Tous ceux qui ont cru en une profonde crise diplomatique entre Washington et Tel-Aviv ont eu tort. Ce n'est pas parce que Georges Mitchell a reporté son dernier voyage au Proche-Orient que le torchon continue de brûler comme veulent bien nous le présenter les médias occidentaux. Benjamin Netanyahou a mis tout le monde d'accord, tout va bien entre son gouvernement et l'administration Obama. Et si le Premier ministre israélien a boycotté à la dernière minute la conférence internationale sur la dénucléarisation, ce n'est pas à cause d'un quelconque différend entre les alliés. C'est que «Bibi» veut perpétuer la tradition et poursuivre la politique «ambiguë» qui entoure depuis plus de quarante ans le programme nucléaire israélien. Les chroniqueurs de la presse israélienne peuvent circuler, il n'y a rien à voir et rien à commenter. L'indestructible alliance israélo-américaine tiendra encore bon. Netanyahou ne cessera de le répéter, tout va bien. Chose que Hosni Moubarak, remis de sa convalescence, ne peut prétendre ces temps-ci. Entre Washington et le Caire, beaucoup d'eau est en train de couler dans le Nil. Au point de craindre une crue avant la présidentielle égyptienne. Que s'est-il donc passé entre l'Egypte, pays «membre» du club des modérés au Proche-Orient et les Etats-Unis, hyperpuissance protectrice de ces mêmes pays qui ne sont pas adeptes de la disparition d'Israël de la carte ni partisans de la charte du Hamas palestinien ? Ce qui a mis la «tribu» Moubarak hors d'elle, ce sont les critiques US sur l'arrestation des militants anti-pouvoir dont 11 au Koweït et la lenteur qu'accusent les réformes démocratiques au pays des Pharaons. Sous le haut patronage d'Hillary Clinton, le Département d'Etat a-t-il commis une première bévue diplomatique envers son fidèle allié égyptien ? Sans aller jusqu'à soutenir ouvertement l'ancien patron de l'AIEA, qui a fait voir à l'Iran des vertes et des pas mûres, l'administration Obama ne fait que revenir à la charge. Sinon, marcher sur les pas du précédent gouvernement républicain, conduit par W. Bush, le président qui savait l'existence d'innocents à Guantanamo. Cherchant à imposer son grand projet de remodelage du Moyen-Orient, le Texan avait exigé l'accélération de ces mêmes réformes politiques. Soutenu par l'ancien président français Jacques Chirac, fin connaisseur du monde arabe, Hosni Moubarak fournissait pour seul argumentaire celui du temps qu'il faudra aux peuples arabo-musulmans pour d'abord apprendre puis s'adapter à la démocratie. Quand, bien sûr, celle-ci ne bascule pas dans l'occidentalisation pure et dure. Le gouvernement démocrate de Washington, qui a reconnu avoir réduit son arsenal nucléaire stratégique pour en outre obliger la Chine à soutenir des sanctions anti-iraniennes, réussira-t-il à refaçonner le Moyen-Orient par la main tendue de son chef qui n'est plus vraiment une ? La présidentielle égyptienne, qui risque de connaître une «dérive monarchique» avec l'éventuelle élection du fils de Moubarak, est une bonne opportunité pour Washington qui voudrait sonder en premier lieu les intentions des pays arabes modérés vis-à-vis du modèle démocratique que l'Occident peine encore à imposer. Le Caire sera-t-il le premier pays contraint à l'accepter ? La menace de futures restrictions budgétaires US pourrait déclencher un tel processus, destructeur du pouvoir unique.