Les émeutes ayant opposé dimanche les jeunes de la cité Ben Merzouga, dans la commune de Boudouaou, aux forces antiémeutes ont fait plusieurs blessés dans les deux camps. Une vingtaine de jeunes émeutiers ont été interpellés par les éléments de la Gendarmerie nationale dépêchés sur place pour rouvrir la route nationale 5 menant de Boudouaou à Alger. Les conditions de vie indécentes sont la raison de ces affrontements, selon les habitants de ce quartier de 14 000 personnes. «Nous avons payé 10 000 DA chacun pour le raccordement au gaz de ville en 2008, mais à ce jour, rien n'a été fait, sinon des tuyaux enterrés sur les grandes allées de la cité. L'état des routes vous le voyez : en période hivernale, même les véhicules tout-terrains peinent à circuler. Nous sommes sous le joug colonial», fulmine Saïd. Avant d'ajouter : «Si nous sommes punis par la mairie, qu'elle nous signifie la durée de la peine.» La situation à la cité Ben Merzouga à Boudouaou ne cesse d'empirer. A cause des dernières pluies, tous les accès à la cité sont bloqués. L'oued vers qui les eaux pluviales se rabattent a été détourné de manière anarchique par un «squatteur» qui a construit une écurie pour vaches laitières au milieu de la cité. «Les buses des eaux usées ont explosé et nous évitons de consommer l'eau du robinet car, selon un de nos ingénieurs, même la conduite d'eau potable est touchée», explique un habitant. Plusieurs requêtes ont été adressées aux services concernés, à savoir la commune de Boudouaou, la daïra et même la wilaya de Boumerdès, mais aucune réponse n'a été donnée. Bien que les habitants de la cité se soient organisés sous la coupe d'une association qui défend les intérêts du quartier qui ne cesse de grandir. L'autre danger qui guette les habitants de la cité de Ben Merzouga est le barrage situé entre Ben Yamina et Ben Merzouga qui risque l'effondrement. «Le barrage fera d'énormes dégâts, le tremblement de terre de Boumerdès de 2003 a créé d'énormes fissures et l'effondrement de ses murs n'est pas à exclure. Des ingénieurs ont même alerté les services concernés, en vain», ajoute le représentant de l'association. Nous avons tenté de joindre Mehsas Yahia, maire FLN de la ville de Boudouaou, en vain, la seule réponse qui nous a été donnée est : «Le maire est en réunion». Idem pour les services de Sonelgaz qui ont pourtant empoché 2,7 milliards de la part des habitants de la cité pour le raccordement au gaz de ville, mais les portes étaient fermées. Le seul recours des jeunes et des habitants de la cité de Ben Merzouga est, selon eux, la rue. «La rue est le seul endroit où nous pouvons nous exprimer librement, et encore, car là aussi les services de sécurité nous en empêchent», ont conclu les jeunes. «L'argent du peuple détourné» Un fonctionnaire de la mairie de Boudouaou a bien voulu nous accompagner et expliquer, preuve à l'appui, la situation de la cité de Ben Merzouga. «La cité de Ben Merzouga est un quartier résidentiel si ce n'est la mauvaise gestion des élus, notamment le P/APC et certains de ses collaborateurs qui manigancent sur le dos du peuple.» A l'entrée de la cité, les routes sont impraticables, des enfants revenant des écoles avoisinantes sont contraints de mettre des paires de bottes à longueur de la saison hivernale. Des nids de poule, des cascades et des glissements de terrain sont visibles même par un «aveugle», pour reprendre l'expression de ce fonctionnaire. «Cette cité est devenue le fief des affaires du maire, les projets affectés par la wilaya et autres ministères sont à la traîne depuis des années. L'histoire du gaz de ville n'est qu'un exemple parmi tant d'autres, le mélange des eaux usées avec l'eau potable en est un autre et j'en passe.» A proximité de l'oued, un hangar faisant office de garage de mécanique, il y a quelques années, est devenu une écurie en plein centre de la cité. «En été, nous suffoquons, sans parler des odeurs et des moustiques, nous avons saisi à maintes reprises les services de l'APC, mais la réponse qu'on nous donne est : «Allez chercher ailleurs, cet homme est fort et il a les bras longs !» Ladite écurie a été clôturée par l'exploitant, car ce hangar appartient à un groupe d'agriculteurs qui ont cédé ce bien public à cette personne qui n'en fait qu'à sa guise. «Il a détruit les deux ponts qui servaient de canal pour l'irrigation et le passage des eaux pluviales, il a clôturé le hangar sans aucune norme, nous avons saisi, preuve à l'appui, les services concernés, à savoir la direction de l'environnement, la santé, la mairie, la daïra et la wilaya, en vain. Actuellement, le centre est devenu un regard à ciel ouvert». Les habitants de la cité Ben Merzouga comptent saisir la justice et déposer des plaintes contre l'APC pour faire valoir leurs droits, en attendant, ils comptent sur le wali de Boumerdès, nouvellement installé, pour le règlement définitif de leurs problèmes. Le fonctionnaire de la mairie de Boudouaou a conclu : «Les émeutes qui ont éclaté hier sont le fruit de la fuite des services concernés, à commencer par le maire et certains de ses collaborateurs qui n'apparaissent que lors des élections, mais aussi sur l'administration qui épaule les bras longs.»