étudiés. Ceci est paradoxal puisque à l'annonce d'un projet les entrepreneurs soumissionnent. Ils donnent tous les documents demandés dans le cahier des charges. Et quand une entreprise est retenue on lui délivre un ordre de service. En maintenant avec la bureaucratie, ils accusent des retards dans la livraison de leurs projets de manière involontaire.» Création de nouvelles cimenteries Selon ces responsables, l'ouverture de nouvelles cimenteries est toujours souhaitable. La réflexion à long terme suppose le calcul des besoins pour les années à venir. Il est clairement prouvé que l'Algérie ne va pas se restreindre à 17 millions de tonnes annuel. Un autre aspect a été évoqué par M. Yahiaoui. Il concerne les projets réalisés par les entreprises étrangères. Selon lui, «ces entreprises participent indirectement à la crise du ciment. Au lieu d'importer leurs besoins, elles achètent à bas prix le produit algérien». Pour le vice-président, «les entreprises algériennes ne sont pas encore solides, et financièrement, elles ne sont pas capables d'importer du ciment». Quant aux autoconstructeurs, ils restent eux aussi victimes du diktat des spéculateurs. Le ministre du Commerce, El Hachemi Djaâboub a affirmé hier au cours de l'émission «L'invité de la rédaction» que les prix du ciment sur les cours mondiaux se sont répercutés sur ceux appliqués en Algérie. Le ministre s'est dit inquiet que malgré «l'importation d'un million de tonnes, le prix du ciment ne baisse pas». Il s'interroge sur les prix qui seront appliqués durant les prochains mois puisque malgré la pluie, le prix du ciment reste toujours élevé. M. Djaâboub a annoncé que «la SGP Gica va lancer incessamment un deuxième appel d'offres international pour l'achat de 3 millions de tonnes». Pour lui, «l'importation de ciment est une solution d'urgence». Il a cependant indiqué que «le marché algérien recommande la réalisation des cimenteries pour les années à venir et de gros investisseurs sont intéressés pour se lancer dans un tel projet».