Personne n'attendait de lui d'avoir le triomphe modeste et il y avait de quoi. Exclu du Parti socialiste pour une énième dérive raciste dont il s'est toujours défendu, le président de la région Languedoc-Roussillon, George Frêche, a été incontestablement la star des élections régionales en France. Et il ne s'est pas gêné de savourer sa victoire en y mettant le ton le plus fracassant et les mots les plus durs. «C'est la première fois dans l'histoire de la République qu'un homme à lui tout seul a battu tous les partis politiques réunis», a-t-il déclaré. C'est la première fois aussi que les instituts de sondage se sont intéressés d'aussi près à une candidature précise qui aurait pu être un détail, au point d'annoncer sa victoire avant terme et dans des scores insoupçonnables pour quelqu'un qui vient d'être lâché par l'état-major de son parti qui lui substitué une autre liste à affronter en plus des adversaires traditionnels. C'est la première fois encore que les télévisions, publiques et privées, se sont autant bousculées pour avoir l'exclusivité de la déclaration à chaud immédiatement après l'annonce des premières estimations des résultats. C'est la première fois enfin, et c'est sans doute l'essentiel à retenir de la «leçon Frêche» que la direction d'une formation politique, le Parti socialiste français en l'occurrence, exclut un de ses membres pour une «question de principe», se présente contre lui, avant d'aller chercher une grossière entourloupette qui lui permette d'appeler à voter pour lui au second tour ! Parce que c'est bien de cela qu'il s'agit. En appelant à «faire barrage à la droite et à l'extrême droite», le Parti socialiste n'a même pas essayé de se cacher derrière son petit doigt. En «siphonnant» les voix de la droite et de l'extrême droite, et en récupérant de manière inespérée celles, certes pas très consistantes, de l'électorat socialiste «discipliné», Georges Frêche a largement triomphé de tous ses adversaires. Ce n'est pourtant pas sa victoire, au demeurant prévisible, qu'il faut retenir, mais plutôt la disponibilité de plus en plus évidente de la classe politique française à se «décomplexer» face au propos et à l'attitude raciste, voire en accepter un «seuil tolérable» quand la cause en vaut la chandelle. En rajoutant que les «Français n'ont plus confiance dans les partis» tels qu'ils ont existé jusque là, M. Frêche confirme que c'est non seulement ce qu'il faut retenir de «son expérience», mais aussi ce qu'il y a de plus inquiétant. Dans le Languedoc- Roussillon, les Français ont choisi ce qui se rapproche du pire. Avec la bénédiction de ceux qui sont censés s'en émouvoir le plus. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir