Un rassemblement de jeunes, qui campaient sur une place de la capitale, ont été attaqués dans la nuit par un groupe de loyalistes, faisant plusieurs blessés, sans que les forces de l'ordre n'interviennent, ont indiqué des témoins. Des centaines de «jeunes du 24 mars», un groupe de différentes tendances, y compris des islamistes, s'étaient rassemblés sur la place Jamal Abdel Nasser, à Amman, où ils avaient dressé un campement pour appeler le régime jordanien à des «réformes» et au «jugement» des dirigeants corrompus, lorsqu'ils ont été attaqués par une cinquantaine de loyalistes. La plupart des jeunes ont été blessés à la tête et ont dû être hospitalisés. Ces affrontements vont-ils compliquer le dialogue national lancé en Jordanie ? Il peine à réaliser des progrès, la puissante opposition islamiste ayant refusé de s'y joindre, alors que des analystes mettent en garde contre un risque d'explosion. Une commission de dialogue a été créée par le gouvernement le 14 mars pour se pencher sur l'amendement de la loi électorale et celle des partis politiques dans un délai de trois mois. Les quatre membres de l'opposition islamiste invités à s'y joindre ont refusé d'y participer, exigeant que l'«ordre du jour inclut des réformes constitutionnelles qui donnent le pouvoir au peuple», a déclaré à Zaki Bani Rsheid, chef du bureau politique du Front de l'action islamique (FAI), principal parti d'opposition. Le chef de cette commission, le président du Sénat, Taher Masri, a déclaré jeudi qu'il «poursuivait ses tentatives de convaincre les islamistes de se joindre au dialogue». Pour les encourager, la commission a décidé mercredi de mettre «les amendements constitutionnels» au menu de ses débats, a-t-il affirmé. Elle examinera notamment «l'éventualité de confier au (pouvoir) judiciaire la supervision des élections législatives au lieu du ministère de l'Intérieur, la durée des sessions parlementaires et le mandat du président de la chambre, qui nécessitent des amendements constitutionnels». «Jusqu'où peut-on aller dans nos débats ? Cela n'est pas clair», a-t-il cependant souligné. «Ces amendements proposés ne sont que des changements de forme liés à la loi électorale, or nous demandons des changements de fond qui permettent la formation de gouvernements parlementaires», souligne Bani Rsheid. «Tout cela n'augure rien de bon, la commission patauge et elle a clairement les mains liées par un ordre du jour limité», a estimé pour sa part un ancien ministre. «L'échec du dialogue pourrait pousser les opposants à créer des commissions populaires qui se chargeraient des amendements constitutionnels demandés par le peuple, passant outre l'autorité de l'Etat», prévient M. Masri. Selon lui, «la nature de ces demandes pourrait se radicaliser». En Jordanie, où des manifestations se poursuivent depuis trois mois, l'opposition islamiste ainsi que les mouvements de gauche et nationalistes n'ont pas appelé à un changement de régime, mais à des réformes politiques profondes et au jugement des corrompus.