Des familles décimées, des destins brisés et une facture sociale et économique de plus en plus lourde à supporter par la collectivité, les accidents de la circulation s'apparentent au fléau du siècle. Excédés par leur montée en flèche, les citoyens parlent désormais de terrorisme routier. En moins de 10 jours, les services de sécurité ont enregistré plus d'une soixantaine de morts et un millier de blessés sur nos routes. Avant-hier, six personnes sont décédées et 59 autres ont été blessées dans une série d'accidents de la circulation. Hier, c'est au tour de trois autres citoyens de périr dans d'effroyables circonstances. A l'heure où nous mettons sous presse, d'autres accidents mortels ont dû certainement survenir, provoquant mort et désolation. Et la comptabilité macabre n'est pas près de prendre fin, chaque jour apportant son lot de victimes et de malheurs. Si l'accident de Hassi Lefhal, près de Ghardaïa, a frappé les esprits à cause du nombre élevé de morts et de blessés (14 morts et 11 blessés), la succession de sinistres survenus dans les wilayas de Sétif, Batna, Oran, Tlemcen et Constantine n'a pas été sans choquer l'opinion publique, les services de prévention en premier, qui pensent déjà à des méthodes plus efficaces pour juguler l'épidémie. Car, passé la stupeur des premiers moments du drame, on revient très vite aux habitudes. Les mauvaises, bien entendu, que nul code de la route n'est en mesure de réfréner. On continue à rouler sans se soucier de la signalisation ni des règles élémentaires de la conduite mais aussi, et c'est le plus grave, à défier le bon sens en roulant à tombeau ouvert sur des voies étroites souvent encombrées et très fréquentées. Cela se vérifie en particulier durant l'été, le long des routes du littoral, et dans les contrées de l'intérieur où, pour on ne sait quelles raisons, les conducteurs sont autorisés à commettre tous les excès durant certaines occasions (matches de football et cortèges nuptiaux notamment). Si l'on se réfère aux statistiques, un grand nombre d'accidents mortels survient précisément lors de ces occasions festives qui, par la faute des hommes, se transforment souvent en deuil. Une prévention permanente Il faut se rendre à l'évidence que la lutte contre le terrorisme routier, qui fauche chaque année près de 4000 personnes et handicape des milliers d'autres, ne peut s'arrêter à la promulgation d'un texte coercitif et son application de manière rigoureuse. L'expérience a démontré, en effet, que malgré la sévérité des sanctions qu'il prévoit, le nouveau code de la route n'a pas eu l'effet dissuasif auquel s'attendaient ses initiateurs. Ni les retraits systématiques de permis, ni l'augmentation du montant des amendes, ni le risque de se retrouver derrière les barreaux n'ont calmé l'ardeur des chauffards, les plus jeunes surtout, qui sont à l'origine du plus grand nombre d'accidents. L'état de la chaussée, la mauvaise signalisation et les conditions météorologiques arrivent loin derrière les fautes humaines. Dans leurs bilans périodiques, les services de la Gendarmerie nationale relèvent que l'excès de vitesse, les dépassements dangereux et le refus de priorité sont les causes premières des accidents de la route. L'analyse de l'arbre des causes de chaque accident démontre que l'homme en est à chaque fois à l'origine. De manière directe ou indirecte, il est le facteur déclenchant, d'où l'impérieuse nécessité d'agir sur ses comportements. La prévention des accidents de la route est, en fait, une réflexion permanente sur les voies et les moyens à même de sensibiliser durablement les citoyens et leur inculquer, dès le plus jeune âge, les bons comportements. L'école, les médias, la télévision notamment et les institutions en charge de la santé et de la sécurité publiques sont appelées à inscrire leurs actions de prévention dans la durée, et de ne plus se contenter de quelques opérations sporadiques de circonstance. En attendant, la route continue de tuer. Dans l'insouciance des conducteurs, des piétons et des autorités en charge de la gestion du réseau routier.