A Kaboul, les nuits douces de palais ne vont plus être ce qu'elles étaient. Le président Hamid Karzaï va devoir compter des centaines de fois les moutons imaginaires sans pouvoir retrouver le sommeil. Non pas à cause des deux milliards de dollars d'aide militaire que les Etats-Unis vont verser à son voisin pakistanais, la lutte contre les talibans pakistanais est censée favoriser aussi la stabilité de l'Afghanistan. Si les nuits agitées de Karzaï sont agitées c'est en raison des dernières révélations du New York Times. Dans sa livraison de samedi dernier, le journal nous apprend que le chef d'état-major du président afghan, Omar Daudzaï, reçoit régulièrement de l'argent, sans traçabilité bancaire légale. Des mains de qui ? Des mollahs iraniens qui chercheraient à asseoir leur influence au sein même du cercle présidentiel afghan. Avec la mauvaise intention de semer la discorde entre le «roi» Karzaï et ses faiseurs occidentaux. Toujours selon le journal, les millions de dollars de bakchich sont versés sur un compte secret et dans lequel Karzaï et Daudzaï puiseraient pour arroser abondamment des parlementaires, des chefs de tribu et même des responsables talibans, histoire de gagner leur loyauté. En gros, se les mettre dans la poche. L'allégeance de tout ce «beau monde» aiderait à faire progresser les intérêts de la République islamique d'Iran dont le pouvoir ultraconservateur ne rêve que d'une chose : un désengagement total des forces étrangères en présence en Afghanistan. Car, à Téhéran, les mollahs iraniens ne sont pas sûrs à cent pour cent que le président Obama mette fin à cette guerre préventive qu'il ne fait que prolonger en réalité. Bien qu'il ait annoncé un début de retrait en juillet 2011, sa décision d'envoyer des renforts supplémentaires laisse même penser que Washington se prépare à une « guerre permanente». Malgré la réduction de son budget militaire de 8% - les soldats de Sa Majesté présents en Afghanistan ne sont pas concernés -, la Grande-Bretagne table plutôt sur une présence de la coalition jusqu'en 2015. C'est justement ce «fait accompli», légitimé par une résolution des Nations unies, qui inquiéterait le régime de Téhéran. D'où l'intérêt de celui-ci de ne pas compter quand il s'agit de remplir, à ras bord, la prétendue «caisse noire présidentielle» de Karzaï et de son chef de cabinet. Les deux hommes risquent-ils de perdre toute la confiance que l'Occident plaçait en eux au lendemain de la chute du pouvoir taliban ? Menées à maintes reprises par ses soins, les offenses de Hamid Karzaï à l'adresse de l'administration dissimulaient-elles ses vœux de regarder ailleurs, sachant pertinemment que la grande démocratie occidentale demeurera étrangère, certainement incompatible, avec l'ancestrale confession musulmane du peuple afghan ? Au sujet de ce présumé «argent sale», en provenance d'Iran, le maître de Kaboul et son « bras droit» ont choisi de garder un silence de pierre. Tout comme l'ambassadeur iranien à Kaboul qui s'est abstenu de commenter ces allégations qu'un porte-parole de la chancellerie a bien voulu qualifier de «ragots diaboliques provenant des médias occidentaux et étrangers». Ce ne serait donc qu'une cabale orchestrée par les ennemis de la République islamique d'Iran qui voudraient la voir quitter toutes les contrées où son influence peut contrecarrer les ambitions expansionnistes de l'organisation du traité Atlantique Nord qui, elle, s'est permis d'aller chasser bien au-delà des frontières de son «espace historique». Aussi, en Afghanistan, au nom de la sécurité mondiale en général et de la démocratie occidentale en particulier. Sur ce géant baril de pétrole et de minerais qu'est l'Afghanistan, l'Amérique d'Obama accusera-t-elle à leur tour la Chine et la Russie de faire de même que l'Iran afin de gagner en influence, la date du grand partage n'étant pas encore connue ? A trop perdre la confiance de ses alliés occidentaux, Hamid Karzaï gagnerait à devenir hyper riche.