Le doyen des entraîneurs algériens, artisan du seul titre africain de l'EN en 1990 et figure emblématique de la glorieuse équipe du FLN, Abdelhamid Kermali, s'attend à une Coupe du monde fermée et dominée par l'aspect tactique. Cheikh Kermali, qui a annulé son voyage en Afrique du Sud pour des raisons de santé, table d'autre part sur une qualification de l'EN au second tour du Mondial 2010, le premier qu'organise l'Afrique. Le Mondial 2010, le premier en Afrique, débutera ce vendredi. Beaucoup doutent des capacités de l'Afrique à organiser un tel événement, qu'en pensez-vous ? On ne peut rien dire à l'avance. Attendons le début officiel de la compétition pour avoir une idée fixe sur l'organisation de cet événement planétaire exceptionnel. Je pense qu'il faut faire confiance à nos amis sud-africains. Ils vont relever incha Allah le défi. Des doutes planent aussi sur l'EN qui n'a pas rassuré ses fans lors de ses matches de préparation. Quel est votre avis sur les Verts ? J'ai suivi les trois matches de préparation des Verts contre la Serbie, l'Eire et les Emirats. Le premier était mauvais, le second moins mauvais et le troisième assez bon. Je trouve qu'il y a une nette amélioration lors du dernier match contre les Emirats. On a vu un peu de jeu collectif. Les joueurs se connaissent mieux. Je tiens à dire qu'on a une équipe qui tient la route, mais pas une grande équipe. La dernière prestation des Verts à Nuremberg a été plus ou moins rassurante. On a vu du jeu offensif et des occasions de buts, qui sont malheureusement mal exploitées. On attend l'heure de vérité pour les juger. Comment jugez-vous leurs chances dans cette compétition ? Je pense que l'EN peut passer au second tour. Tout dépendra de son premier résultat face à la Slovénie. Le premier match compte énormément. Il est déterminant. Toutes les équipes vont tout faire pour réussir leur entrée en la matière pour être plus à l'aise par la suite. Dans ce genre de tournoi, on met le paquet dans le premier match pour la sécurité. Mais les chances resteront quand même intactes, en cas de défaite. Ce n'est pas perdu à 100%. Il y aura deux autres chances de se rattraper. Comme je l'ai dit auparavant, on a une équipe et de bons joueurs. Il nous manque un buteur et de l'efficacité. Je fais confiance à Saâdane qui va trouver des solutions sur le plan offensif. Marquer des buts, c'est rassurer et tranquilliser la défense. Notre défense a montré justement quelques signes de flottement face aux Emirats. Il y a eu quelques erreurs derrière qu'il faudra éviter en Coupe du monde. Je pense tout de même qu'on a une bonne défense et elle l'a prouvé lors des éliminatoires. Je fais confiance à Saâdane qui a une grande expérience et qui va corriger toutes les lacunes. Que peut dire le doyen des entraîneurs algériens aux poulains de Rabah Saâdane à la veille de leur baptême du feu en Coupe du monde ? Je leur demande de regarder le drapeau national qui flotte lorsqu'ils seront alignés sur la ligne de touche et dire pour lui je meures. Il faut jouer sur la fibre nationale qui poussera les joueurs à se surpasser, à se transcender, à faire plaisir à ces milliers de supporters qui iront les voir et les encourager. Cela est payant. Ça fait toujours quelque chose de voir le drapeau de son pays flotter dans les tournois internationaux. Je me souviens bien du premier match qu'a disputé l'équipe du FLN à Beyrouth. On avait tous les larmes aux yeux. C'était plus fort que nous. On ne pouvait pas retenir nos larmes qui coulaient toutes seules. Je demande donc à nos joueurs de jouer pour le drapeau. Je leur demande aussi de jouer à l'algérienne. Nous aussi, on a notre propre style comme les Brésiliens. Pour l'anecdote, j'ai demandé à Pelé lorsqu'il est venu chez nous, quelle est la clé de la réussite des Brésiliens ; il m'a répondu que leur réussite réside dans leur jeu, leur jeu propre à eux. Vous êtes invité par la FAF pour assister au Mondial, allez-vous faire le déplacement en Afrique du Sud ? Je ne peux me déplacer en Afrique du Sud. Je suis malade et il m'est impossible de faire un tel voyage. J'ai encore des vertiges. Je tiens à remercier Rabah Madjer qui m'a rendu visite chez moi à Sétif. Je le remercie beaucoup pour ce geste qui m'a vraiment fait plaisir. Quels sont vos favoris pour ce Mondial 2010 ? Ce sont toujours les mêmes. On trouve les Brésiliens, les Allemands, les Italiens, les Argentins et les Espagnols. Ce sont ces nations qui jouent toujours les premiers rôles en Coupe du monde. Comment évaluez-vous les chances des sélections africaines, outre l'Algérie ? Sans trop m'engager, je vois bien une sélection africaine créer la surprise dans cette Coupe du monde. Beaucoup de spécialistes et de bookmakers s'attendent à une surprise africaine. Ce sera peut-être l'Algérie. On l'espère bien. J'aimerais bien voir l'EN dans le carré d'as. Rien n'est impossible en football. Si on arrive à jouer collectivement, comme on l'avait fait contre la Côte d'Ivoire lors de la CAN 2010, on peut vraiment aller loin en Afrique du Sud. On n'a pas la même équipe qu'en 1982 avec les Madjer, Belloumi, Assad et autres, soit la meilleure équipe algérienne de tous les temps qui avait terrassé l'ogre allemand et qui pouvait aller très loin alors, n'était cette combine entre l'Allemagne et l'Autriche. C'était un plaisir de les voir jouer. Avec eux, le spectacle était garanti. Mais on peut quand même rêver et espérer d'autres exploits, de la part de notre sélection et des sélections africaines, comme celui des Camerounais en Italie en 1990. J'étais au stade lors du match des quarts de finale entre le Cameroun et l'Angleterre. C'était merveilleux. Les Camerounais avaient vraiment surclassé les Anglais et méritaient largement de passer en demi-finale, mais la chance leur avait malheureusement tourné le dos. S'agissant des joueurs, quelles seront, selon vous, les révélations de ce Mondial ? Je ne m'attends pas à de grandes révélations. Il n'y a plus de grands joueurs comme par le passé tant dans notre équipe que dans les autres pays qualifiés. J'ai suivi plusieurs matches amicaux. Le niveau n'était pas extraordinaire sur le plan individuel et collectif. Je pense qu'on aura une Coupe du monde moyenne sur le plan technique. Cette année, il va y avoir des calculs. La tactique va prendre le dessus et elle va tuer en quelque sorte le jeu et le spectacle. Ce sera des matches tactiques et fermés.