En entendant la quantité de drogue trouvée sur l'inculpé, la jeune avocate sifflota. Maître Mahfouf a vite fait une opération. Sachant qu'un gramme de came peut «soulager» dix sniffeurs, elle a eu une idée frissonnante sur le nombre de drogués à servir avec les vingt-cinq grammes... Et avec la terrible Naïma Dahmani, la présidente de la section correctionnelle du tribunal de Chéraga (cour de Blida), il faut se serrer la ceinture de peur d'être emporté par un verdict pas possible qui peut voir le propriétaire de ces vingt-cinq grammes s'allonger longtemps aux «quatre H» d'El Harrach où il ne fait pas bon d'y passer une seule nuit. Et pourtant, la loi protège les drogués mais jamais ceux qui servent et desservent les malades de ce maudit poison. Pris avec 25 g de came, Abderrachid Amor, 29 ans, a vite fait de reconnaître les faits devant la juge de mardi de Chéraga (cour de Blida). Il a vite fait de reconnaître, car mille ennuis l'attendaient à la fin des débats. Et parmi ce lot d'ennuis, il y aura d'abord la douche glacée lâchée plus tard par Zaïm, ce parquetier qui monte, constituée de lourdes demandes prévues par la loi du 25 décembre 2004 portant prévention et répression de l'usage et du trafic illicites de stupéfiants et de substances psychotropes. Une loi suffisamment costaude pour, en principe, arriver à bout de ces irréductibles dealers qui évoluent en eaux troubles, s'amusant à faire passer la came à dos de mulet à nos frontières si difficiles à surveiller, malgré tous les efforts. Ensuite, il y aura la lecture du verdict à la fin de ramadhan. Un verdict qui concerne aussi Fayçal, Nabil et d'autres jeunes qui ont trempé dans ce bourbier. Les cinq inculpés vont alors faire en sorte de quoi donner le tournis à la juge du jour qui a beaucoup fait dans la morale en direction de tous les présents. Elle a même pris son temps pour reprendre des passages de leurs déclarations faites devant la police judiciaire et le juge d'instruction. Elle a repris toute l'instruction. Ce qu'il faut aussi souligner, c'est que la peur a fait virer tout ce beau monde. Il y a ceux qui avaient reconnu connaître le dealer et ont confirmé à la barre et vice-versa pour ceux qui avaient nié. La cerise sur le gâteau est Amor. Il a reconnu, cela suffisait pour que la juge saisisse cet aveu comme une preuve de culpabilité. La détention et l'usage de drogue y sont. La commercialisation, elle, ne peut être retenue du seul fait que Amor n'a pas été pris en compagnie de drogués-clients. D'ailleurs, les deux derniers inculpés d'usage de drogue n'ont pas été inquiétés par la présidente à qui ils avaient assuré qu'ils n'avaient pas acheté la drogue chez Amor. Ce sont des enfants du même quartier et cela ne prouve rien. «C'est vous qui le dites. Durant l'enquête, ce n'est pas ce que vous aviez déclaré», marmonne la présidente qui notera les trois ans de prison ferme avant de décider une mise en examen du dossier sous huitaine, le temps de mieux réfléchir...