Serhane a l'insulte, les menaces, l'invective, la critique, la mauvaise humeur dans le sang. Il s'en prend à n'importe qui. Il a un casier si chargé que n'importe quel président de section correctionnelle a envie de vite refermer la chemise et d'aller examiner les faits avant de décider de rendre justice. Cette fois-ci, il s'en prend à ses proches. Et le plus proche des proches est le tonton maternel. Toutes les explications fournies au juge de Koléa n'ont pu le convaincre. Même la plaidoirie de l'avocate n'a pas dépassé les demandes de larges circonstances atténuantes, car Serhane avait demandé pardon à son oncle qui était venu enfoncer le garnement de neveu qui ne veut pas changer de conduite. Et l'article 284 avait été appliqué dans toute sa rigueur. Le verdict aura été justement puisé dans cet article, et les deux ans de prison ferme calmeraient peut-être Serhane. Le malheureux Serhane aura passé ce dimanche trois moments durs devant hadj Barik, le juge de Koléa (cour de Blida). Il s'en est pris au tonton maternel, puis au frère de son beau-frère et enfin le cousin. Et dans les trois dossiers, il y a une épée à chaque fois brandie. Il a expliqué le port de cette épée car il est gardien dans une école primaire à Bou Ismaïl. Cette fois, il s'agit de menaces de mort à l'aide d'une épée. Il va se murer d'abord dans un silence inquiétant avant d'éclater sous l'impulsion de son avocate, maître Hayet Kadi, qui l'a suivi avec beaucoup d'intérêt surtout depuis qu'il a décidé de cracher le morceau. - «J'ai couru derrière la pseudo-victime, car c'est elle qui m'a menacé en premier. Elle m'a même couru après, avant que je ne me ressaisisse et ne la poursuive. Je n'ai fait d'abord que fuir devant le danger avant que je ne décide de contre-attaquer pour sauver ma vie», marmonne Serhane. - «Vous auriez pu tuer et vous retrouver en criminelle», relève hadj Rabah Barik, le président de la section correctionnelle du tribunal. - «Deux ans ferme et cent mille dinars», rumine Malek Drissi, le sobre représentant du ministère public. Maître Kadi va d'abord entamer sa plaidoirie par une rapide lecture de l'article 284 du code pénal, rend hommage au magistrat qui avait commenté les faits à leur «juste valeur sans haine ni passion et ça c'est très bien». Les circonstances atténuantes sont réclamées avec beaucoup d'audace par maître Kadi qui avait appris dimanche que le président du pénal peut aussi se montrer répressif à souhait, histoire de rappeler à tout un chacun que le glaive de la justice, savamment brandi, peut rendre le sourire aux justiciables qui viennent réclamer leurs droits, le minimum tout au moins. D'ailleurs, l'énoncé du verdict (deux ans de prison ferme) à l'encontre de ce dangereux énergumène en liberté n'aura aucunement ému l'assistance, surtout ceux qui avaient assisté aux lourdes et tragiques débats où la justice a tranché.