Ils étaient quatre sur la scène de la salle El Mouggar. Quatre comédiens exceptionnels pour jouer une pièce de théâtre. Du vrai théâtre. Du beau spectacle, mais… Ce jeudi à 16h, moment prévu pour la levée de rideau pour la pièce Oyé Luna, quelques artistes connus comme Boualem Rabia et Aziz Degga discutaient à l'entrée de la salle. A cette heure, ce lieu est presque vide et les comédiens devaient s'inquiéter devant l'absence du public. Le metteur en scène et auteur du texte arrive décontracté dans le hall et nous confie qu'il a rassuré ses comédiens en leur disant que le public finira par venir pour les prochains spectacles. On se demande pourquoi tous les volets culturels et artistiques ont bien repris après le terrorisme, sauf le théâtre. On se rappelle que dans les années 1980, la salle El Mouggar affichait complet pour tous les spectacles de théâtre et parfois on assistait à des débats où le public était composé de lycéens et de sommités culturelles telles que Himoud Brahimi. Au dernier festival du théâtre professionnel, qui s'est tenu à l'opéra d'Alger, le public n'était constitué pratiquement que des comédiens qui participaient à la manifestation. Il est temps de penser sérieusement à la relance du théâtre en invitant de vraies troupes pour offrir de vrais spectacles, comme l'a fait l'ONCI, au lieu de continuer à tourner en rond. Il faudrait également penser à des spots télévisés pour annoncer la programmation d'une pièce, comme celle de ce jeudi. Le public composé de quelques dizaines de personnes était merveilleux. L'auteur du texte et metteur en scène Richard Demarcy, qui sait bien que la beauté se trouve dans la simplicité, a imaginé une belle histoire et une mise en scène qui invite le spectateur à vivre la pièce aux côtés des comédiens. Deux secrétaires se relayant sur une ancienne dactylo doivent écrire des centaines de dossiers liés à la destruction d'un forêt. Dépassé par le travail, ils se retrouvent avec des bosses. Les deux bossus ne savent plus comment se débarrasser de leurs bosses et c'est par hasard que l'un d'eux se retrouve dans la forêt face à deux sorcières qui n'aiment pas les dimanches. Après avoir déchiré le dossier concernant la destruction de la forêt. Après des accrochages avec les sorcières, il finira par les écouter et se voir débarrassé de sa bosse. Il rencontrera son ami qui voudra faire de même mais les choses se compliquent… Pour cette réussite, Richard Demarcy s'est fait entourer par des comédiens talentueux. Antonio Da Silva a rejoint la troupe lors d'une tournée au Portugal, tout comme l'Angolaise Alfonsina Domingas qui a émerveillé le public par son jeu, son regard, son mime. L'autre bossu Franck est français, alors que Maria Ramos a brillé par son jeu et sa voix de chanteuse d'opéra. Après que les deux compères aient perdu leur bosse, on comprit que tout est bien qui finit bien et même les deux sorcières ont montré leur joie en lançant des youyous. A la fin du spectacle, le public se lève pour des ovations ininterrompues.