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Le scepticisme de Ksentini
Dossier des disparus
Publié dans Le Temps d'Algérie le 19 - 03 - 2010

Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a affirmé jeudi dernier à Alger qu'il était «impossible d'identifier, aujourd'hui, les responsables des disparitions durant la tragédie nationale».
Invité jeudi dernier au forum d'El Moudjahid, il pense que «tous les éléments pour un Etat de droit en Algérie existent». Il estime sur un autre point que les grèves des enseignants et des praticiens de la santé sont légitimes.
M. Ksentini a expliqué que sur «le plan intellectuel, la demande de vérité sur les disparitions est parfaitement concevable et logique, mais, dans la pratique, elle est irréalisable».
«Comment identifier, plus de dix ans après, des agents de l'Etat qui se sont rendus coupables de ces disparitions», s'est-il interrogé. «Personne ne sait ce qui s'est passé en vérité, et il n'y a ni archives ni témoignages», a-t-il relevé, se questionnant également
«comment demander donc à l'Etat de se lancer dans des procès contre des personnes sans la moindre preuve ni dossier substantiel». Il a indiqué, dans ce contexte, que personnellement, il préférable que «la page soit tournée», soulignant qu'«aucun pays n'a réussi à identifier ni à juger des auteurs de disparitions même s'il y a eu des semblants de procès presque anecdotiques, comme dans des pays d'Amérique latine» , a-t-il dit.
«Il faut être raisonnable et se rendre à l'évidence que l'Etat n'a pas à se lancer dans des opérations qu'il sait par avance perdues», a encore souligné M. Ksentini.
Il a affirmé n'avoir «jamais cessé de dialoguer avec les familles des disparus pendant la tragédie nationale qui demandent vérité et justice». Tout en indiquant que «la question des disparus est réglée partiellement», il a souligné que «la CNCPPDH a fait tout ce qui est était en son pouvoir pour amener l'Etat à reconnaître sa responsabilité civile dans cette affaire et à admettre, par la suite, le principe de l'indemnisation». «Sur le plan civil, l'Etat est responsable mais pas coupable des disparitions», a-t-il soutenu, rappelant le «chaos dans lequel le terrorisme avait plongé le pays pendant la tragédie nationale et les ravages qu'il avait commis». «Le terrorisme n'a pas fait que des ravages sur les corps mais surtout dans les esprits des gens», a-t-il estimé.
«Tous les ingrédients réunis pour édifier un Etat de droit en Algérie»
Le président de la CNCPPDH a par ailleurs affirmé que «tous les ingrédients sont réunis pour que l'Algérie soit un Etat de droit». M. Ksentini pense que «l'édification d'un Etat de droit est difficile du fait qu'elle demande des moyens et du temps».
«Objectivement, il y a une volonté politique déterminée à édifier un Etat de droit en Algérie, tout comme il y a des femmes et des hommes capables de le faire et une société civile qui exige cette édification», a estimé l'avocat. Pour M. Ksentini, «les droits de l'homme sont une culture qu'il n'est pas facile de répandre, et l'Algérie, ayant été historiquement colonisée, a connu un déficit énorme en la matière».
Il s'agit, a-t-il dit, de «combler ce déficit accentué par le terrorisme dans les années 1990 quand l'Algérie était en proie à la vague intégriste», la qualifiant de «négation absolue des droits de l'homme».
«Les revendications des grévistes sont légitimes»
D'autre part, abordant la dernière grève des enseignants et celle des praticiens de la santé publique, toujours en cours,
M. Ksentini a indiqué que «les revendications des grévistes sont légitimes. Elle ne s'est pas avérée inutile même si elle a été pénible». Tout en regrettant la poursuite de la grève des praticiens de la santé publique, il a dit préférer que «les choses évoluent progressivement, notamment par la négociation et la concertation, plutôt que par le recours au mouvement de protestation».


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