Sera-t-il ou non remis à la justice algérienne ? La question ne se rapporte pas à n'importe quel quidam recherché par les tribunaux. Elle concerne Abdelmoumen Rafik Khalifa, appelé le «golden boy» algérien, pour l'ampleur de la fortune qu'il a amassée et dont il jouissait, il n'y a pas si longtemps, avant de sombrer dans une déchéance caractérisée encore loin de connaître son épilogue. C'est pour demain que l'extradition de Rafik Khalifa en Algérie sera tranchée par le ministère britannique de l'Intérieur. D'entrée et à se fier au propos de Tayeb Belaïz, ministre de la Justice, garde de Sceaux, quel que soit le contenu de la décision que prendra mercredi le ministère de l'Intérieur britannique, celle-ci serait de son avis la dernière. «La décision qui sera prononcée le 31 mars pourrait être la dernière», a fait savoir le ministre algérien de la Justice en évoquant le sujet lors d'une cérémonie de célébration de la Journée mondiale de la femme, le 8 mars à Alger. Tayeb Belaïz n'a pas exclu aussi que même dans le cas où le ministère de l'Intérieur britannique tranche pour l'extradition de Rafik Khalifa, une telle décision «pourrait faire toujours l'objet d'un appel». En d'autres termes, l'espoir est minime de voir l'ex-golden boy réfugié en Royaume-Uni depuis 2003 extradé enfin en Algérie. Il est vrai que la bataille judiciaire engagée par l'Algérie n'est pas de toute aisance. En effet, et quoique le tribunal de Westminster ait autorisé en juin 2008 l'extradition de l'ex-golden boy en Algérie et que, de l'avis même du juge Thimothy Workman en charge du dossier, celle-ci «ne contrevenait pas à la convention internationale des droits de l'homme», l'opération de remettre Rafik Khalifa entre les mains de la justice algérienne qui l'a condamné en mars 2007 par contumace à la réclusion à perpétuité a été reportée à maintes reprises. Le tout dernier report a été celui du 29 janvier 2009 lorsque Alan Johnson avait une nouvelle fois demandé de prolonger le délai jusqu'au 31 mars sur la base d'une requête de la défense de Khalifa qu'il a validée. Toujours est-il que le ministère britannique de l'Intérieur s'est montré assez méticuleux dans l'étude de la demande algérienne d'extradition en passant au peigne fin les pièces à conviction tout en s'assurant que les conditions garantissant un jugement équitable en Algérie du concerné sont réunies. Les doutes de Farouk Ksentini Ce n'est qu'après cette étude approfondie de la demande que la justice britannique a donné son accord de principe d'extrader Rafik Khalifa. Cet accord que le ministre de la Justice ne cesse de réitérer, voire de mettre en valeur à chaque fois qu'il est interpellé sur la question. Cet espoir tant caressé par Tayeb Belaïz de voir Rafik Khalifa remis aux autorités algériennes est loin d'être un sentiment partagé du côté des autres hommes de loi algériens. L'un d'entre eux, en l'occurrence Farouk Ksentini, président de la commission des droits de l'homme Cnppdh, fait part d'un scepticisme caractérisé en s'exprimant sur la question. «Il n'y aura pas, à mon sens, de décision d'extradition en ce 31 mars», dira maître Ksentini qui laisse entendre ainsi que le ministère britannique va, une fois de plus, reporter cette procédure. «Les Anglais manquent de volonté», a souligné maître Ksentini qui ne dit pas comprendre autant d'hésitation de la part la justice britannique. «La partie algérienne doit mettre toute l'énergie nécessaire pour arracher cette extradition», soutient encore notre interlocuteur contacté hier pas nos soins.